ΕΔΑΔ: SHYTI ΚΑΤΑ ΕΛΛΑΔΑΣ

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    PREMIRE SECTION

    AFFAIRE SHYTI c. GRCE

    (Requte no 65911/09)

    ARRT

    STRASBOURG

    17 octobre 2013

    Cet arrt deviendra dfinitif dans les conditions dfinies larticle 44 2 de la

    Convention. Il peut subir des retouches de forme.

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    ARRT SHYTI c. GRCE 1

    En laffaire Shyti c. Grce,La Cour europenne des droits de lhomme (premire section), sigeant

    en une chambre compose de :Isabelle Berro-Lefvre, prsidente,Khanlar Hajiyev,Mirjana Lazarova Trajkovska,Linos-Alexandre Sicilianos,Erik Mse,Ksenija Turkovi,Dmitry Dedov, juges,

    et de Andr Wampach,greffieradjoint de section,Aprs en avoir dlibr en chambre du conseil le 24 septembre 2013,Rend larrt que voici, adopt cette date :

    PROCDURE

    1. A lorigine de laffaire se trouve une requte (no 65911/09) dirigecontre la Rpublique hellnique et dont un ressortissant albanais, M. PetritShyti ( le requrant ), a saisi la Cour le 25 novembre 2009 en vertu delarticle 34 de la Convention de sauvegarde des droits de lhomme et desliberts fondamentales ( la Convention ).

    2. Le requrant a t reprsent par Me V. Vassiliadis, avocat au barreau

    de Thessalonique. Le gouvernement grec ( le Gouvernement ) a treprsent par les dlgues de son agent, Mme F. Dedoussi, assesseureauprs du Conseil juridique de lEtat, et Mme G. Kopa, auditrice auprs duConseil juridique de lEtat. Inform de son droit de prendre part la

    procdure (articles 36 1 de la Convention et 44 1 du rglement), legouvernement albanais na pas rpondu.

    3. Le requrant allgue en particulier une violation des articles 3 et 5 4de la Convention.

    4. Le 6 avril 2011, la requte a t communique au Gouvernement.Comme le permet larticle 29 1 de la Convention, il a en outre t dcidque la chambre se prononcerait en mme temps sur la recevabilit et le fond.

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    EN FAIT

    I. LES CIRCONSTANCES DE LESPCE

    A. La mise en dtention provisoire du requrant et le recours contrecelle-ci

    5. Le requrant est n en 1983. Le 10 fvrier 2009, il fut arrt pourtrafic de produits stupfiants (cocane). Le 11 fvrier 2009, le procureur prsle tribunal correctionnel de Thessalonique engagea des poursuites pnalescontre le requrant pour trafic de produits stupfiants et possession de fauxdocuments de transport.

    6. Le 13 fvrier 2009, la juge dinstruction, avec laccord du procureurprs le tribunal correctionnel de Thessalonique, ordonna sa mise endtention provisoire. La juge dinstruction admit que de forts indices deculpabilit rsultaient de linstruction de laffaire. Eu gard la spcificitde lacte incrimin et, en particulier, la quantit de cocane et les sommesdargent trouves en possession de laccus, la rcidive [tait] considrefortement probable dans le cas o [le requrant] serait remis en libert. De

    plus, il [tait] susceptible de fuir, puisquil [tait] ressortissant tranger et[navait] pas de rsidence permanente en Grce (mandat no 13/2009). Le

    jour mme, le requrant fut mis en dtention provisoire dans les locaux de laDirection de la police de Thessalonique.

    7. Le 18 fvrier 2009, le requrant saisit la chambre d accusation dutribunal correctionnel de Thessalonique dun recours contre le mandatno 13/2009, assorti dune demande de leve ou de substitution de ladtention provisoire par des mesures plus souples. Le requrant soulevaitnotamment que lors de sa mise en examen par les organes d instruction, le10 fvrier 2009, il ny avait pas de traducteur et, par consquent, navait pucomprendre les questions poses par les policiers. De plus, il demanda sacomparution personnelle devant la chambre daccusation du tribunalcorrectionnel de Thessalonique.

    8. Le 26 mai 2009, la chambre daccusation du tribunal correctionnel deThessalonique rejeta son recours. Ladite juridiction releva que, comme ilressortait du dossier de laffaire, le requrant matrisait suffisamment lalangue grecque pour comprendre les questions poses lors de sa mise enexamen le 10 fvrier 2009. En outre, la chambre daccusation jugea que siltait remis en libert, le requrant pourrait rcidiver. Enfin, sa demande decomparution en personne fut aussi rejete au motif que la lgislation

    pertinente ne prvoyait pas ce droit (dcision no 563/2009).9. Le 3 mars 2010, la cour dassises de Thessalonique condamna le

    requrant douze ans et trois mois de rclusion des chefs d accusationsprcites (arrt no 562/2010). Il ressort du dossier que le requrant purgeactuellement la peine impose par la juridiction en question.

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    B. Les conditions de la dtention provisoire

    10. Le requrant fut dtenu dans les locaux de la Direction de la policede Thessalonique. Il allgue que sa cellule ntait pas suffisamment are etensoleille. De plus, lair tait ftide et il y rgnait une odeur nausabonde.

    11. Le requrant affirme quen raison de labsence de cour intrieure, lapromenade tait impossible. Il relve que les toilettes et la douche taientinsalubres et constituaient des sources dinfections. Il note labsence de

    produits ncessaires lhygine quotidienne, tel que le papier toilette. Ilindique labsence de restauration des dtenus par le service pnitentiaire etaffirme que chacun deux avait uniquement droit 5,87 euros par jour pourcommander et se faire livrer des repas de lextrieur. La somme de5,87 euros ne pouvait leur garantir trois repas par jour ni du point de vue de

    la qualit ni de celui de la quantit.12. Enfin, le requrant relve le manque de suivi mdical des personnes

    qui, comme lui-mme, prsentaient des syndromes de sevrage. En outre, ildnonce le fait quil tait mis en dtention avec dautres personnes quisouffraient de maladies transmissibles, comme le SIDA et lhpatite C.

    13. Le 20 mai 2009, le requrant fut transfr la maison darrt deDiavates de Thessalonique.

    II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

    14. Larticle 572 du code de procdure pnale est ainsi libell :

    1. Le procureur prs le tribunal correctionnel du lieu o la peine est purge,exerce les comptences prvues par le code [de procdure pnale] concernant letraitement des dtenus et contrle lexcution des peines et lapplication des mesuresde scurit, conformment aux dispositions du prsent code, du code pnal et des loisy affrentes.

    2. En vue dexercer les fonctions susmentionnes, le procureur prs le tribunalcorrectionnel visite la prison au moins une fois par semaine. Lors de ces visites, ilentend les dtenus qui ont pralablement sollicit une audition.

    (...)

    15. Les dispositions pertinentes en lespce du code pnitentiaire

    (loi no

    2776/1999) se lisent ainsi :

    Article 6

    1. Le dtenus ont le droit de sadresser par crit et dans un dlai raisonnable auConseil de la prison, en cas dactes ou dordres illgaux pris leur encontre et si lesdispositions du prsent code ne prvoient pas dautre recours. Dans les quinze jourssuivant la notification dune dcision de rejet ou un mois aprs le dpt de lademande, si ladministration a omis de prendre une dcision, les dtenus ont le droitde saisir le tribunal comptent de lexcution des peines. Si le tribunal fait droit aurecours, il ordonne les mesures susceptibles de pallier lacte ou lordre illgal (...)

    Article 86

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    (...)

    2. Chaque tribunal de lexcution des peines est comptent pour les affaires

    concernant les dtenus dans sa juridiction (...) 16. Il ressort de la jurisprudence que tant la demande devant le conseil

    de la prison que lappel devant le tribunal dexcution des peines peuventporter sur les conditions dincarcration dans ltablissement pnitentiaire,telles que, titre dexemple, la surface de la cellule, le caractre adquat dessystmes daration et de chauffage et les modalits de communication delintress avec des tierces personnes (voir, parmi dautres, les dcisionsnos 2075/2002 et 175/2003 de la chambre daccusation du tribunalcorrectionnel du Pire).

    17. Les dispositions pertinentes en lespce de larrt ministriel

    n

    o

    58819/ 2003, du 7 avril 2003, se lisent ainsi :Article 6

    1. Le contrle de lgalit sur lexcution des peines privatives de libert (...) estexerc par le procureur-superviseur comptent.

    2. Ce contrle comprend (...) b) la garantie dun juste traitement et de la protectionjudiciaire pour lensemble des dtenus et c) linformation des autorits judiciaires etadministratives comptentes sur le contenu des auditions ou des rapports de dtenusou de membres du personnel pnitentiaire qui font apparatre des indices que des actesrprhensibles ou des infractions disciplinaires ont t commis par ceux-ci .

    Article 7

    1. Dans le cadre de la supervision, le procureur collabore avec le directeur et leschefs hirarchiques des diffrents secteurs de ltablissement pnitentiaire et fait desrecommandations sur des questions qui concernent lexcution des peines.

    2. Le procureur-superviseur ou son adjoint exercent des comptencesjuridictionnelles, disciplinaires et de contrle.

    En particulier, le procureur :

    1. Veille lapplication des dispositions en vigueur concernant le traitement desdtenus ainsi que de celles du code pnal et des lois spciales relatives l excutiondes peines et lapplication des mesures de sret. (...)

    9. Entend les dtenus, leurs proches et les avocats des premiers, leur demande.

    (...)10. Examine les questions de protection juridictionnelle des dtenus en indiquant

    aux intresss les dmarches suivre et fait suivre aux autorits comptentes lesdemandes daide juridictionnelle des dtenus (...)

    Article 25

    Afin dassurer le bon fonctionnement de ltablissement pnitentiaire, les jours etheures daudition des dtenus sont fixs comme suit :

    a. Le procureur-superviseur auditionne des dtenus pendant au moins deux heuresune fois par semaine afin de garantir leur traitement quitable et leur protection

    judiciaire.

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    b. Le directeur auditionne les dtenus, si besoin, pour des questions qui relvent desa comptence.

    Article 32

    En sus des droits mentionns larticle prcdent, lexercice par les dtenus deleurs droits est facilit par ladoption de mesures qui visent rduire les effets ngatifsde lexcution des peines privatives de libert. En particulier les dtenus peuvent :

    (...) 3. se procurer auprs de la direction de la maison pnitentiaire tout produitncessaire leur hygine et propret personnelles ainsi que les vtementsncessaires.

    Article 37

    (...)

    10. Le directeur de ltablissement pnitentiaire prend les mesures ncessaires pourrduire les consquences ngatives rsultant de lexcution des peines et des mesuresprivatives de libert.

    EN DROIT

    I. SUR LA VIOLATION ALLGUE DE LARTICLE 3 DE LACONVENTION

    18. Le requrant allgue que les conditions de dtention au sein de laDirection de la police de Thessalonique taient contraires larticle 3 de laConvention, disposition ainsi libelle :

    Nul ne peut tre soumis la torture ni des peines ou traitements inhumains oudgradants.

    Sur la recevabilit

    19. Le Gouvernement affirme que le requrant na pas puis les voiesde recours internes. Il soutient quil avait le droit de se plaindre de sasituation auprs du chef de la police et, selon larticle 572 du code de

    procdure pnale, auprs du procureur comptent. Or, selon leGouvernement, le requrant na port daucun moyen son grief relatif auxconditions de sa dtention la connaissance des autorits internes.

    20. En faisant rfrence larrt Siasios et autres c. Grce (no 30303/07,4 juin 2009), le requrant allgue que les voies de recours invoques par leGouvernement ntaient pas effectives. Il ajoute qu travers la saisine de lachambre daccusation du tribunal correctionnel de Thessalonique, il visait sa remise en libert, ce qui aurait mis fin sa dtention provisoire dans desconditions contraires larticle 3 de la Convention.

    21. La Cour rappelle que le fondement de la rgle de lpuisement desvoies de recours internes nonce dans larticle 35 1 de la Convention

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    consiste en ce quavant de saisir un tribunal international, le requrant doitavoir donn lEtat responsable la facult de remdier aux violations

    allgues par des moyens internes, en utilisant les ressources judiciairesoffertes par la lgislation nationale, pourvu quelles se rvlent efficaces etsuffisantes (voir, entre autres, Fressoz et Roire c. France [GC],no 29183/95, 37, CEDH 1999I). Cette rgle se fonde sur lhypothse,objet de larticle 13 de la Convention avec lequel elle prsente dtroitesaffinits , que lordre interne offre un recours effectif quant la violationallgue (Kuda c. Pologne [GC], no 30210/96, 152, CEDH 2000-XI).Larticle 35 1 de la Convention ne prescrit l puisement que des recours la fois relatifs aux violations incrimines, disponibles et adquats. Ilsdoivent exister un degr suffisant de certitude non seulement en thoriemais aussi en pratique, sans quoi leur manquent l effectivit et

    laccessibilit voulues ; il incombe lEtat dfendeur de dmontrer que cesexigences se trouvent runies (voir, parmi beaucoup dautres, Daliac. France, 19 fvrier 1998, 38,Recueil des arrts et dcisions 1998-I).

    22. En ce qui concerne le cas despce, la Cour note, demble, que lesdolances du requrant portent de manire gnrale sur les conditions dedtention dans les locaux de la Direction de la police de Thessalonique etque les conditions dnonces sapparentaient un phnomne structurel quine concernait pas exclusivement son cas particulier (voir en ce sens,Nisiotisc. Grce, no 34704/08, 29, 10 fvrier 2011, et Bygylashvili c. Grce,no 58164/10, 47, 25 septembre 2012).

    23. En outre, en ce qui concerne tout particulirement la saisine du chefhirarchique de la police, la Cour a dj conclu quelle ne peut pas treconsidre comme une voie de recours effective au sens de larticle 35 1de la Convention (voirA.A. c. Grce, no 12186/08, 45-46, 22 juillet2010 ; Rahimi c. Grce, no 8687/08, 77, 5 avril 2011 ; R.U. c. Grce,no 2237/08, 59, 7 juin 2011 ; Efremidze c. Grce, no 33225/08, 28,21 juin 2011). Dans les arrts prcits, la Cour a soulign le manque declart concernant la procdure selon laquelle le chef de la police pourraittre saisi et le type de plaintes qui peuvent lui tre soumises. Par ailleurs,elle a exprim des rserves quant limpartialit et lobjectivit de celui-ci,ce qui pouvait compromettre lefficacit dudit recours. Au vu de ce qui

    prcde, la Cour considre que le requrant ne disposait pas d

    un recourseffectif au travers duquel il aurait pu se plaindre de ses conditions dedtention. Force est donc la Cour de rejeter lexception du Gouvernementtire du non-puisement des voies de recours internes visant les conditionsde sa dtention.

    24. En outre, la Cour rappelle quen vertu de larticle 35 1 de laConvention, elle ne peut tre saisie dune affaire que dans un dlai de sixmois partir de la date de la dcision interne dfinitive . En loccurrence,la Cour relve que le grief du requrant sous l angle de larticle 3 neconcerne que ses conditions de dtention dans les locaux de la Direction de

    police de Thessalonique. Etant donn quil nexiste pas de recours effectif

    cet gard, la dtention du requrant dans ce lieu sest acheve le 20 mai

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    2009, date laquelle il a t transfr la maison darrt de Diavates deThessalonique. Or, la prsente requte a t introduite le 25 novembre 2009,

    savoir plus de six mois aprs la date de transfert du requrant la maisondarrt de Diavates.

    25. Le fait que le Gouvernement nait pas soumis dobservations cesujet nest pas susceptible de modifier la situation. La Cour rappelle en effetque cette rgle, qui reflte le souhait des Parties contractantes de ne pas voirremettre en cause des dcisions anciennes aprs un dlai indfini, sert lesintrts non seulement du Gouvernement mais aussi de la scurit juridiqueen tant que valeur intrinsque. Elle marque la limite temporelle du contrleeffectu par la Cour et indique aux particuliers comme aux autorits la

    priode au-del de laquelle ce contrle ne sexerce plus. La Cour na doncpas la possibilit de ne pas appliquer la rgle de six mois au seul motif

    quun Gouvernement na pas formul dexception fonde sur elle (voirBelaousof et autres c. Grce, no 66296/01, 38, 27 mai 2004).

    26. Au vu de ce qui prcde, le grief tir de larticle 3 de la Conventionest tardif et doit tre rejet en application de larticle 35 1 et 4 de laConvention.

    II. SUR LES VIOLATIONS ALLGUES DE LARTICLE 5 4 DE LACONVENTION

    27. Le requrant soutient, deux gards, que la procdure au travers de

    laquelle il a tent de contester la lgalit de sa mise en dtention provisoirentait pas conforme aux exigences de la Convention. En particulier, il seplaint dune violation du principe de lgalit des armes devant la chambredaccusation du tribunal correctionnel de Thessalonique lors de lexamen desa mise en dtention provisoire, qui rsulterait du refus de l autoriser dycomparatre en personne alors que le procureur, lui, a t entendu. En outre,il estime que le bref dlai na pas t respect loccasion de lexamende sa demande de mise en libert. Il invoque les articles 5 4 et 6 1 de laConvention. La Cour considre que la seule disposition approprie enlespce est larticle 5 4 de la Convention, dont la partie pertinente estainsi libelle :

    Toute personne prive de sa libert par arrestation ou dtention a le droitdintroduire un recours devant un tribunal, afin quil statue bref dlai sur la lgalitde sa dtention et ordonne sa libration si la dtention est illgale.

    A. Sur la recevabilit

    28. Le Gouvernement note que le requrant a t condamn en vertu delarrt no 562/2010 de la cour dassises de Thessalonique douze ans ettrois mois de rclusion et que la priode de sa mise en dtention provisoire at dduite de la peine effectuer. Il relve que mme si les violations delarticle 5 4 dont le requrant se plaint n avaient pas eu lieu, il se

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    trouverait toujours maintenu en dtention suite sa condamnation par larrtno 562/2010. Par consquent, il ne peut pas prtendre tre victime dune

    violation de larticle 5 4 de la Convention.29. La Cour rappelle que selon la jurisprudence, une dcision ou une

    mesure favorable au requrant ne suffit pas en principe le priver de laqualit de victime aux fins de larticle 34 de la Convention, sauf si lesautorits nationales reconnaissent, explicitement ou en substance, puisrparent la violation de la Convention (voir, par exemple, Ecklec. Allemagne, 15 juillet 1982, 69 et suiv., srie A no 51 ; Dalbanc. Roumanie [GC], no 28114/95, 44, CEDH 1999-VI, et Gfgenc. Allemagne [GC], no 22978/05, 115, CEDH 2010). En ce qui concerne larparation adquate et suffisante pour remdier au niveau interne laviolation dun droit garanti par la Convention, la Cour considre

    gnralement quelle dpend de lensemble des circonstances de la cause,eu gard en particulier la nature de la violation de la Convention qui setrouve en jeu (voir, par exemple, Gfgen, prcit, 116).

    30. En loccurrence, la Cour note que larrt no 562/2010, en vertuduquel le requrant a t condamn plus de douze ans de rclusion, ne

    peut pas tre considr comme une dcision ou mesure favorable aurequrant, de nature constituer une rparation adquate et suffisante pourremdier au niveau interne les violations de larticle 5 4 de la Convention,invoques par le requrant. Il convient donc de rejeter lobjection duGouvernement.

    31. Par ailleurs, la Cour constate que ce grief nest pas manifestementmal fond au sens de larticle 35 3 a) de la Convention. Elle relve aussique celui-ci ne se heurte aucun autre motif dirrecevabilit. Il convientdonc de le dclarer recevable.

    B. Sur le fond

    1. Quant au rejet par la chambre daccusation de la demande de

    comparution personnelle du requrant

    32. Le Gouvernement affirme notamment que dans sa demande de levede la dtention provisoire, le requrant avait expos de manire dtaille

    tous ses arguments. Il ajoute que le requrant ne prcise pas en quoi sacomparution personnelle aurait contribu renforcer ses chances que lademande dlargissement aboutisse. Le Gouvernement en conclut que le

    principe de lgalit des armes na pas t atteint en lespce.33. Le requrant rtorque que selon la jurisprudence tablie de la Cour,

    le refus de lautorit judiciaire comptente de lautoriser comparatre enpersonne devant elle ntait pas conforme larticle 5 4 de la Convention.

    34. La Cour rappelle quelle a examin cette question loccasion deplusieurs affaires (voir Kampanis c. Grce, 13 juillet 1995, srie Ano 318-B ; Kotsaridis c. Grce, no 71498/01, 23 septembre 2004 ; Giosakisc. Grce (no 1), no 42778/05, 12 fvrier 2009, etBala c. Grce, no 40876/07,

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    1er juillet 2010) pour conclure une violation de larticle 5 4. LeGouvernement na expos aucun fait ni argument pouvant mener une

    conclusion diffrente dans le cas prsent que celle laquelle la Cour aabouti dans le cadre de son examen des affaires prcites. En labsencedlments nouveaux, la Cour doit constater quen rejetant la demande decomparution du requrant, la chambre daccusation du tribunalcorrectionnel de Thessalonique a priv celui-ci de la possibilit decombattre de manire approprie les motifs invoqus pour justifier sonmaintien en dtention.

    35. Partant, il y a eu violation de larticle 5 4 de la Convention cetgard.

    2. Quant lobligation de statuer bref dlai sur la lgalit de la

    dtention

    36. Le Gouvernement allgue que le recours exerc par le requrantcontre le mandat no 13/2009, ayant ordonn sa mise en dtention provisoire,ne constituait pas une voie de recours concerne par larticle 5 4 de laConvention. En outre, il estime que le laps de temps coul en l espce

    jusqu ce que la chambre daccusation se prononce sur la demandedlargissement a t raisonnable.

    37. Le requrant souligne que le retard pris dans lexamen de sademande dlargissement relve de la responsabilit exclusive de lachambre daccusation du tribunal correctionnel de Thessalonique.

    38. La Cour note en premier lieu que par le biais du recours en cause, lerequrant a invit la juridiction comptente se prononcer sur la lgalit desa dtention et ordonner sa leve ou son assouplissement. Elle considredonc quil sagissait en lespce dune voie de recours concerne parlarticle 5 4 de la Convention (voir, en ce sens, Giosakis c. Grce (no 2),no 36205/06, 67-74, 12 fvrier 2009).

    39. La Cour rappelle que les procdures relatives des questions deprivation de libert, au sens de larticle 5 4, requirent une diligenceparticulire et que les exceptions au principe dune constatation brefdlai de la conformit de la dtention appellent une interprtation stricte(Hutchison Reid c. Royaume-Uni,no 50272/99, 79, CEDH 2003-IV). La

    question de savoir si le principe de la clrit de la procdure a t respectsapprcie, non pas dans labstrait, mais dans le cadre dune apprciationglobale des donnes, en tenant compte des circonstances de l espce(Delbec c. France, no 43125/98, 33, 18 juin 2002), en particulier lalumire de la complexit de laffaire, des particularits ventuelles de la

    procdure interne suivre ainsi que du comportement du requrant danscelle-ci. En principe, cependant, puisque la libert de lindividu est en jeu,lEtat doit faire en sorte que la procdure se droule dans un minimum detemps (Fuchser c. Suisse, no 55894/00, 43, 13 juillet 2006).

    40. Compte tenu de ces critres, et titre dexemple, la Cour a constatun dpassement du bref dlai au sens de l article 5 4 dans les affaires

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    suivantes : Rehbock c. Slovenie, (no 29462/95, 84, ECHR 2000-XII) :dure de vingt-trois jours ; G.B. c. Suisse (no 27426/95, 32, 30 novembre

    2000) dure de trente-deux jours ; Mamedova c. Russie, (no

    7064/05, 96,1er juin 2006) dure de trente-six jours ; Mooren c. Allemagne (no 1364/03, 73, 13 dcembre 2007) : dure de quatre-vingt-deux jours, et Giosakisc. Grce (no 2) (prcit, 71) : dure de soixante-sept jours.

    41. La Cour note que le requrant a dpos sa demande dlargissementauprs de la chambre daccusation du tribunal correctionnel deThessalonique le 18 fvrier 2009 et celle-ci la rejete le 26 mai 2009, savoir au bout de trois mois et huit jours.

    42. Au vu de la jurisprudence prcite, la Cour considre que cettepriode nest pas compatible avec lexigence du bref dlai de larticle 5 4. Il sensuit quil y a eu violation de cette disposition sur ce point.

    III. SUR LAPPLICATION DE LARTICLE 41 DE LA CONVENTION

    43. Aux termes de larticle 41 de la Convention,

    Si la Cour dclare quil y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, etsi le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet deffacerquimparfaitement les consquences de cette violation, la Cour accorde la partielse, sil y a lieu, une satisfaction quitable.

    A. Dommage

    44. Pour dommage moral, le requrant demande 25 000 euros (EUR).45. Le Gouvernement estime que le constat de violation constituerait

    une satisfaction quitable suffisante.46. La Cour considre quen raison de la violation constate de larticle

    5 4 de la Convention, le requrant a subi un tort moral certain, justifiantloctroi dune indemnit. Statuant en quit comme le veut larticle 41, ellelui octroie 4 000 EUR ce titre.

    B. Frais et dpens

    47. Pour frais et dpens, le requrant demande la somme de10 000 EUR. Il ne produit pas de facture ou note dhonoraires.

    48. Le Gouvernement fait valoir que les prtentions du requrant ne sontpas accompagnes des justificatifs ncessaires.

    49. Selon la jurisprudence constante de la Cour, lallocation de frais etdpens au titre de larticle 41 prsuppose que se trouvent tablis leur ralit,leur ncessit et, de plus, le caractre raisonnable de leur taux. En outre, lesfrais de justice ne sont recouvrables que dans la mesure o ils se rapportent la violation constate (Beyeler c. Italie (satisfaction quitable) [GC],no 33202/96, 27, 28 mai 2002). La Cour note que le requrant ne produit

  • 7/27/2019 : SHYTI

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    ARRT SHYTI c. GRCE 11

    aucun document lappui de sa prtention concernant les frais et dpens. Ilconvient donc dcarter sa demande.

    C. Intrts moratoires

    50. La Cour juge appropri de calquer le taux des intrts moratoires surle taux dintrt de la facilit de prt marginal de la Banque centraleeuropenne major de trois points de pourcentage.

    PAR CES MOTIFS, LA COUR, LUNANIMIT,

    1. Dclare recevable la requte en ce qui concerne les griefs tirs delarticle 5 4 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;

    2. Ditquil y a eu violation de larticle 5 4 de la Convention ;

    3. Dita) que lEtat dfendeur doit verser au requrant, dans les trois mois, compter du jour o larrt sera devenu dfinitif conformment larticle 44 2 de la Convention, 4 000 EUR (quatre mille euros) pourdommage moral, plus tout montant pouvant tre d titre dimpt ;

    b) qu compter de lexpiration dudit dlai et jusquau versement, ce

    montant sera majorer dun intrt simple un taux gal celui de lafacilit de prt marginal de la Banque centrale europenne applicable

    pendant cette priode, augment de trois points de pourcentage ;

    4. Rejette la demande de satisfaction quitable pour le surplus.

    Fait en franais, puis communiqu par crit le 17 octobre 2013, enapplication de larticle 77 2 et 3 du rglement.

    Andr Wampach Isabelle Berro-LefvreGreffier adjoint Prsidente