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LA RENAISSANCE ET SES ORIGINES FRANÇAISES Ε venais de faire ma première communication aux Anti- quaires de France sur les signatures des artistes du moyen âge ; nous descendions l'escalier du Louvre ; dans notre petit groupe la discussion continuait, quand, se retournant, le comte R. de Lasteyrie nous dit tout-à- coup : « Eli bien, c'est très simple, tout est à refaire ». Il faut reconnaître, en eiï'et. que la formule de « l'humble primitif qui voulait mourir dans l'anonymat d'une gloire commune», nous a laissé jusqu'ici tra- vailler sur de simples entités, que nous marchons sur de pures généralités, et qu'alors, il est presque impos- sible d'avancer sur une route qui n'est point jalonnée. Nous avons entendu, il y quelques années, la plainte de M. J. Helbig, qui, rendant compte du livre de Zim- merman écrivait : Il est impossible de ne pas constater combien les études en Italie sont facilitées par l'existence de documents signés et de monuments datés. Voici, au xi° et au xir siècle, les noms de Nicolas, de Guillaume, de Bencdettus, qui apparaissent avec un long cortège de travaux datés d'une manière certaine. Où trouverions-nous l'équivalent de ces renseignements dans les autres pays, en France notamment, où cependant, à la même époque, des artistes d'un ordre incontestablement supérieur taillaient des chefs-d'œuvre 2 ? 1. Oberitalische Plaslik im friihen uncl hohenMittelalter (Leipzig, Liebeskind, 1897, in-4°), dans la Revue de Vart chrétien, 1898, p. G8. 2. On faisait si peu attention, en eifet, aux signatures, que M. Bertaux imprimait vers le même moment : « En Italie, les origines de la sculpture du moyen âge sont encore obscures », et que beau- coup plus récemment, à propos de ma communication à l'Académie, le critique d'art du Popolo liomano (28 juin 1905), la résumant, ajoutait : « La preuve a de l'autorité, mais en France seulement; en Italie, il reste que les primitifs n'ont pas signé..., à moins cependant qu'une découverte nouvelle... )>

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LA RENAISSANCE

ET S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S

Ε venais de faire ma première communication aux Anti-quaires de France sur les signatures des artistes du moyen âge ; nous descendions l'escalier du Louvre ; dans notre petit groupe la discussion continuait, quand, se retournant, le comte R. de Lasteyrie nous dit tout-à-coup : « Eli bien, c'est très simple, tout est à refaire ».

Il faut reconnaître, en eiï'et. que la formule de « l'humble primitif qui voulait mourir dans l'anonymat d'une gloire commune», nous a laissé jusqu'ici tra-vailler sur de simples entités, que nous marchons sur de pures généralités, et qu'alors, il est presque impos-

sible d'avancer sur une route qui n'est point jalonnée. Nous avons entendu, il y quelques années, la plainte de M. J. Helbig, qui, rendant compte du livre de Zim-merman écrivait :

Il est impossible de ne pas constater combien les études en Italie sont facilitées par l'existence de documents signés et de monuments datés. Voici, au xi° et au x i r siècle, les noms de Nicolas, de Guillaume, de Bencdettus, qui apparaissent avec un long cortège de travaux datés d'une manière certaine. Où trouverions-nous l'équivalent de ces renseignements dans les autres pays, en France notamment , où cependant, à la même époque, des artistes d'un ordre incontestablement supérieur taillaient des chefs-d 'œuvre 2 ?

1. Oberitalische Plaslik im friihen uncl hohenMittelalter (Leipzig, Liebeskind, 1897, in-4°), dans la Revue de Vart chrétien, 1898, p. G8.

2. On faisait si peu attention, en eifet, aux signatures, que M. Bertaux imprimait vers le même moment : « En Italie, les origines de la sculpture du moyen âge sont encore obscures », et que beau-coup plus récemment, à propos de ma communication à l'Académie, le critique d'art duPopolo liomano (28 juin 1905), la résumant , ajoutait : « La preuve a de l 'autorité, mais en France seulement; en Italie, il reste que les primitifs n'ont pas signé..., à moins cependant qu'une découverte nouvelle... )>

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LA 11Ε V U Ε DE L ' A I I T

Or, des n o m s , des da tes , n o u s p o u r r o n s en fou rn i r m a i n t e n a n l . p o u r la F r a n c e , un ce r t a in n o m b r e ; les œ u v r e s s ignées de cent seize s c u l p t e u r s ont dé jà p a r u d a n s VAmi des monuments de M. Cli. N o r m a n d ' ; les pe in t r e s s u i v r o n t p r o c h a i n e m e n t .

F I I . . 1 . — B A S E DE C O L O N N E .

Musce c iv ique de Bologne .

A u j o u r d ' h u i , je v o u d r a i s s eu l emen t m e t t r e en l umiè re la s û r e t é de vue avec laquel le le comte de Las teyr ie , dè s le p r emie r jour , j u g e a i t la s i t ua t i on , e t m o n t r e r su r u n p o i n t t rès pa r t i cu l i e r , celui des o r ig ines de la R e n a i s s a n c e , à que l l e s c o n s é -

1. Communication ;i l'Académie des inscriptions et belles-lettres du 23 juin 1905.

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ВЕХЕ DE γ Γ Ο ΑΧ Τ Ε L Α Μ ι. Ε Υ G Ε χ ι Ο L U C A S

— T Y M P A N И Ε LA Р О Г . T E P R I N C I P A L E И И B A P T I S T È R E DE P A R M E .

. — U Χ Ε <· С Ο R R I D A » A L ' A X С 1 Ε Χ Χ Ε « Ρ Ι. Α Ζ Α » I) Ε M A D R I D .

Collect ion de D. Miguel Orliz Cafiavate.

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64 L A R E V U E D E L ' A R T

q u e n c e s i m p r é v u e s von t n o u s a m e n e r les n o m s i n a t t e n d u s de t a n t d ' a r t i s t e s , i n c o n n u s h ie r , qui , t o u t d ' un coup, v i e n n e n t a ins i fa i re l eur appa r i t i on d a n s l ' h i s to i r e de l ' a r t . Un l ivre des p lu s p réc i eux , la Storia dell' arte italiana, que j 'a i l o n g u e m e n t é tud i é d a n s la Revue critique, va f o u r n i r à m a thèse , p e u t - ê t r e t r è s a u d a c i e u s e et d o n t j e ne m e d i s s imule pa s les d a n g e r s la b a s e p r imord i a l e .

D a n s un a r t ic le de la Revue des Deux-Moncles du 1e r j u i l l e t 1905, M. L a f e n e s t r e , avec sa g r a n d e c o m p é t e n c e , r é s u m a i t a ins i l ' é ta t ac tue l de n o s c o n n a i s s a n c e s su r les o r ig ines de la R e n a i s s a n c e :

Durant onze siècles (320-1453), c'est presque toujours l'Orient qui exalte et domine les ima-ginations occidentales. Dépositaire fidèle des techniques de l'antiquité, héritier des traditions, des passions, des vices de l'IIellade dégénérée, parfois aussi de ses vertus et de son génie, retrouvant même à certaines époques, au vi° siècle sous Justinien, aux ix° et xe siècles sous les Macédoniens, son énergie héroïque et son enthousiasme esthétique, l'empire byzantin reste aussi la porte toujours ouverte sur la Perse, la Syrie, l'Egypte, l'Inde même et la Chine. Son industrie, son commerce, son prestige, entretiennent par intervalles, ou raniment en Italie, en France, en Germanie, l'intelligence endormie de la beauté et le besoin d'exprimer, par des formes visibles, les croyances religieuses et les émotions terrestres 2.

E t q u a n d , p lu s loin, il p a r l e r a de l'Apocalypse :

l'hallucination orientale qui, durant tout le cours des invasions et dominations barbares, parmi l'incessant effroi des calamités publiques, envahira peu à peu, épouvantera les âmes inquiètes et les esprits troublés,

n o u s ne s a u r i o n s n o u s é t o n n e r de voir n a t u r e l l e m e n t en d é c o u l e r ce t t e c o n c l u s i o n :

C'est elle que, dans leur premier réveil, les artistes en Europe s'efforceront vainement de réaliser en des formes monstrueuses, jusqu'à ce que enfin la conception occidentale, celle du premier chris-tianisme, alliance harmonieuse de vérité et de beauté, de la tradition hellénique et de la sensibilité chrétienne, reparaisse enfin, aux xue et хшв siècles, chez les sculpteurs en France, chez les peintres en Italie з.

Ainsi , c 'es t d a n s l ' h e l l én i sme qu' i l f au t r e c h e r c h e r les o r i g i n e s de l ' a r t n o u v e a u du хп е e t d u x in c s iècle. E t si a lo r s nous d e m a n d o n s u n e d a t e p r é c i s e , M. L a f e n e s t r e n o u s la f e r a c o n n a î t r e :

Les historiens de la Renaissance classique ont depuis longtemps salué en Frédéric II de Ilohen-staufeu (1194 -J- 1250) l'un des précurseurs les plus clairvoyants, l'un des initiateurs les plus hardis de l'esprit moderne dans les arts et dans les lettres, comme en politique et en religion -''.

Enf in , d a n s les d e r n i è r e s l ignes , qu ' i l consac re a u x g r a n d s t r a v a u x e n t r e p r i s p a r F r é d é r i c II d a n s l ' I ta l ie mér id iona l e , M. La fenes t r e n o u s m o n t r e r a

dans ce décor, mélangé de souvenirs antiques et d'intluences françaises, les caractères nette-

1. Il ne faut que se rappeler l'accueil fait aux théories de Courajod, lorsqu'il les professait en 1888 (cf. Gazette des Beaux-Arts, t. I). Mais il ne travaillait alors que sur le xve siècle, et n'avait pas à sa disposition les éléments de critique que nous sommes sur le point de posséder.

2. Revue des Deux-Mondes du 1er juillet 1903, p. 81-88. 3. Ibid., p. 9o. 4. Ibid., p. 119.

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L A R E N A I S S A N C E E T S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 65

ment apparents de la Renaissance italienne, telle qu'elle va se manifester quelques années après à Pise, dans les œuvres de Niccolô l'isano (chaire du Baptistère, 1260)

Tel le es t d o n c ac tue l l emen t la théor ie de l 'École f r ança i se . Car , b ien que M. La -f e n e s t r e ai t m e n t i o n n é en note , d a n s sa be l le é tude , le l ivre de M. V e n t u r i , je ne vois nu l l e p a r t qu ' i l ai t , je ne d i ra i p a s admis , m a i s s i m p l e m e n t m ê m e m e n t i o n n é , la sér ie p o u r t a n t si i m p o r t a n t e des d o c u m e n t s n o u v e a u x qu 'on y r e n c o n t r e e t les c o n s é -q u e n c e s qu i en d é c o u l e n t ; el les ne s a u r a i e n t c e p e n d a n t , m a i n t e n a n t , ê t re p a s s é e s sous s i l ence .

On p a r l e b e a u c o u p de la R e n a i s s a n c e : au fond , s 'es t -on j a m a i s b ien e n t e n d u su r la v a l e u r qu ' i l f au t a t t r i b u e r a ce mot ? On n o u s a p p r e n a i t à l ' é co le ,que le m o y e n âge finit à la p r i s e de Cons t an t inop le p a r l e s Turc s (1453): que de ce t te année- là da t e la R e n a i s s a n c e . C 'est pa r fa i t , je le crois , s'il s ' ag i t s i m p l e m e n t d 'h i s to i re : on peu t , en effet , la d iv i se r t r è s n e t t e m e n t . Mais p o u r l ' a r t , es t -ce v r a i m e n t la m ê m e chose ?

« L ' i n v e n t i o n a r t i s t i que , écr ivai t d e r n i è r e m e n t M. Maurice Rar rès , n 'es t p a s u n e b o n n e f o r t u n e d u h a s a r d , ma i s elle est la t rouva i l l e d ' un h e u r e u x r e g a r d que le gén ie j e l t e s u r la n a t u r e . » C'est exce l l emmen t dit . Or, quel le est « la p r e m i è r e invent ion a r t i s t i q u e , le p r e m i e r r e g a r d h e u r e u x » que n o u s p u i s s i o n s c o n s t a t e r off ic ie l lement , s a n s d i s c u s s i o n , d a n s l 'h i s to i re de l ' a r t du m o y e n âg e ? De là, ce me semble , d e v r a d a t e r la R e n a i s s a n c e . D 'abord , q u ' a p p e l l e r o n s - n o u s « r e g a r d h e u r e u x » ? Ces d e u x p o i n t s r é s o l u s p r é c i s e r o n t , je pense , nos r e c h e r c h e s .

E n r éa l i t é , ce « r e g a r d h e u r e u x » n'est-il p a s l ' i n s t a n t où les a r t i s t e s , c o m p r e n a n t la n a t u r e , se m e t t e n t à la c o p i e r ; « le m o m e n t où le s e n t i m e n t de la f o r m e h u m a i n e , qu i a t o t a l e m e n t d i s p a r u de l ' a r t du moyen âge , r é a p p a r a î t » 2 ?

Auss i , je c ro i ra i s vo lon t i e r s que la c r i t i que fa i t f a u s s e rou te , q u a n d elle veu t n o u s e x p l i q u e r la R e n a i s s a n c e p a r un s imple r e t o u r a u x t r a d i t i o n s de l ' an t iqu i t é , q u a n d , à l ' exemp le de M. Ven tu r i , elle p r é t e n d tout p r éc i s e r en se b o r n a n t à n o u s fa i re t o u c h e r d u do ig t les m o n u m e n t s a n t i q u e s qui s e r v i r e n t de m o d è l e s a u x p r e m i e r s a r t i s t e s de la R e n a i s s a n c e . C'est , ce nie semble , p r e n d r e l 'effet p o u r la cause .

Il se p e u t que , d a n s l eu r s b a l b u t i e m e n t s , a lo r s que l eu r ma in , a u x p r i ses avec des d i f f icu l tés e x t r a o r d i n a i r e s , co l l abore à g r a n d ' p e i n e avec l ' éc los ion de s e n t i m e n t s n o u v e a u x , i ls d e m a n d e n t aux p réc ieux ob j e t s d ' a r t qui les e n v i r o n n n e n t la m a n i è r e de r e n d r e l e u r a sp i r a t i on , ma i s ils le fon t s e u l e m e n t p a r c e que l eur « r e g a r d h e u r e u x » les gu ide , p a r c e que l ' âme de l ' human i t é occ iden ta le , f e r m é e h ie r encore , v ien t de s ' ouvr i r à u n idéal nouveau , qui, i n c o n s c i e m m e n t , l 'a t r a n s f o r m é e . Le m o m e n t où n o u s c o n s t a t e r o n s cet « h e u r e u x r e g a r d » p o u r la p r e m i è r e fois , s e ra donc , à mon avis , ce lu i qui dev ra fixer l 'o r ig ine de la R e n a i s s a n c e a r t i s t i que .

P o u r M. La fenes t r e , n o u s v e n o n s de le v o i r , c 'es t sous F r é d é r i c II de H o h e n -s t a u f e n ; p o u r M. V e n t u r i , qui a r r ive a r m é de d o c u m e n t s n o u v e a u x , c 'es t en 1198; n o u s ne p a r l e r o n s pas , p o u r l ' i n s tan t , de la t hè se de M. W o l t m a n n , qui che rche les

d. Ibû/., p. 12ϋ. 2. Eugène Miintz, Henaissance, p. 280.

LA REVUE DE L ART. — XX. 9

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6 LA R E V U E D E L ' A R T

= 5f S

I

Ш

F I U . 2 . — INSCRIPTION

RELEVÉE s u i t LA FAÇADE DE

L 'ÉGLISE DE S A I N T - G I L L E S .

D'après l ' e s t a m p a g e .

o r i g i n e s de la Rena i s sance d a n s le N o r d , j e le l a i s se en ее m o m e n t en dehor s de m o n é tude . E x a m i n o n s s e u l e m e n t , p a r c o n s é q u e n t , les m o n u m e n t s a u x q u e l s les d e u x p r e m i e r s a u t e u r s v o n t d e m a n d e r l 'appui de l e u r a u t h e n t i c i t é .

N o u s n ' avons pas à r e m o n t e r p l u s h a u t q u e le b a p t i s t è r e de Pise : je ne t rouve pas là de p lu s t y p i q u e figure à en c i t e r que la c h a r m a n t e j oueuse de lyre , q u e n o u s r e n c o n t r o n s au m o n t a n t de la co lonne do g a u c h e de la p o r t e d ' e n t r é e . El le da t e de 1245 envi ron : elle est a n t é r i e u r e au c é l è b r e pulpito de Nic-colà d 'Apul ie (1260). à l 'Annonc ia t ion si i m p r e s s i o n n a n t e du pulpito de San Michele in Borgo, de P i s e , r e p r o d u i t e p a r M. V e n t u r i .

Mais il s emble b ien inut i le de n o u s a t t a r d e r à c e x i n e s iècle , p u i s q u e M. Ven tu r i , lui, l'ait r e m o n t e r la R e n a i s s a n c e à Bene-de t to Ante lami , qui scu lp ta , en 11(.)8. la p o r t e d u b a p t i s t è r e de P a r m e . Là, il n o u s m o n t r e l ' a r t i s t e s ' i n s p i r a n t d ' a b o r d d e s s a r c o p h a g e s roma ins , pu i s se p é n é t r a n t de l ' a r t d u P i é m o n t et du Mont fe r ra t , su r lequel , d ' a i l l eu r s , il ne n ie p a s l ' in -f luence f r an ça i s e : il n o u s d o n n e enf in l ' i n s c r i p t i o n d u p o r t a i l du b a p t i s t è r e de P a r m e , en ve r s l é o n i n s : ius HINIS DEMPTIS

•— AN NI S DE MILLE — DVCIIXTIS — I N C E P I T DICTVS — OPVS HOC

SCVLPTOII — IÎENEDICTVS, où n o u s v o y o n s , là, en effet , u n e V i e r g e i n t é r e s san t e , se t o u r n a n t ve r s les Mages , d a n s un m o u -v e m e n t qui cesse d ' ê t r e s tyl isé , vé r i t ab l e i n t e r p r é t a t i o n d 'un ges t e t rès h u m a i n .

E t c 'es t bien à la m ê m e époque <|ue M. Mâle1 r a t t a c h e les o r ig ines de la Rena i s sance , q u a n d il n o u s s i g n a l e la t r a n s -fo rma t ion de l ' a r t chré t i en du х ш е s iècle , sous la p o u s s é e de saint F ranço i s d 'Ass i se (1182 f 1226) :

Il y eut, dit-il, à ce moment, le grand miracle de l'amour les stig-mates), qui étonna l'Europe et lit naître des formes nouvelles de sensi-bilité. Alors, une tendresse inconnue détend les âmes, on dirait que la chrétienté tout entière reçoit le don des larmes.

P o u r m a pa r t , je c ro is qu'il f a u t e n c o r e r e m o n t e r p lu s hau t , g r â c e aux r e n s e i g n e m e n t s f o u r n i s p a r M. V e n t u r i lu i -m ê m e .

N 'es t -e l le p a s v r a i m e n t b ien c u r i e u s e , ce t te t ê t e qu i s o r t d ' u n e lune t t e de San Savino de B a r i ? N ' e s t - e l l e p a s v ivan te , ce t te b a s e de co lonne du m u s é e c iv ique de Bo logne , don t j e dois la p h o t o g r a p h i e au s avan t c o n s e r v a t e u r du m u s é e , M. E. Brizio (fig. 1)? N'es t -e l le pa s a d m i r a b l e , l ' é l égan t e Pudicitia de la c a t h é d r a l e de C r é m o n e , qu ' i l f a u t r a p p r o c h e r de

1. Revue des Deux-Mondes, 1er octobre 1905.

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L A R E N A I S S A N C E E T S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 67

l'Annonciation d u Libro coralc d e l ' E s t e n s e de Modène 1 ? N o u s s o m m e s en p le in xn e s i èc le . Mais je ne t r o u v e r ien de p lus i m p r e s s i o n n a n t , v r a i m e n t , d a n s cet o r d r e d ' idées , que la Nativité d u b a p t i s t è r e de San Giovanino in Fonte-, à V é r o n e (vers 1179), que M. V e n t u r i appe l l e si j u s t e m e n t u n e fleur de l ' a r t r o m a n . El le me s e m b l e b ien p l u s e m p r e i n t e e n c o r e que la Vie rge d 'Ante lami de P a r m e , de ce « r e g a r d h e u r e u x » qu i s ' e s t si p r é c i e u s e m e n t a r r ê t é sur le m o u v e m e n t des S a g e s - F e m m e s , p o u r le r e n d r e d a n s u n e harmo-n ie où l ' idéa l v i e n t s ' un i r au r é a l i s m e d ' u n e façon si in t ime .

E t j ' a v a n c e r a i en -co re ; j ' i r a i , p o u r m a p a r t , j u s q u ' a u ta i l l eur de p i e r r e de la p o r t e de b r o n z e de S a n Zeno de V é r o n e 3 , du mi l ieu du X I I e s iècle ( a p r è s 1139, p u i s q u e la f a ç a d e du d ô m e ne fu t t e r m i n é e q u ' à ce t te da te) , où l 'on t r o u v e dé jà , — m a i s pou r la p r e m i è r e fois , je crois , — ce n a t u r a l i s m e qu 'on c r o y a i t j u s q u ' i c i l 'exclu-sive p r o p r i é t é du xinc

s iècle V r a i m e n t , p a r exem-

p l e , il m e s e m b l e que n o u s s o m m e s à la l imite e x t r ê m e . V a i n e m e n t on m e s i g n a l e r a i t à Modène les g é n i e s 5 de W i l -l i g e l m u s , d o n t l ' âme du No r d s e t r an s fo r m a, d an s le p r e m i e r l i e r s du xn° s i è c l e , sous le c h a u d soh ' i l de P l a i s a n c e (1122) et de F e r r a r e (1135); v a i n e m e n t on me m o n t r e r a i t les modè l e s a n t i q u e s d o n t il s ' es t in sp i ré ; la copie me s emb le , au con t r a i r e , t r o p s e rv i l emen t na ïve p o u r m ' a u t o r i s e r à d é g a g e r une p e r s o n n a l i t é rée l le de l ' é t r a n g e r , d ' a i l l eurs , qui exé-

F I G . 3 . — D E U X S T A T U E S DE LA F A Ç A D E Υ Ε L ' É G L I S E

D E S A I N Τ - G I L L E S .

A gauche de la première , l ' inscript ion : llrunus me fecit.

4. M. Venturi (p. 470) donne la cote XI, II. C'est XII, II, 3 ас XXV qu'il faut lire. 2. Venturi, t. III, p. 228. 3. Venturi, t. III, p. 223. 4. Voir le scribe de Chartres, qui vient d'entrer au Louvre. 5. Venturi, t. III, p. 143.

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68 LA R E V U E D E L ' A R T

enta i t , v e r s le m ê m e t emps , la p o r t e délia Pescheria du Dôme d e M o d è n e . El le ne l a i s s e , en e f fe t , a u c u n e m e n t pe r cevo i r , d a n s son lïnmnn d'Arthur, la m o i n d r e l u e u r de r éa l i sme . Nous s o m m e s en p le in canon a r t i s t ique , <[iie n o u s d e v o n s r a p p r o c h e r de la f r i se de la c a t h é d r a l e d ' A n g o u l è m e : t ou te s les d e u x si p r o c h e s p a r e n t e s , si é t r a n g e -m e n t r e s s e m b l a n t e s , que , d a n s une a u t r e occas ion , j e t e n t e r a i de r e c h e r c h e r la

pensée qui les uni t , d a n s leur c o n c e p t i o n c o m m e d a n s l e u r exécu t ion .

Ainsi , il s emble bien <pie n o u s ne p u i s s i o n s d e m a n d e r à l ' a r t de l ' I tal ie de t r aces de r e t o u r à l ' é t ude de la n a t u r e a n t é r i e u r e s à ce t le p o r l e de b r o n z e a n o n y m e de San Zeno de Vérone , du mil ieu du xn e siècle.

Il est i n t é r e s san t , dès lo r s que là n o u s a v o n s de s l imi t e s a b s o l u m e n t préc ises , d ' é tud ie r non s e u l e m e n t p a r les m o n u -ments , ma i s p a r l eu r s n o m s m ê m e s , q u e les a r t i s t e s o n t c r u devoir l éguer à la pos té r i t é , la s i t ua t i on a r t i s t i q u e de la F r a n c e à cel le m ê m e époque .

Je n 'ai n u l l e m e n t l ' i n ten t ion d ' a c c u m u l e r ici les m a t é -r iaux : je suis conva incu que les a r t i c l e s les p l u s c o u r t s , ma i s s o i g n e u s e m e n t d o c u m e n t é s , s o n t les p l u s p e r s u a s i f s : je me con ten te ra i donc de r é u n i r ici q u e l q u e s m o n u m e n t s ( |ue je c ro is é g a l e m e n t i n d i s c u t a b l e s .

Sa in t -Se rn in de Toulouse n o u s f o u r n i t d e u x s c u l p t u r e s du xiic siècle, d 'un in té rê t c o n s i d é r a b l e . C 'es t d ' a b o r d un c o r b e a u , su r lequel es t posée la s t a t u e d ' u n a p ô t r e . De quel c i seau , m a î t r e de lui. son t exécu té s cet h o m m e b a r b u et ces d e u x f e m m e s si e x t r a o r d i n a i r e m e n t r éa l i s t e s , m o n t é e s s u r d e u x c h i m è r e s qu 'e l les s e m b l e n t d o m p t e r ! Quel le "expres-s ion d a n s l eu r s figures, u n peu i n s p i r é e s de l ' a r t h i n d o u , que l s g e s t e s souples d a n s l e u r s m e m b r e s j e u n e s et po te lés , si g r a c i e u s e m e n t p r o p o r t i o n n é s ! E t j e vois , à en r a p p r o c h e r i m m é d i a t e m e n t ce chap i t eau de la m ê m e ég l i se (fig. 9), où . d a n s la pa r t i e supé r i eu re des co rps , la copie de la n a t u r e me s e m b l e ne j a m a i s avoir été s u r p a s s é e . Mais ici, a u c u n e da t e p réc i se , aucun n o m ne v i e n n e n t se r évé le r à n o u s . Au con t r a i r e , u n e cu r i euse tè te de Zamora , — q u e M. M. Dieulafoy

va p r o c h a i n e m e n t p u b l i e r e t qu ' i l a b ien voulu me p e r m e t t r e d ' e x a m i n e r , — q u i so r t si v ivan te d 'un por ta i l , œ u v r e des Clunis iens , a n t é r i e u r e à 1174 1, e s t au m o i n s auss i cu r i euse que celle de Bari , qui lui es t a s s u r é m e n t p o s t é r i e u r e .

Mais n o u s d e m e u r o n s enco re d a n s le d o m a i n e des e n t i t é s : n o u s p a r l o n s du xii° siècle, nous i n t e r r o g e o n s des œ u v r e s m o n a s t i q u e s . P r é c i s o n s d a v a n t a g e .

C'est à pe ine si, jusqu ' i c i , on a fa i t é ta t des s t a tue s de Sa in t -Gi l l e s d 'Ar les , d o n t

!. Don Cesareo Fernande/ Duro, réminent secrétaire perpétuel de l'Académie royale de l'histoire d'Espagne, a bien voulu ine donner ces renseignements si intéressants.

F ι c.. 4. S-глти К D U P O R T A I L O U E S T

L>F. LA C A T H É D R A L E

DE CM A H T R E S

S I G N É E « R O G E R u s » .

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LA R E N A I S S A N C E ET S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 69

beaucoup ont parlé , mais dont bien peu. saut' peut-ê t re M. de Lasteyrie, semblent avoir .compris l 'extraordinaire intérêt. S'est-on préoccupé de lire, à coté des deux plus belles (fig*. 3), ce nom, que j'ai dû aller es tamper sur place, puisque jamais nul n 'avait songé à le faire : BRVNVS ME FECIT (flg. 2)?

Dans sa belle étude, dont les conclusions ne sauraient main tenant être discutées, M. de Lasteyrie 1 établit (pie le portail de Saint-Gilles est antérieur à 1179. Ainsi nous voilà avec un art iste français du t rois ième quar t du xnc siècle, qui, avec un « regard heureux ». joua dans le bass in du Rhône un rôle des plus im-por tan ts . Au cloître de Saint-Trophyme d'Arles, je trouve en effet une statue, mais une seule, qui me semble sortie de sou ciseau, qui inspira également, si elles ne sont pas de lui-même, l 'artiste qui exécuta les quatre statues du porche de la ca thédra le de Romans (Drome). Nous sommes déjà de vingt ans au moins an té r i eurs à Antelami.

Dans le même volume, M. de Las-teyrie fixe, par un ensemble considé-rable de preuves des plus convaincantes, l 'exécution du portail royal de la cathé-drale de Char t res aux environs de 1160. On le croyai t de 1140. généralement . Là aussi, nous t rouvons un nom : H O G E R V S

(fig. 4). Celui-là, par exemple, quand je l'ai appor té aux Antiquaires de France, on l'a sér ieusement discuté. Dans un t rès savant travail , mon érudi t confrère, M. E. Lefèvre-Pontal is 2, pré tend que ce n 'est pas un nom d'art iste, mais celui du dona teur des sculptures, un riche boucher , puisque ce nom est inscrit sur le pilier auquel est adossée une statue qui tient un veau. Que le nom ne soit pas sur la s t a tue , c'est parfai tement vra i : mais celui de Saint-Gilles, BRVNVS , est-il au t rement p lacé? En admet tan t celui-ci comme il le fait, M. Lefèvre-Pontalis est-il en droit , pour ce seul motif, de rejeter celui- là? Mais, va-t-'il ajouter, ROGERVS n 'est pas suivi de fecit. Ici, je n 'aurais rien à répondre , si vra iment je n'avais pour moi les jours passés. Combien fu ren t nom-

1. La Sculpture française, dans les Monuments Piot, t. VI11 (1902). 2. Les Architectes de la cathédrale de Chartres, dans les Mém. des Antiquaires de France, 1903.

F I O . — D É T A I L D ' U N E С О Ι. Ο Ν Ν Ε Τ Τ Ε

D U 1· Ο R Τ A I L O U E S T

DE LA C A T H É D R A L E D E G II A H Γ R E S .

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70 LA R E V U E D E L ' A R T

b r e u s e s e t l i t t é r a i r e s les d i s cus s ions su r des s i g n a t u r e s : i. в. , — F. i. в. , — м., — j. p., e tc . , etc. , n u l l e m e n t su iv ies de fecit, qu 'on pr i t la pe ine de d i s c u t e r — avant, p a r exemple , m a c o m m u n i c a t i o n su r les Primitifs et leurs signatures. T o u t e s ces d i s s e r t a -t ions, je les ai p i e u s e m e n t recuei l l ies : je les pub l i e r a i s , s'il se p r o d u i s a i t a u j o u r d ' h u i q u e l q u e s ob jec t ions : e l les s e r a i en t in s t ruc t ives p o u r l ' é rud i t i on ; le m i e u x e s t p e u t -ê t re de les l a i s se r d o r m i r . Un po in t me s e m b l e p o u r t a n t a cqu i s , de l ' aveu m ô m e de M. Le fèv re -Pon t a l i s : fecit, m a i n t e n a n t , voud ra i t b ien d i re « a fa i t » e t non p l u s : « a fa i t f a i re ». C 'est dé j à b e a u c o u p . Mais, pou r en r even i r à n o t r e R o g e r u s , M. Lefèvre-Pon ta l i s n ' u s e en réa l i t é que d 'un a r g u m e n t i m p o r t a n t . « Il f a u t avoue r , dit- i l . q u e la ques t i on de savoi r si le Cl ia r t ra in R o g e r u s exerça i t un a r t ou u n m é t i e r au XIIu s iècle es t i n so lub le .» Car il n ' e s t pa s c o n n u c o m m e l ' o r fèvre Teudo , qu ' i l appe l l e l ' a rch i t ec te Teudo . Celui- là , on le t rouve , en effet , ci té a insi d a n s le p r e m i e r o b i t u a i r e c l i a r t r a in , a v a n t 1120. p a r c o n s é q u e n t :

Au xviii des Kalendes de janvier (15 décembre) : Obiit Teudo qui aureum scrinium composuit in quo est tunica llealir Maris· et frontem hujus ecclesiœ fecit, et ipsam ecclesiam cooperuit (« Décès de Tendon, qui composa le reliquaire d'or dans lequel est enfermée la chemise de la Sainte Vierge, qui lit le portail de l'église et le couvrit »).

Si M. Le fèv re -Pon t a l i s avai t consu l t é mon Trésor de Chartres L il y a u r a i t t r o u v é d ' i n t é r e s s a n t s dé ta i l s s u r ce Teudo, qui fu t , c o m m e il l ' éc r i t , orfèvre : h o m m e de qua l i t é d ' a i l l eu rs , qui , d a n s le Cartulaire de Notre-Dame de Chartres, s i g n e u n e c h a r t e en 1106. Mais d u m o m e n t où il a d m e t que cet orfèvre é ta i t architecte, s ' i l ava i t p o u r -suivi ses i nves t i ga t i ons d a n s mes Inventaires de Saint-Père-en-Vallée de Chartres2, il au ra i t a lo r s t rouvé , d a n s Y Obituaire du XIIe siècle, qu 'on l i sa i t a u x k a l e n d e s d ' o c t o b r e (1er oc tobre) : Obiit Rogerius aurifex (« Décès de l 'o r fèvre Roge r iu s» ) , N 'es t -ce d o n c p a s là u n Roger , qu i exe rça i t à C h a r t r e s , non pas un mét ie r , m a i s b i e n u n a r t , e t p r é c i -s é m e n t celui de Teudo Xorfèvre, que M. Lefèvre-Ponta l i s accep te p a r f a i t e m e n t c o m m e a rch i t ec te . E t a lo r s que d a n s aucun Nécrologe cliartrain il n 'es t q u e s t i o n d ' un R o g e r u s , boucl ier , qu i c e p e n d a n t , p o u r u n e auss i bel le dona t ion que le p o r t a i l r oya l de la c a t h é d r a l e de C h a r t r e s , m é r i t a i t c e r t e s d 'ê t re in sc r i t au n o m b r e des b i e n f a i t e u r s i n s ignes , ne semble- t- i l p a s que le R o g e r u s de la c a t h é d r a l e doive ê t r e b i en p l u t ô t le R o g e r u s aurifex i n sc r i t au Nécrologe cliartrain, q u ' u n R o g e r u s lanius (boucher) , d o n t p e r s o n n e ne pa r l e , et q u e p r o p o s e a u j o u r d ' h u i , p o u r la p r e m i è r e fois , M. L e f è v r e -Pon ta l i s ? E t j ' a j ou t e r a i , que j u s t e m e n t , d a n s ce po r t a i l de C h a r t r e s , n o u s t r o u v o n s îles c o l o n n e t t e s d ' u n e exécu t ion si p r é c i e u s e , si e x t r a o r d i n a i r e m e n t p o u s s é e , que l ' une d ' e n t r e el les p a r a î t sor t ie du ciselet d ' un a r t i s t e b ien p l u s h a b i t u é a u x m é t a u x p r é c i e u x qu ' au t rava i l de la p i e r r e . Cet te exquise pe t i te f e m m e (fig. 5) n ' e s t - e l l e p a s d igne , en effet , d a n s sa dé l ica te mièvre r ie , d a n s sa n u d i t é j e u n e si g r a c i l e m e n t r e n d u e , de f i gu re r p a r m i les concep t ions les p lus dé l ica tes q u e vi t éc lo re la F r a n c e sous le souil le gén ia l de s p r é c u r s e u r s de la R e n a i s s a n c e ?

Nous a l lons r e t o m b e r d a n s les e n t i t é s ; s eu l emen t , n o u s a u r o n s ici une d a t e t r è s p réc i se . C 'est p o u r recevoi r le c o r p s de l ' évêque J e h a n Ie r , m o r t en 1140, q u e f u t exé -

1. Mély (F. de), le Trésor de Chartres. Paris, Picard, 1886, in-8°, p. 47. 2. Paris, Picard, 1887, gr. in-8°, p. 15.

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L A R E N A I S S A N C E E T S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 71

cu lée u n e be l l e cuve sépu lc ra le que n o u s a d m i r o n s d a n s la c a t h é d r a l e de Sa in t -P i e r r e de L i s i eux . Je c ro i s qu 'on che rche ra i t v a i n e m e n t à ce t te da te , a u t r e p a r t , en F r a n c e , en P r o v e n c e , en I tal ie , u n m o n u m e n t s imi la i re

Si, en f in , q u i t t a n t les f r o n t i è r e s de la F r a n c e ac tuel le , m a i s r e s t a n t c e p e n d a n t d a n s les l i m i t e s d u Voyage de deux religieux bénédictins, qui , p o u r le moyen âge , son t en réa l i t é ce l les d u d o m a i n e d a n s lequel r a y o n n e n t t ous les a r t i s t e s de la щ Gaule , n o u s p o u s s o n s j u s q u ' à B runswick , il n o u s s e r a p e r m i s de re lever , - ci . d a n s l ' ég l i se de Sain t -Bia ise , des f r e s q u e s d 'une p e r s o n n a l i t é dé jà b i en Ц ) lLl é t r a n g e m e n t s u r p r e n a n t e , t r è s accusée , d o n t a s s u r é m e n t a u c u n I ta l ien û ^ ^ n ' a p p r o c h e et qui p o r t e n t u n e s i g n a t u r e auss i h u m b l e (pie m o d e s t e (fig. 6), ^ (iue n o u s t r a d u i r o n s a insi : K J q Z

« Sachez t o u s que c 'es t Jehan le F r a n ç a i s qui a pe in t ces m u r a i l l e s . — D e m a n d e z à Dieu qu' i l lui p e r m e t t e de vivre à B r u n s w i c k , J ean W a l e Pe t e r . — Si j e sava is auss i b ien d o n n e r la vie aux c o r p s que je sa is les ^ ^ d e s s i n e r , j e m é r i t e r a i s à | | i | b o n d r o i t de m 'asseo i r à Où (J coté de s d i e u x ».

J e li a η l e F r a n ç a i s v ivai t ve r s 1145. C'est t ou t

M O R l M T b O Î · · O H - ô ό

Я 0 G T T L L I C 9 · 1 5 Т Д · · ^ t

P E T l S H l C p l ^ . ^ T ' V l V F R e * g *

^RV/VSVX/ΚΓ ΙΟΚΆΛ/ W A L 6 ^ ~?ET£R. £ ]cd

4l> Dû Ш

j Ο Ι ρ Α Ί ν î \ / E S · ~ Ρ ϊ λ Τ · £ VCT) V? ce q u e n o u s s avons de lui . ^ _ „ , , . „ г-Г/. . t . VD Mais n 'es t - i l pa s a b s o l u -m e n t s u r p r e n a n t de décou-vrir a ins i , a p r è s sept cen t c i n q u a n t e a n s d 'oubl i , un n o m , p o u r t a n t b ien vis ible , * О d e v a n t l e q u e l t a n t de g é n é - 1 - 1 0 · 6 · i-L R A T I O N S O N T P A S S É S A N S S I G N A T U R E DE J E A N LE F R A N Ç A I S '

J A M A I S S O N G E R À LE LIRE. S U I ( U N E F R E S Q U E DE L ' É G L I S E S A I N T - B L A I S E ^ .

BIENHEUREUX QU'ON NE LE A B R U N S W I C K . ^

nie p a s ! C 'es t a s s u r é m e n t V/) ^ le p l u s v i eux p r i m i t i f 2 f r a n ç a i s d o n t on ai t jusqu ' i c i re levé la s i g n a t u r e . ^

Il e s t d ' a u t r e s œ u v r e s , p lus a n c i e n n e s e n c o r e , d e s c u l p t u r e p a r e x e m p l e , où n o u s p o u v o n s r e t rouve r le « r e g a r d h e u r e u x ». C 'es t d ' a b o r d la V i e r g e de P o m m i e r s , que pub l i a i t d e r n i è r e m e n t M. de L a s t e y r i e d a n s les Monuments Piot. e t (pie voici (fig. 7). El le était a u - d e s s u s de la p o r t e d ' e n t r é e de l ' a n c i e n n e ég l i se de N o t r e - D a m e de P o m m i e r s , q u a n d Millin la découvr i t en 1808.

1. Quoique aucun nom ne soit inscrit sur le tombeau, il ne saurait, je pense, être possible d'ad-mettre là aucune confusion. Un seul évèque de Lisieux fut enterré à Saint-Pierre pendant le xir siècle. La Gallia nous apprend que Foucher (1101 -j- 1106) mourut à Rome; que Jehan 1er mourut en 1140 à Lisieux, et fut enterré à Saint-Pierre, dans le transept nord, où se trouve d'ailleurs le tombeau dont nous parlons, qu'Arnoul enlin (1140 f 1180) mourut à Saint-Victor de Paris où il fut enterré.

2. Il s'agit ici d'un peintre; on ne saurait donc centester le terme de primitif dont je me sers.

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72 LA R E V U E DE L ' A R T

En 1840, le m a r q u i s de Cas t e l l ane 1 r e p r o d u i s a i t l ' i n sc r ip t ion de la base : In gremio matris residet sapientia patris.

On l ' ava i t p e r d u e de vue quand le Congrès archéologique de Nîmes, en 1897 2, nous a p p r i t qu 'e l le é ta i t à Beauca i re . d a n s la Maison de N a r b o n n e , a p p a r t e n a n t à M. Mil-let . Mais a u j o u r d ' h u i la V i e r g e et l ' E n f a n t J é sus on t l eu r s tô tes , — b i en m a u v a i s e s h é l a s ! — a lo r s que le des s in que Revoil en d o n n a i t d a n s son Architecture romane3

n o u s m o n t r e qu ' au mil ieu du siècle de rn i e r les d e u x tê tes b r i s é e s et p e r d u e s n ' a v a i e n t p a s enco re été r e m p l a c é e s . Nous pouvons , p a r e x e m p l e , n o u s f a i r e u n e idée de ce qu 'e l les pouva i en t ê t re , en r a p p r o c h a n t du g r o u p e de P o m m i e r s la V ie rge de Fon t f ro ide ' ' , p r è s N a r b o n n e (Aude), don t , à m o n g r a n d r e g r e t j e n 'ai pu o b t e n i r de p h o t o g r a p h i e . Il fau t se con ten t e r de r e n v o y e r à la p l . LXII de Revoil , où elle es t assez f i dè l emen t r e p r o d u i t e pou r un e x a m e n super f i c ie l . La V i e r g e de P o m m i e r s , M. de L a s t e y r i e cro i t pouvoi r la r e p o r t e r au s e c o n d q u a r t du XIIu s iècle, s a n s se p e r m e t t r e de la viei l l i r d a v a n t a g e , c o m m e le c h a n o i n e D u r a n d c r o y a i t devoi r le fa i re , en l ' a t t r i b u a n t au xie siècle.

Il es t en d e r n i e r l ieu, enf in , u n e a u t r e V ie rge que n o u s a l l o n s t r o u v e r d a n s le Nord , si n o u s vou lons t r a v e r s e r t ou t e la F rance , qui me s e m b l e ê t r e le m o n u m e n t le p l u s s u r p r e n a n t p e u t - ê t r e de t ou t e ce t te é tude . C'est la V i e r g e d i t e de Dom R u p e r t a u j o u r d ' h u i au m u s é e a rchéo lo log ique de Liège, t r è s p o l y c h r o m é e , t rès do rée , qu i se rva i t au t r e fo i s de r e t a b l e à l ' abbaye de S a i n t - L a u r e n t (fig. 8). L ' i n s c r i p t i o n g r a v é e s u r le c a d r e : Porta liée clausa erit, non aperietur et vir non transibit per eam, quoniam Dominus Deus Israël ingressus est per eam, m o n t r e (pie l ' a r t i s t e a r e p r é s e n t é , n o n p r é c i s é m e n t la V i e r g e Marie, ma i s la P o r t e du Ciel, la f e m m e d e s t i n é e à a c c o m p l i r la p r o p h é t i e d 'Ezéch ie l 6 . Pou r r e t r o u v e r la soup les se du m o u v e m e n t m a t e r n e l , l a phys io-n o m i e câ l ine et d o u c e m e n t p ro t ec t r i ce de la Vierge , la f i gu re p o u p i n e et intelligente de l 'En fan t , ne faudra- t - i l pa s f r a n c h i r c e r t a i n e m e n t au m o i n s d e u x s ièc les ? S'il est u n a r t i s t e qu i m é r i t e r é e l l e m e n t le n o m de p r é c u r s e u r de la R e n a i s s a n c e , nu l ne s a u r a i t , je pense , le r e f u s e r à l ' h o m m e qui fit na î t r e , au c o m m e n c e m e n t d u x n e s iècle , sous son c iseau, cet a d m i r a b l e m o r c e a u de scu lp tu re , si p e r s o n n e l , si n o u v e a u , s u r l eque l

1. Mémoires de la Société archéologique du midi de la France (1840), t. IV, p. 294, pl. IV, nos 1 et 2.

2. P. 93. 3. T. III, p. 29, et pl. LXI. 4. Si l'abbaye de Fontfroide fut bien fondée en 1093 (Gauvet, Étude sur Font froide, Montpellier,

Séguin, 1873, in-8°, p. 179), c'est en 1130 qu'une colonie de Cisterciens vint agrandir et augmenter les bâtiments du monastère. La Vierge date très probablement de cette restauration.

5. Voici la légende de la Vierge de Dom Rupert, que je dois à l'amabilité de M. le l)r J. Alexandre, conservateur du Musée archéologique de Liège.

Rupert, originaire de Liège ou des environs, entra fort jeune comme oblat à l'abbaye bénédictine de Saint-Jean de Liège. Ayant l'esprit lourd et borné, mais fort désireux de s'instruire, il priait ardemment devant cette image pour obtenir le don de sapience. Un jour, il vit un rayon de lumière partir de la tête de la Vierge et le frapper au front. A partir de ce moment, son esprit s'ouvrit et il acquit une intelligence merveilleuse des Livres saints et devint un des plus savants théologiens de son temps. Il raconte lui-même ce fait, qui arriva en 1096, dans le XI1° livre de son ouvrage sur saint Matthieu.

Rupert devint abbé de Deutz, près de Cologne, où il mourut le 4 mars 1135. 6. Ézéchiel, XLIV, § 2.

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LA R E N A I S S A N C E ET S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 73

aucun des his tor iens d 'art ne saurait pré tendre t rouver la moindre trace de l ' influence de l ' ant iqui té . Ainsi, voilà reportée de soixante-quinze ans en arr ière , peut-être, les

F I G . 7 . — V L E K G E DE Ρ Ο M M I Ε К S .

l imites de la Renaissance, que M. Venturi avait cru devoir fixer à 1198, avec Rene-dettu Antelami, en Italie; et c'est avec des ar t is tes français , comme Rrunus, de Saint-Gilles (1175), comme Rogerus, de Chartres (1160), comme Joliannes Gallicus, de Rrunswick (1145), comme le maître de Liège (vers 1130), dans la Gaule, que nous

LA BEVUE DE L'ART. — X I . 10

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74 LA R E V U E DE L ' A R T

avons parcouru le chemin, alors que c'est à peine si, au milieu du xne siècle, et encore dans un peti t monument presque d'orfèvrerie, la porte de San Zeno de Vérone, nous t rouvons en Italie le premier sent iment (le ce natural isme qui va régénére r l ' a r t du monde. Je n'ai donc pas à conclure : les documents sont là, ils doivent par ler pour moi.

Je me doute bien cependant des contradict ions que je vais voir su rg i r devant ma thèse : je ne quit terai donc pas la place sans montrer que, peu t -ê t re inconsc iemment — de même qu'ils ont accepté la légende de l 'humilité des pr imi t i fs — les maî t res se sont fort avancés sur la route où je les veux ent ra îner .

C'est en effet une chose t rès bizarre, t rès complexe à expl iquer , que de voir les ν j r ivains .d 'ar t les plus sérieux s ' ingénier, pendant des pages l onguemen t médi tées , à montrer , dans les premières manifestat ions de cette Renaissance i ta l ienne du xiii·' siècle, l'influence française, et conclure, sans paraî t re se dou te r de leur con t ra -diction, à l 'origine essent iel lement italienne de la Renaissance. Cela v ra iment me rappelle la séance du Comité d'archéologie du 8 mars 1844, où les membres , recon-naissant l 'extrême impor tance de la s ignature des ar t is tes du moyen âge, déc idèren t alors de s 'occuper de l 'étude de la musique.

Remontons jusqu 'à Courajod. En 1888, d a n s ses Véritables origines de la Renaissance 1, il avai t exposé sa t héo r i e

nouvelle.

J)onc, imprimait-il, on est arrivé à déclarer que la Renaissance est apparue subitement pour la première fois en Italie au commencement du xv° siècle, et qu'elle est sortie uniquement et spontané-ment délimitation de l'art antique.

Or, l'art d'un Donatello ou d'un Ghiberti n'était pas un point de départ universel, c'était au con-traire un point d'arrivée.

Ainsi, Courajod, avec son érudition, mais avec sa violence qui ne savait pas convaincre, découvrait le passé. A ce moment, par exemple, les documents faisaient défau t ; il n 'avait pour lu t ter que son énergie, que sa bonne foi ; c 'était insuff isant . Personne ne fut convaincu, et Eug. Miintz, toujours si courtois , pa r l an t dans l'Ami des monuments-, de M. Ch. N o r m a n d , des Artistes français du XIVe siècle et de la propa-gande du style gothique en Italie — le xiie n'existait pas encore, — se bornai t , avec une concision un peu dure , à écrire :

Mon travail pourra apporter ^quelques arguments à la thèse brillante, mais peut-être un peu paradoxale, soutenue par M. Courajod dans une récente étude,

et passai t sans insis ter . Pour tan t , peu de temps après, M. S. Reinacli, toujours au couran t des découvertes

nouvelles, é largissai t l 'horizon du champ d' investigations et s 'expr imai t ainsi :

Lorsque la France aura un art original au χπιβ siècle, c'est par l'évolution libre de son génie, et le contact de la Renaissance italienne sera loin, on le sait, de lui proliter 3.

Je ne crois pas que Zimmermann ait connu ce passage de not re savant compa-triote, quand il déclarait (pie cet Antelami de Parme, que tout à l 'heure Ventur i va

t . Gazette des Beaux-Arts,\888, t. 1, p. 21 2. 1888, p. 247. 3. Antiquités nationales, p. 2'i.

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L A R E N A I S S A N C E E T S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 75

p r o c l a m e r le v é r i t a b l e p r é c u r s e u r d e l à R e n a i s s a n c e , a v a i t dù voir Sain t -Gi l les , Sa in t -T r o p h y m e d 'Ar les , C h a r t r e s , ma i s n 'ava i t p a s su c o m p r e n d r e le s ty le g o t h i q u e , t r o p a v a n c é p o u r lu i , quo i q u e son a r t f û t for t en avance su r l a s t a t u a i r e de Toscane .

Il e s t v r a i q u e M. V e n t u r i 1 c o m b a t t r a ce t te o p i n i o n ; ma i s c e p e n d a n t , s'il n ' a d m e t

FI G . 8 . — V IΕ H G Ε DE I ) О -M R υ Ρ Ε H Τ 2 . Musée archéologique <le Liège .

p a s q u ' à p e i n e â g é de v ing t ans (en 1178), An te l ami avai t pu p a r c o u r i r la P rovence , la B o u r g o g n e , le Nord de la F rance , c o m m e l ' avance Z i m m e r m a n , il r e c o n n a î t qu ' i l r e ç u t c e r t a i n e m e n t des leçons des a r t i s t e s p r o v e n ç a u x , d o n t on r e t r o u v e l ' in f luence si

1. T. III, p. 277. 2. Ilelbig, la Sculpture et les arts plastiques au pays de Liège. Bruges, Desclée, 1890, in-4%

p. 24, pl. VI.

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76 LA R E V U E DE L ' A R T

m a n i f e s t e en P i é m o n t et clans le Mont fe r ra t , el que les a r t i s t e s s c u l p t e u r s de P r o v e n c e e t de B o u r g o g n e e u r e n t a ins i une réel le in f luence su r lui .

Qu 'es t -ce à d i re , s inon que l 'ar l f r ança i s , p o u r M. V e n t u r i l u i -même , es t a n t é r i e u r à l ' a r t i ta l ien ?

Mais n o u s avons été t r o p vite. Dans son Histoire de la Renaissance 1 , Eug . Miïntz, à p r o p o s de Nicolà P i s a n o ,

n o u s r appe l l e « (pie la sculpture italienne se montre inférieure à la sculpture française de la même épotpie л.

N ' a v o n s - n o u s p a s vu, au d é b u t de ce t te é tude , I l e lb ig a f f i r m e r qu ' « à la m ê m e époque (aux xn° et х ш е siècles), les a r t i s t e s f r a n ç a i s t a i l l a i en t de s c h e f s - d ' œ u v r e incontestablement supérieurs aux s c u l p t u r e s i t a l i ennes » ?

Pu i s , c 'es t M. E m . Be r t aux , qui, a p r è s avoir cé l éb ré la s c u l p t u r e m o n u m e n t a l e qui r e s s u s c i t e en F r a n c e ve r s l ' an 1100, d a n s l ' I l e - d e - F r a n c e et l ' A u v e r g n e , i m p r i m e d a n s l'Art dans l'Italie méridionale - :

Une autre inlluence du Nord se laisse reconnaître après le siècle des Othon, c'est-à-dire au com-mencement du xiii0 siècle, depuis les Abruzzes jusqu'à la Calabre, c'est l'influence de l'art français.

En 1904, V e n t u r i , enf in , cons ta t e ,

que dans l'admirable cloître de Sant' Orso, qui date de 1133, on peut reconnaître les traces de l'importation de l'art français 3.

Il f au t avoue r que ce n ' e s t encore que de l 'art p u r e m e n t r o m a n , m a i s à la p a g e 92, q u a n d il p a r l e du хш° s iècle, — nous s o m m e s donc au d é b u t de la R e n a i s s a n c e , — il m o n t r e l ' in f i l t ra t ion de l ' a r t f r a n ç a i s en P iémont , en M o n t f e r r a t , en L igu r i e , e t la fus ion [la fusione) du s ty le g o t h i q u e f r a n ç a i s et des f o r m e s i n d i g è n e s .

S o m m e tou te , ce s o n t ces a u t e u r s que M. L a f e n e s t r e r é s u m e d a n s 1 é t u d e b r i l l a n t e (pie je s i g n a l a i s aux p r e m i è r e s p a g e s de mon t ravai l , et je n 'y l is p a s , s a n s u n p l a i s i r v r a i m e n t t r ès in t ense , les l i gnes su ivan tes , éc r i t es pa r le m a î t r e , s u r les d é s e s p o i r s de Paul in de Noie et de Rut i l ius N u m a t i a n u s , au m o m e n t de l ' i nvas ion d e s Gollis d 'Alar ic :

N'est-il pas intéressant de voir l'un d'eux, le chrétien, l'homme de progrès moral, pressentir pour l'art futur l'idéal, d'expression vivante, naturelle, humaine, qui devait plus tard, après huit siècles d'engourdissement ou de tâtonnements, refleurir d'abord, par l'amour de la nature et le besoin de beauté, dans son pays natal, sur cette même terre des Gaules, restée toujours et malgré tout obstiné-ment latine, sous l'apport fécondant des alluvions germaniques et scandinaves.

Pau l in de Noie n a q u i t en :i53, à B o r d e a u x ; il fu t o r d o n n é p r ê t r e en 398; h u i t s iècles p l u s ta rd n o u s p o r t e n t donc a u x env i rons de 1190. M. L a f e n e s t r e s i g n a l e q u e c 'es t à ce moment, dans son pays natal, q u e l ' a r t va d'abord refleurir. Un peu p l u s lo in , il m e n t i o n n e r a enf in q u e

La conception occidentale, celle du premier christianisme, alliance harmonieuse de vérité et de

1. T. 1, p. 492. 2. Paris, Fontemoing, 1904, in-4û, p. 810. 3. T. 111, p. 72.

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LA R E N A I S S A N C E E T S E S O R I G I N E S F R A N Ç A I S E S 77

beauté, de la tradition hellénique et de la sensibilité chrétienne, reparaîtra entiu au XII" et au xiir siècle, chez les sculpteurs en France, chez les peintres en Italie.

J 'avoue alors tout à fait perdre pied, en voyant ces a rguments , auxquels j 'en pour-rais jo indre bien d 'autres — mais il m'a paru suffisant d'en citer quelques uns, — s ' amalgamer , se combiner , pour une conclusion à laquelle on serai t loin de s ' a t t endre : M Les h is tor iens de la Renaissance classique ont depuis longtemps salué en Fré-déric II de I lohenstaufen l'un de ses précurseurs les plus clairvoyants ».

La légende de «l 'humble primitif , qui veut mouri r dans l ' anonymat d 'une gloire commune » me semble avoir fail son temps; en m 'a t taquant aujourd 'hui à la légende de l 'or igine i tal ienne de la Renaissance, je ne me sens pas moins soutenu par l 'am-biance de véri té que m'apportent tant de documents si nouveaux. Aussi, Dieu aidant, avec l 'appui de mes confrères, je ne désespère [tas de r endre enfin à la France le r a n g auquel elle a droit dans l 'histoire de l 'art, et que de bons Français , les mieux in ten t ionnés cependant , se sont en quelque sorte appliqués jusqu'ici à lui enlever eux-mêmes , de leurs propres mains.

F. D E M É L Y

Fig. 9. C H A P I T E A U DE S A I N T - S E R N I N DE T O U L O U S E .

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B I B L I O G R A P H I E

Le Peintre-Graveur ital ien, p a r A. de VESME, o u v r a g e f a i s a n t su i t e au Peintre-Graveur de Bar tsc l i . — Milan, Ulr ico I loepli , 1906, 1 vol. in-4°.

On sai t q u ' A d a m B a r t s c h m o u r u t s a n s avoir achevé son o u v r a g e m o n u m e n t a l : le Peintre-Graveur. P o u r les a r t i s t e s f r ança i s , son c a t a l o g u e ava i t é té c o m p l é t é p a r R o b e r t - D u m e s n i l , de Baud i cou r t , E. Rocher , etc. ; p o u r les A l l e m a n d s , p a r A n d r e s e n , L e h r s , A u m u l l e r , e t c . ; p o u r les F l a m a n d s e( les Ho l l anda i s , p a r V . d e r Kel len , e tc . E n Ilal ie, de b o n s t r a v a u x ava i en t élé c o n s a c r é s aux a r t i s t e s d e s xv c e t xvie s ièc les : les m a î t r e s d e s xvn e et xv in e r e s t a i en t encore mal c o n n u s . P a r m i eux , c e p e n d a n t , que d ' a r t i s t e s o r i g i n a u x et s u p é r i e u r s ! Michel-Ange de Ca ravage , E t i e n n e de la Belle, .T.-A. P iazze t ta , les d e u x ï i e p o l o , Cana le t to et son neveu Belo t to ! M. de V e s m e , d i r e c t e u r de la P i n a c o t h è q u e roya le de T u r i n , a voulu c o m b l e r ce l l e l a c u n e . Il l 'a f a i t avec u n soin et une p réc i s ion qui a t t e s t en t de l o n g u e s a n n é e s de r e c h e r c h e s d a n s t o u s les d é p ô t s c l c a b i n e t s d 'Europe . L 'œuvre de so ixan te g r a v e u r s , p r e s q u e t o u s p e i n t r e s , a pu ê t r e a insi r e s t i t u é et ca ta logué . Ch aq u e p ièce e s t déc r i t e , avec u n e consc i ence m i n u t i e u s e , en ses m o i n d r e s dé ta i l s . Ch aq u e c a t a l o g u e e s t p r é c é d é d ' u n e not ice , en g é n é r a l succ inc te , p lus é t endue q u a n d il f au t , t o u j o u r s s u b s t a n t i e l l e e l c la i re , d ' u n e é r u d i t i o n aus s i sû re que d i sc rè te . Telle, p a r e x e m p l e , cel le de S t e f a n o dé l i a Relia, d o n t le c a t a logue occupe un bon t iers du g r o s v o l u m e . M. de V e s m e éc r i t en f r a n ç a i s . N o u s ne n o u s en p l a i g n o n s pas , non p lu s que n o u s ne n o u s p l a i n d r o n s de voi r M. Hoepl i , à Milan, c o m m e ses c o n f r è r e s de F lo rence , Ven i se , B e r g a m e , éd i t e r d ' a u t r e s b e a u x l ivres su r l ' a r t i t a l ien en n o t r e l angue . Le f o r m a t c o m m o d e , l ' i m p r e s -s ion ne t t e e t so ignée , l ' a spec t à la fois sé r i eux et é l é g a n t du Peintre-Graveur italien, en fon t un l ivre aussi a g r é a b l e à r e g a r d e r et facile à m a n i e r qu 'u t i l e à c o n s u l t e r .

G E O R G E S L A F E N E S T R E .

Storia dell' arte italiana, p a r VENTURI, t. IV. — Milan. I loepl i , 1906, in-8".

Le p r e m i e r vo lume de l ' ouv rage de M. Ven tu r i da te de 1901, le q u a t r i è m e p a r a i t en 1906. Au d é b u t , l ' a u t e u r a n n o n ç a i t que le s ix ième et d e r n i e r v o l u m e se ra i t p u b l i é en 1903 et qu ' i l c o m p r e n d r a i t l 'h i s to i re de l ' a r t i ta l ien, du x v n e s iècle à l ' é p o q u e c o n -t e m p o r a i n e . N o u s s o m m e s , on le voit , loin de compte , p u i s q u e le v o l u m e qu i n o u s e s t o f fe r t a u j o u r d ' h u i ne t r a i t e q u e de la s c u l p t u r e i t a l i enne du xive s ièc le et de ses o r i -g ines . Mais n o u s a u r i o n s m a u v a i s e g râce à t rop ch i cane r l ' a u t e u r , qu i , d a n s u n avis a u x l ec teu r s , exp l i que c o m m e n t il a é la rg i son p r e m i e r p r o g r a m m e . R e m e r c i o n s - l e

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B I B L I O G R A P H I E 79

p l u t ô t de l ' ac t iv i té é t o n n a n t e avec laquel le il p o u r s u i t sa t âche , et de ce t r é s o r de d o c u m e n t s et d ' i l l u s t r a t i o n s qu' i l met à n o t r e d i spos i t i on . M. V e n t u r i a ime les œ u v r e s d o n t il p a r l e , il les a vues et revues , il a lu t ous les t r a v a u x qui s 'y r a p p o r t e n t , il les d éc r i t d ' u n s ty le a isé , é l égan t , pa r fo i s un peu t rop fleuri ; son é r u d i t i o n es t c o u r t o i s e et a g r é a b l e .

A-t - i l d i t t ou t ce qu ' i l y avai t à d i r e ? Lu i -même , avec sa b o n n e g r â c e h a b i t u e l l e , ne v o u d r a i t p a s l ' a f f i rmer . Pa r fo i s on souha i t e r a i t (pie l ' a n a l y s e t e c h n i q u e et p r éc i s e d e s œ u v r e s t î n t chez lui p lu s de place. D a n s les d e r n i e r s n u m é r o s de la Revue. Mlle Lou i se P i l l ion a m o n t r é , avec beaucoup de j u s t e s s e et u n e c o n n a i s s a n c e t r è s pe r son -ne l le de la s c u l p t u r e d u moyen âge, que M. V e n t u r i , d a n s la f o r m a t i o n de la s c u l p t u r e i t a l i enne , n ' ava i t p a s t enu un compte suf f i san t de l ' i n f luence de la s c u l p t u r e f r a n ç a i s e . Avan t el le d é j à , le s a v a n t a u t e u r de la Sculpture florentine, M. Marcel R e y m o n d , avai t s i gna l é l ' i m p o r t a n c e de ce l te inf luence . On s ' é t o n n e q u e ce p r o b l è m e n ' a i t p o i n t p r é o c c u p é M. V e n t u r i . M. En l a r t , en 1894, d a n s ses Origines françaises de l'architecture gothique en Italie, s ' é ta i t a t t aché à é tud ie r ce t te p é n é t r a t i o n de l ' a r t s e p t e n t r i o n a l , en ce qu i c o n c e r n e les édif ices ; il y avait lieu d ' i n s t i t u e r u n e e n q u ê t e a n a l o g u e en ce qui c o n c e r n e la s c u l p t u r e . A vrai d i re , cet te nouve l l e e n q u ê t e es t p l u s difficile e t p l u s o b s c u r e , l e s d o c u m e n t s éc r i t s fon t dé fau t j u squ ' i c i ; on r e g r e t t e c e p e n d a n t que M. V e n t u r i ne s 'y soit po in t essayé . A m e s u r e qu 'on é t u d i e r a de p l u s p r è s l ' a r t i ta l ien du xiiic s ièc le et du xive siècle, et non s e u l e m e n t l ' a r c h i t e c t u r e et la s c u l p t u r e , ma i s les œ u v r e s de p e i n t r e s c o m m e Giotto, ce t te ac t ion de l ' a r t s e p t e n t r i o n a l a p p a r a î t r a avec p l u s d ' év idence .

A p r o p o s de J ean de Pise su r tou t , j ' au r a i s d é s i r é (pie M. V e n t u r i y i n s i s t â t : nu l p l u s q u e ce t a r t i s t e si é n e r g i q u e n ' e s t a p p a r e n t é a u x s c u l p t e u r s f r a n ç a i s du х ш е s iècle . Mais M. V e n t u r i , qu i a p a s s é en r evue t ou t e s ses œ u v r e s , a r r i vé au b u t de ce t t e é t u d e , n'a c o n s a c r é (pie q u e l q u e s l i gnes à appréc i e r d a n s son e n s e m b l e ce t a l en t si o r i g ina l . E n c o r e l 'a - t - i l fa i t , à m o n avis, en t e r m e s t r o p l i t t é r a i r e s e t t r o p p o é t i q u e s .

Mais je ne v e u x po in t i n s i s t e r su r ces c r i t i ques , qui p r o u v e n t s e u l e m e n t c o m b i e n on r e g r e t t e (pie M. V e n t u r i , qui di t t a n t de choses et qui les d i t avec t a n t de c h a r m e , n 'a i t p a s t o u t d i t . A v a n t tou t , il f au t lui ê t re r e c o n n a i s s a n t du l a b e u r avec l eque l il a c o m p o s é ce t a b l e a u d ' e n s e m b l e si r iche et si i n s t ruc t i f .

C H A R L E S B A Y E T .

F r e n c h p o t t e r y a n d po rce l a in . by Henr i F R A N T Z . — L o n d o n , G. N e w n e s , 1 9 0 5 ,

in-8° .

L ' é l é g a n t e col lec t ion d ' a r t app l iqué pub l i ée p a r la l i b r a i r i e N e w n e s c o m p t e de t r è s i n t é r e s s a n t s o u v r a g e s sur les p o r c e l a i n e s et f a ï ences h o l l a n d a i s e s , s u r le m o b i -lier a n g l a i s , s u r la b r o d e r i e ang la i se , etc. , et l ' a r t f r a n ç a i s , qu i es t dé jà r e p r é s e n t é d a n s ce t t e sé r i e p a r le l ivre de M. A. Sagl io su r le mobi l i e r , v i en t de se voi r l ' ob je t d ' u n e nouve l l e é t u d e due à M. II. F ran tz .

L ' a u t e u r ava i t à s ' occuper d 'un a r t si va s t e et si c a p t i v a n t , si f écond en be l les œ u v r e s , si r e c h e r c h é auss i à l ' heure ac tue l le , qu' i l n ' a eu q u e l ' e m b a r r a s d u choix p o u r ses i l l u s t r a t i o n s , et que l ' ennu i d u t ê t r e d 'avoi r à « f a i r e c o u r t » p o u r ses no t i ce s : c o m m e n ç a n t avec le xvie siècle, M. F r a n t z p a r l e d ' a b o r d de B e r n a r d Pa l i s sy

Page 20: New LA RENAISSANCE · 2014. 2. 21. · la Revue critique, va fournir à ma thèse, peut-être très audacieuse et dont je ne me dissimule pas les dangers la base primordiale. Dans

80 LA R E V U E DE L ' A R T

et de s f a ï ence r i e s de Neve r s , de Rouen , de Moust iers , de Marsei l le et d ' A l s a c e - L o r r a i n e : et , a v a n t de c o n s a c r e r de c o u r t e s no t e s aux m a n u f a c t u r e s f r a n ç a i s e s de p o r c e l a i n e s : R o u e n , Sa in t -Cloud , e tc . . il s ' a r r ê t e p e n d a n t tout un c h a p i t r e s u r la m a n u f a c t u r e de Sèvres .

Des i l l u s t r a t i o n s en no i r et en cou leurs , la r e p r o d u c t i o n des p lus c é l è b r e s m a r q u e s , une l is te d e s p r i n c i p a u x p r i x o b t e n u s en vente p u b l i q u e d e p u i s 1882. une b ib l i og ra -phie enf in , c o m p l è t e n t la d o c u m e n t a t i o n de ce vade-mecum d e s a m a t e u r s de f a ï ences et de p o r c e l a i n e s f r a n ç a i s e s . R. G.

Le Musée des Arts décoratifs . Le Bois , p a r Louis M E T M A N et Gas ton B R I È R E ,

2e pa r t i e . — Pa r i s , O.-A. L o n g u e t , 190(i, in-fol .

Nous a v o n s a n n o n c é , il y a que lques mois , l ' appar i t ion du p r e m i e r a l b u m d e ces do-c u m e n t s don t voici a u j o u r d ' h u i la sui te et la fin : p o u r les xvn e e t x v i n e s iècles , c o m m e p o u r le m o y e n âge et la Rena i s sance , les co l lec t ions de bo i s s c u l p t é s du m u s é e des Ar t s d é c o r a t i f s son! d ' u n e r i chesse e t d ' u n e var ié té i n c o m p a r a b l e s , et c 'est un se rv ice vé r i t ab l e r e n d u à tous ceux qui v o u d r o n t « c o n s u l t e r » ces co l l ec t i ons que de f o r m e r à l eu r i n t e n t i o n de s e m b l a b l e s recuei ls , où p lus d 'un demi -mi l l i e r d e d o c u m e n t s s o n t r é p a r t i s s u r u n e c e n t a i n e de p lanches , et a c c o m p a g n é s de n o t i c e s b i b l i o g r a p h i q u e s et de sc r i p t i ve s don t il est super f lu de d i re la sû re exac t i t ude , p u i s q u ' e l l e s s o n t d u e s à M. Metman, c o n s e r v a t e u r du musée des Ar t s déco ra t i f s e t à M. H ri è re , a t t a c h é au m u s é e de Ver sa i l l e s . E. D.

L I V R E S N O U V E A U X

— Les Lithographies de Fantin-Latour, ca-t a logue de l ' œ u v r e l i t h o g r a p h i e du maî t re , p a r G e r m a i n I I É D I A R D . complé t é et p ré -cédé d ' u n e no t ice p a r Léonce B É N É D I T E .

— Par i s , L ib r a i r i e de l ' a r t anc ien e( mo-de rne , in-'i°, 12 f r .

— Pas freiburger Miinster, von F . K E M P F

und K . S C H U S T E R . — F r e i b u r g im Bre i sgau , H e r d e r s c h e V e r l a g s h a n d l u n g , in-12, lig.. 3 m a r k s .

— I.cs Villes d'art célèbres. Pompéï. I. Histoire, vie privée. II. fie publique, p a r Henry T H É D E N A T . Nancy, p a r A n d r é I I A L -

L A Y S . — P a r i s , L a u r e n s , 3 vol. g r . i n - 8 ° ,

4 fr. l 'un , fig. — Sésame et les lys. L)es trésors des rois.

J)es jardins des reines, p a r J o h n R U S K I N .

T r a d u c t i o n et no t e s p a r Marcel Pnoi ST. — Par i s , Mercu re de F r a n c e , in-18, 3 f r . 50.

— Manet graveur et lithographe, p a r E t i enne M O R E A I - N É L A T O N . — P a r i s , L. Delteil , in-4°, lig. e t p l . , 40 f r .

— Dictionnaire des seul pleurs de l'école française sous le règne de Louis XIV, p a r S t an i s l a s L A M I . — P a r i s , I I . C h a m p i o n , g r . in-8°.

— Ein Jahrundert deutscher Kunst, h e -r a u s g e g e b e n von H u g o von T S C H U D I . I . —

Miinchen, F. B r i i c k m a n n , in-fol . , f ig . et pl.. 20 m a r k s .

— Musée royal des beaux-arts, à Anvers. Catalogue descriptif. I. Maîtres anciens. I I . Maîtres modernes, p a r Pol de· M O N T .

T r a d u i t du n é e r l a n d a i s p a r E. van BLÀ-DEL. — Anvers , J . B o u c h e r y , 2 vol . in-lG.

— Jean de Bologne, p a r P i e r r e de Boi;-C H A U D . — Par i s , L e m e r r e , in-12, 3 f r . 50.

Le gérant : H . D E N I S .

P A R I S . — I M P R I M E R I E G E O R G E S P E T I T , 1 2 , R U E G О D О Т - D E - M AU R О I .