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La th´ eorie de la production La production d’une entreprise, d’une branche ou d’une nation est souvent exprim´ ee par une fonction de production. S’il y a un seul output on peut ´ ecrire: q = f (x 1 ,x 2 ,...,x r ) o` u q est le bien produit et x i ; i =1,...,r les facteurs de production. Si l’entreprise produit plusieurs biens, il faut utiliser une forme implicite et ´ ecrire: Φ(q 1 ,...,q m ; x 1 ,...,x r )=0 Rendement marginal et rendement d’´ echelle Les marginalistes ont ´ etudi´ e la variation de la production lorsqu’on augmente l’utilisation d’un facteur de production. On obtient la productivit´ e marginale qui est donn´ ee par la eriv´ ee partielle ∂q ∂x i = f i . Les marginalistes ont observ´ e que le rendement marginal (ou la productivit´ e marginale) diminue lorsqu’on augmente l’utilisation du facteur. En d’autres termes, la d´ eriv´ ee deuxi` eme est n´ egative [ 2 q ∂x 2 i = f ii < 0]. Cette constatation est g´ en´ erale et on parle alors de la loi des rendements marginaux d´ ecroissants. Par cons´ equent, il faut utiliser une fonction strictement concave pour repr´ esenter la production. En effet, une matrice hessienne d´ efinie n´ egative a des valeurs n´ egatives sur la diagonale [f ii < 0] et elle implique une fonction strictement concave. Lorsque tous les facteurs varient on parle de rendement d’´ echelle. Supposons que tous les facteurs soient multipli´ es par γ . On aura alors: f (γx 1 ,γx 2 ,...,γx m )= α(γq) γ> 1 Si α> 1 le rendement d’´ echelle est croissant, si α = 1 le rendement est constant et si α< 1 il est d´ ecroissant. Le rendement d’´ echelle peut varier selon la valeur de la production et la valeur de γ . Par exemple, si la fonction de production est: q =3x 2 1 x 2 2 - x 3 1 x 3 2 /8 et x 1 = x 2 = 2, alors α =3.2 lorsque γ = 2 mais α =0.66 lorsque γ =2.4. Si la fonction de production est homog` ene, alors le rendement restera toujours le mˆ eme car α = γ s-1 o` u s est le degr´ e d’homog´ en´ eit´ e de la fonction. Si s> 1 alors le rendement d’´ echelle est toujours croissant, s’il est ´ egal ` a 1 il sera toujours constant et s’il est inf´ erieur ` a 1 il sera toujours d´ ecroissant. Au niveau d’une nation le rendement d’´ echelle est approximativement constant. Les estima- tions de la fonction Cobb-Douglas g´ en´ eralis´ ee: q = AK a L b A, a, b > 0 o` u K est le capital, L le travail et A, a, b des coefficients, donnent des valeurs de s = a + b proches de l’unit´ e. Un rendement d’´ echelle constant n’est pas incompatible avec un rendement marginal d´ ecrois- sant. Par exemple, les rendements marginaux de la fonction ci-dessus sont: f KK = a(a - 1)AK a-2 L b < 0 si a< 1 f LL = b(b - 1)AK a L b-2 < 0 si b< 1 Lorsque s = a + b = 1, le rendement d’´ echelle est constant mais les rendements marginaux sont d´ ecroissants. La fonction est concave si s = 1 et strictement concave si s< 1. Si la fonction de production est de type Cobb-Douglas g´ en´ eralis´ e, alors le rendement marginal est proportionnel au rendement moyen. En effet: f K = a q K ; f L = b q L 1

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La theorie de la productionLa production d’une entreprise, d’une branche ou d’une nation est souvent exprimee par unefonction de production. S’il y a un seul output on peut ecrire:q = f(x1, x2, . . . , xr)ou q est le bien produit et xi ; i = 1, . . . , r les facteurs de production. Si l’entreprise produitplusieurs biens, il faut utiliser une forme implicite et ecrire:Φ(q1, . . . , qm;x1, . . . , xr) = 0Rendement marginal et rendement d’echelleLes marginalistes ont etudie la variation de la production lorsqu’on augmente l’utilisationd’un facteur de production. On obtient la productivite marginale qui est donnee par laderivee partielle ∂q

∂xi= fi. Les marginalistes ont observe que le rendement marginal (ou

la productivite marginale) diminue lorsqu’on augmente l’utilisation du facteur. En d’autrestermes, la derivee deuxieme est negative [ ∂2q

∂x2i

= fii < 0]. Cette constatation est generaleet on parle alors de la loi des rendements marginaux decroissants. Par consequent, il faututiliser une fonction strictement concave pour representer la production. En effet, une matricehessienne definie negative a des valeurs negatives sur la diagonale [fii < 0] et elle impliqueune fonction strictement concave.Lorsque tous les facteurs varient on parle de rendement d’echelle. Supposons que tous lesfacteurs soient multiplies par γ. On aura alors:f(γx1, γx2, . . . , γxm) = α(γq) γ > 1Si α > 1 le rendement d’echelle est croissant, si α = 1 le rendement est constant et si α < 1il est decroissant.Le rendement d’echelle peut varier selon la valeur de la production et la valeur de γ. Parexemple, si la fonction de production est:q = 3x2

1x22 − x3

1x32/8

et x1 = x2 = 2, alors α = 3.2 lorsque γ = 2 mais α = 0.66 lorsque γ = 2.4.Si la fonction de production est homogene, alors le rendement restera toujours le meme carα = γs−1 ou s est le degre d’homogeneite de la fonction. Si s > 1 alors le rendement d’echelleest toujours croissant, s’il est egal a 1 il sera toujours constant et s’il est inferieur a 1 il seratoujours decroissant.Au niveau d’une nation le rendement d’echelle est approximativement constant. Les estima-tions de la fonction Cobb-Douglas generalisee:q = AKaLb A, a, b > 0ou K est le capital, L le travail et A, a, b des coefficients, donnent des valeurs de s = a+ bproches de l’unite.Un rendement d’echelle constant n’est pas incompatible avec un rendement marginal decrois-sant. Par exemple, les rendements marginaux de la fonction ci-dessus sont:fKK = a(a− 1)AKa−2Lb < 0 si a < 1fLL = b(b− 1)AKaLb−2 < 0 si b < 1Lorsque s = a + b = 1, le rendement d’echelle est constant mais les rendements marginauxsont decroissants. La fonction est concave si s = 1 et strictement concave si s < 1.Si la fonction de production est de type Cobb-Douglas generalise, alors le rendement marginalest proportionnel au rendement moyen. En effet:fK = a q

K ; fL = b qL

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D’autre part, le taux de substitution technique (TST ), c’est-a-dire le rapport des rendementsmarginaux (pente de l’isoquante) depend uniquement du rapport des facteurs. Ceci est le caspour toute fonction homogene. On a ici:

TST = | dKdL | =

fL

fK= bAKaLb−1

aAKa−1Lb = ba

KL

L’elasticite de substitutionL’utilisation des facteurs depend des techniques de production. La fonction de productionexprime ces relations techniques. A court terme, les proportions sont souvent fixes mais aplus ou moins long terme il est possible de changer de technique. Par exemple, la fabricationde voitures devient de plus en plus robotisees: plus de capital et moins de travail. Le tauxde substitution technique indique les facilites ou les difficultes de remplacement d’un facteurpar un autre. Il a toutefois un inconvenient majeur: il depend des unites de mesure desfacteurs. On a alors propose une mesure independante des unites. Il s’agit de l’elasticite desubstitution. Comme toute elasticite, elle est le rapport de deux variations en pourcentage.On prend ici les pourcentages de variation du rapport des facteurs [d ln( K

L )] et du taux desubstitution technique [d lnTST = d ln(fL/fK )]:

σ = d ln( KL )

d lnfLfK

=LK d( K

L )fKfL

d(fLfK

)

Si la fonction est homogene de degre s, cette expression devient:σ = fLfK

sqfLK+fLfK (1−s)

La fonction Cobb-Douglas generalisee a une elasticite de substitution egale a l’unite. Si l’onveut estimer l’elasticite de substitution, il faut choisir une fonction plus generale. On a alorspropose une fonction qui a une elasticite de substitution constante. Cette fonction, appeleeCES (constant elasticity of substitution) est donnee par l’expression suivante:q = A[aK−ρ + (1− a)L−ρ]−s/ρ

avecTST = 1−a

a ( KL )1+ρ ; σ = 1

1+ρ

Si ρ = 0 (σ = 1) , on obtient la fonction Cobb-Douglas generalisee. Si ρ = ∞ (σ = 0) lesdeux facteurs doivent etre utilises dans des proportions fixes et la fonction de production estq = min(aK, bL). On l’appelle aussi la fonction de production de Leontief. Si ρ = −1 (σ = ∞)on peut substituer un facteur par l’autre sans aucune difficulte. La fonction de productionest q = aK + bL et l’isoquante est une droite.La fonction CES peut meme donner des isoquantes concaves. Il suffit de prendre ρ < −1.

Choix des facteurs et du niveau de productionLe choix des facteurs depend du prix. Supposons que l’entreprise doit produire une certainequantite (qo) d’output. Les prix des facteurs sont pK pour le capital et pL pour le travail.Ils sont fixes. L’entreprise veut minimiser les couts de production. On aura alors:min C = pKK + pLL S.C. qo = f(K,L)Le lagrangien est:L = pKK + pLL+ λ[qo − f(K,L)]ou λ represente ici le cout marginal. Les conditions de premier ordre sont:

∂L∂K = pK − λfK = 0∂L∂L = pL − λfL = 0∂L∂λ = qo − f(K,L) = 0

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En eliminant le multiplicateur de Lagrange on trouve l’egalite entre le taux de substitutiontechnique et le rapport des prix des facteurs:TST = fL

fK= pL

pK

La condition de deuxieme ordre implique que les isoquantes soient strictement convexes etceci est le cas si la fonction de production est strictement quasi-concave.Si l’on change la quantite produite, on aura de nouvelles quantites qui minimisent le coutde production. En reliant les points de tangence entre l’isocout et l’isoquante on obtient lechemin d’expansion de la production de l’entreprise. Ce chemin est une droite lorsque lafonction de production est homogene (ou homothetique).Choix du niveau de production

Les entreprises qui travaillent sur commande ne sont pas tres nombreuses. En general,l’entreprise propose differentes quantites selon le prix du produit. Cette fonction d’offreest obtenue en faisant l’hypothese que l’entreprise maximise son profit:Π = pq − (pKK + pLL) = pf(K,L)− pKK − pLL

Si le prix de vente est fixe (hypothese de concurrence parfaite), alors les conditions de premierordre sont:{ ∂Π

∂K = pfK − pK = 0∂Π∂L = pfL − pL = 0

L’entreprise produit jusqu’au point ou la productivite marginale en valeur est egale au prixdu facteur:pfK = pK ; pfL = pL

La condition de deuxieme ordre est:pfKK < 0∣∣∣∣ pfKK pfKL

pfLK pfLL

∣∣∣∣ = p2

∣∣∣∣ fKK fKL

fLK fLL

∣∣∣∣ > 0

et ceci implique pfLL < 0. La fonction de production doit etre strictement concave, aumoins au point d’equilibre. On peut aussi remarquer que la loi des rendements marginauxdecroissants est impliquee par cette condition.Fonctions de demande et d’offre de l’entreprise

En resolvant les conditions de premier ordre par rapport a K et a L on obtient les fonctionsde demande (d’inputs) de l’entreprise:K = ϕ1(pK , pL, p)L = ϕ2(pK , pL, p)La demande d’un facteur depend des prix des facteurs utilises et du prix du produit. Il s’agitd’une fonction homogene de degre zero par rapport aux prix, comme on peut le constateren prenant les conditions de premier ordre. Si l’on change d’unite monetaire, la demande del’entreprise, comme celle des consommateurs, reste la meme.En introduisant ces valeurs de K et de L dans la fonction de production on obtient:q = f [ϕ1(pK , pL, p), ϕ2(pK , pL, p)] = ψ(pK , pL, p)qui est la fonction d’offre (de l’output) de l’entreprise. Aussi cette fonction est homogene dedegre zero par rapport aux prix.Il est interessant d’analyser les effets, sur la demande d’inputs et sur l’offre de l’output,d’une variation des prix des facteurs et du prix de l’output. Comme dans la theorie du

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consommateur, on fait varier le prix et on compare les quantites d’equilibre avant et apres lechangement.(1) Effets d’une variation du prix de l’output

Prenons tout d’abord le cas d’une variation du prix du produit vendu par l’entreprise. Endifferenciant les conditions de premier ordre par rapport a p on obtient:{

fK + pfKK∂K∂p + pfKL

∂L∂p = 0

fL + pfLK∂K∂p + pfLL

∂L∂p = 0

L’effet sur l’offre peut etre obtenu en differenciant la fonction de production:∂q∂p = fK

∂K∂p + fL

∂L∂p

En utilisant les matrices, on peut ecrire tous ces effets de la maniere suivante: pfKK pfKL 0

pfLK pfLL 0

fK fL −1

.

∂K∂p∂L∂p∂q∂p

=

−fK

−fL

0

[pH 0

fTx −1

].

[ ∂x∂p∂q∂p

]=

[−fx

0

]ou H est la matrice hessienne des derivees deuxiemes de la fonction de production et x levecteur des inputs. On a alors les vecteurs et la matrice suivants:

∂x∂p =

[ ∂K∂p∂L∂p

]fx =

[fK

fL

]; H =

[fKK fKL

fLK fLL

]L’inverse de la matrice a gauche ci-dessus est:[pH 0

fTx −1

]−1

=[ 1

pH−1 0

1p f

Tx H

−1 −1

]Les effets d’une variation du prix de l’output sont alors:{ ∂x

∂p = − 1pH

−1fx

∂q∂p = − 1

p fTx H

−1fx

La condition de deuxieme ordre implique que H est une matrice definie negative. Parconsequent, l’expression fT

x H−1fx est negative et alors ∂q/∂p sera positif. L’augmentation

du prix de l’output conduit necessairement a un accroissement de la production et de l’offrede l’entreprise. La courbe d’offre a une pente positive:Il n’est pas possible de determiner l’effet sur la quantite demandee des facteurs. Toutefois,on peut dire que l’entreprise va accroıtre l’utilisation d’au moins un facteur.Si l’entreprise utilise de moins en moins un facteur lorsque le prix de vente (et la production)augmente, on dit que ce facteur est un input inferieur. Dans ce cas, le chemin d’expansionaura une pente negative.(2) Effets d’une variation du prix des inputs

Supposons maintenant que le prix du capital se modifie. En differenciant les conditions depremier ordre on obtient:{

pfKK∂K∂pK

+ pfKL∂L

∂pK= 1

pfLK∂K∂pK

+ pfLL∂L

∂pK= 0

L’effet sur l’offre de l’entreprise peut etre determine en differenciant la fonction de production:∂q

∂pK= fK

∂K∂pK

+ fL∂L

∂pK

En mettant ces expressions sous la forme matricielle suivante:

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[pH 0

fTx −1

].

[ ∂x∂pk

∂q∂pk

]=

1

0

0

ou

∂x∂pK

= [ ∂K∂pK

∂L∂pK

]T

on obtient:[ ∂x∂pK

∂q∂pK

]=

[ 1pH

−1 01p f

Tx H

−1 −1

].

1

0

0

et alors:

∂x∂pK

= 1pH

−1

[1

0

]; ∂q

∂pK= 1

p fTx H

−1

[1

0

]L’inverse de la matrice hessienne est:

H−1 = (1/D)[fLL −fKL

−fLK fKK

]ou D = fKKfLL − fKLfLK . Nous savons que cette matrice doit etre definie negative (con-dition de deuxieme ordre). On a alors:∂K∂pK

= 1D p fLL < 0 ; ∂L

∂pK= − 1

D p fLK

Si le prix du capital augmente, l’entreprise va diminuer la quantite utilisee de ce facteur.Le meme raisonnement est valable pour une augmentation du prix du travail. La demanded’input a une pente negative. Il n’y a pas ici le cas des biens Giffen. Si le prix d’un facteuraugmente, l’entreprise va diminuer l’utilisation de ce facteur.

Il y a une relation interessante entre l’effet d’une variation du prix du produit sur la demanded’un facteur et l’effet d’une variation du prix d’un facteur sur la production de l’entreprise.

En utilisant l’equation ci-dessus, on peut ecrire:

∂K∂p = − 1

p [1 0]H−1fx = − 1p f

Tx H

−1

[1

0

]= − ∂q

∂pK

Une hausse du prix du produit augmente la demande de capital si une hausse du prix ducapital conduit a une diminution de la production de l’entreprise. Si le capital n’est pas uninput inferieur, la demande de ce facteur augmente lorsque la production augmente (a lasuite d’une hausse du prix de l’output). Dans ce cas, la production doit diminuer lorsque leprix du capital augmente. Par contre, la hausse du prix d’un input inferieur conduit a unaccroissement de la production.

On ne peut pas determiner l’effet d’une hausse du prix du capital sur la demande de travail.Deux inputs sont appeles complementaires si la hausse du prix d’un facteur conduit aussia une baisse de l’autre facteur. Deux inputs sont substituables lorsque la hausse du prixd’un facteur fait augmenter l’utilisation de l’autre input.

Dans la production, le cas le plus courant est celui de deux inputs complementaires. Parexemple, si la fonction de production est de type Cobb-Douglas generalisee, la derivee croiseefLK est positive et alors les deux inputs sont complementaires. Dans ce cas, la productiondiminue si le prix d’un facteur augmente et par consequent les deux inputs ne sont pasinferieurs.

Si les deux inputs sont substituables, on pourrait avoir un input inferieur. L’utilisationrentable de l’autre facteur implique alors un accroissement de la production.

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On peut reunir les effets d’une variation du prix du produit et ceux d’une variation du prixdes facteurs et former l’equation matricielle fondamentale de la theorie de l’entreprise. Lesdeux facteurs seront designes par x1 et x2 plutot que K et L et leurs prix w1 et w2 au lieude pK et pL. On a alors:[pH O

fTx −1

] [Xw xp

qTw qp

]=

[I −fx

0 0

]ou

Xw =[ ∂x1

∂w1

∂x1∂w2

∂x2∂w1

∂x2∂w2

]; xp =

[ ∂x1∂p∂x2∂p

]qw =

[ ∂q∂w1∂q

∂w2

]; fx =

[ ∂q∂x1∂q

∂x2

]qp = ∂q

∂p

En premultipliant par l’inverse de la matrice a gauche, on obtient:Xw = (1/p)H−1

qw = (1/p)H−1fx = −xp

qp = (−1/p)fTx H

−1fx

Comme la matrice des derivees deuxiemes (H) est symetrique, on a:∂xi

∂wj= ∂xj

∂wi

L’effet d’une variation du prix du facteur j sur la demande d’input du facteur i est egal acelui d’une variation du prix du facteur i sur la demande d’input du facteur j.

Lorsqu’il y a plusieurs produits et plusieurs facteurs, il faut utiliser la fonction de productionsou forme implicite:Φ(y1, y2, . . . , ym) = 0ou yi (i = 1, 2, . . . ,m) sera un output s’il est positif et un input s’il est negatif.Le profit de l’entreprise est:Π =

∑mi=1 piyi

Afin de maximiser le profit, sous la contrainte donnee par la fonction de production implicite,ecrivons le lagrangien suivant:L =

∑mi=1 piyi + λΦ(y1, y2, . . . , ym)

Les conditions de premier ordre sont:{ ∂L∂yi

= pi + λΦi = 0 (i = 1, 2, . . . ,m)∂L∂λ = Φ(y1, y2, . . . , ym) = 0

En prenant deux equations (i et j) quelconques parmi les conditions ci-dessus, on obtient lesrelations suivantes:pi

pj= Φi

Φj= − ∂yj

∂yi

(Φi = ∂Φ/∂yi) qui sont une generalisation des resultats obtenus precedemment. En effet:(a) Si yi et yj representent des inputs alors l’equation ci-dessus indique que le taux de sub-stitution technique doit etre egal au rapport des prix:pi

pj= − ∂xj

∂xi= TST

(b) Si yi est un input et yj un output, on peut ecrire:

pi = − ∂yj

∂yipj = pj

∂qj

∂xi

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et on retrouve l’egalite entre la productivite marginale en valeur et le prix du facteur.(c) Si yi et yj sont deux outputs i et j on trouve l’egalite entre le rapport des prix et le tauxde transformation des produits:pi

pj= − ∂qj

∂qi= TTP

(d) Si yi est un output et yj un input, on peut ecrire:

pi = − ∂yj

∂yipj = pj

∂xj

∂qi

et on trouve les conditions de premier ordre pour les productions jointes.On peut montrer que les derivees partielles de la fonction de production implicite sont pos-itives. Ceci implique que le taux marginal de substitution, le taux de transformation desproduits et les productivites marginales sont positifs.La condition de deuxieme ordre est satisfaite si la forme quadratique dyT (λH) dy est definienegative pour tout vecteur dy tel que dyT Φy = 0 ou H = [Φij ] est la matrice des deriveesdeuxiemes de la fonction de production implicite (dy et Φy sont les deux vecteurs-colonne[dyi] et [Φi]).Les effets d’une variation des prix (des inputs ou des outputs) sur les fonctions de demandedes inputs et sur celles d’offre des outputs peuvent etre obtenus en prenant la differentielledes conditions de premier ordre. On obtient:{λ

∑Φij + Φidλ+ dpi = 0∑

Φidyi = 0et ceci peut etre mis sous la forme matricielle suivante:[λH Φy

ΦTy 0

] [dy

]=

[−dp0

]En utilisant les conditions de premier ordre on a:[

λH 1λ p

− 1λ p

T 0

] [dy

]=

[−dp0

]L’inverse de la matrice a gauche peut etre ecrit de la maniere suivante:[

λH 1λ p

− 1λ p

T 0

]−1

=[A b

bT c

]Cette matrice est similaire a celle obtenue dans la theorie du consommateur. En effectuantle meme raisonnement, on obtient:∂yi

∂pi= −Aii

ou Aii est l’element sur la diagonale principale de la matrice A ci-dessus. Nous avons vu quecet element est negatif. Par consequent, si yi est un output, l’accroissement de son prix faitaugmenter la production de ce bien. Si yi = −xi est un input, l’augmentation du prix de cefacteur conduit a une baisse de son utilisation.D’autre part, A est une matrice symetrique et alors:∂yi

∂pj= ∂yj

∂pi

et, si yi est un input et yj un output, on retrouve la relation (∂xi/∂pj = −∂qj/∂pi) entrel’effet d’une variation du prix d’un output sur la demande d’input et celui d’une variation duprix du meme input sur l’output correspondant. En definitive, les resultats obtenus dans lecas de deux facteurs et un output restent valables lorsqu’on a m biens.L’egalite entre le prix de vente et le cout marginal reste aussi valable dans le cas general dem biens. En effet, le profit peut etre ecrit de la maniere suivante:π =

∑piqi − C(q1, q2, . . . , qm)

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et les conditions de premier ordre pour la maximisation du profit impliquent l’egalite entreles prix et les couts marginaux:∂π∂qi

= pi − Cmi = 0 =⇒ pi = Cmi (i = 1, 2, . . . ,m))

La fonction de coutOn presentait autrefois la theorie de l’entreprise en commencant directement par les couts,sans faire le lien avec la fonction de production. La fonction (classique) de cout exprime larelation existant entre l’output et les couts de productionComme la recette depend elle aussi de la quantite vendue, on peut ainsi presenter la theoriede l’entreprise en utilisant un nombre restreint de variables.Le profit de l’entreprise depend des quantites produites et vendues:Π(q) = R(q)− C(q)ou R est la recette totale et C le cout total. Le maximum de cette fonction est obtenu lorsquela derivee est egale a zero:dπdq = dR

dq −dCdq = Rm− Cm = 0

ou Rm designe la recette marginale et Cm le cout marginal. Il y a donc egalite entre recettemarginale et cout marginal.La recette marginale est ici egale au prix puisque toutes les unites sont vendues au memeprix (R = pq =⇒ Rm = p). Par consequent, le profit maximum est obtenu lorsque leprix est egal au cout marginal. Si le cout marginal est croissant, la condition de deuxiemeordre est satisfaite.L’egalite entre prix et cout marginal permet de relier les conditions de minimisation descouts, sous une contrainte de production, et celles de maximisation du profit exprimees avecles productivites marginales. Etant donne que le multiplicateur de Lagrange est egal aucout marginal, les deux conditions sont identiques. Si l’on veut maximiser le profit, il fautminimiser les couts de la production que l’on desire vendre.La fonction classique des couts peut etre obtenue en resolvant le systeme suivant:

q = f(K,L)

C = pKK + pLL

ξ(K,L) = 0ou la derniere equation est la fonction implicite du chemin d’expansion. En prenant les deuxdernieres equations, on peut exprimer K et L en fonction de C. Si l’on introduit ces valeursdans la premiere equation, on peut obtenir C en fonction de q et ceci est la fonction de couttraditionnelle ou classique.Si la fonction de production est homogene de degre s, on peut obtenir facilement la fonctionclassique de cout en partant du cout d’une unite d’output. Soit Ko et Lo les quantites desinputs necessaires pour produire une unite d’output. Le cout est alors:pKKo + pLLo = k

Par la definition d’une fonction homogene de degre s, on a:q = f(K,L) = f(γKo, γLo) = γsf(Ko, Lo) = γs

D’autre part:C = pKK + pLL = pKγKo + pLγLo = γ(pKKo + pLLo) = γk

En reunissant ces deux resultats on obtient:C = kq1/s

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Le cout marginal et sa derivee seront alors:Cm = 1

s kq1/s−1 ; dCm

dq = 1−ss2 kq1/s−2

Si le rendement d’echelle est decroissant (s < 1), le cout marginal sera toujours croissant.Un rendement d’echelle constant donne un cout marginal constant (Cm = k) et egal au coutunitaire ou moyen. Si le rendement d’echelle est croissant (s > 1) le cout marginal seratoujours decroissant. Dans ce cas, l’entreprise peut accroıtre son profit en augmentant laproduction et elle devient de plus en plus grande. L’hypothese de prix de vente fixe ne seraitalors plus acceptable.Si le rendement d’echelle est constant, il y a trois possibilites:(a) Le cout marginal est inferieur au prix: le profit augmente sans limite. On retrouve le casci-dessus.(b) Le cout marginal est egal au prix: le profit est nul pour toute production. La dimensionde l’entreprise est indeterminee.(c) Le cout marginal est superieur au prix: il vaut mieux ne rien produire.On fait souvent la distinction entre fonction de cout de courte periode et fonction de coutde longue periode. Comme on l’a indique au debut de ce chapitre, le nombre de facteursvariables augmente avec la longueur de la periode. On peut alors dire qu’en longue periodetous les facteurs sont variables. L’entreprise peut considerer librement toutes ses options.Elle peut choisir la meilleure methode de production et les quantites des facteurs qu’elledesire. En courte periode on dispose souvent d’une seule methode de production et certainsfacteurs sont fixes. La courte et la longue periode n’indiquent pas un nombre precis d’annees.Dans les services (les coiffeurs par exemple) on a le long terme deja apres quelques moisou annees. Par contre, dans certaines branches comme la siderurgie ou l’electricite il fautplusieurs annees avant de pouvoir changer de methode de production (une centrale nucleairefonctionne pendant des dizaines d’annees).

Le theoreme d’Euler et la theorie de la distribution du revenuComme nous l’avons indique au debut de ce chapitre, l’homogeneite de la fonction de pro-duction avait une consequence tres importante pour la theorie de la distribution basee sur laproductivite marginale des facteurs. Selon J.B. Clark, la distribution du revenu obeit a uneloi naturelle qui attribue a chaque agent la quantite de richesse qu’il a cree. Cette quantitecorrespond a la productivite marginale de chaque facteur. Il etait alors necessaire de montrerque tout le produit etait distribue aux facteurs de production. Or, si la fonction de productionest homogene on peut utiliser le theoreme d’Euler qui etablit le lien suivant entre la fonctionhomogene q = f(K,L) et ses derivees partielles:KfK + LfL = sq

Lorsque le rendement d’echelle est constant (s = 1), toute la production est distribuee auxdeux facteurs. Si l’on prend la fonction de production Cobb-Douglas generalisee, on a:K(αq/K) + L(βq/L) = (α+ β)qαq + βq = (α+ β)qLes estimations empiriques donnent des valeurs de α d’environ 1/3 et de β d’environ 2/3 etceci correspond aussi a la part du produit national distribue a ces deux facteurs.Toutefois, nous avons vu que l’equilibre de l’entreprise implique des rendements d’echelledecroissants (s < 1). Il resterait donc une partie non distribuee (le profit). On suggere alorsque le rendement d’echelle est constant au niveau d’une branche economique ou d’une nationplutot qu’au niveau de l’entreprise.

9

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Par ailleurs, il n’est pas necessaire que la fonction de production soit homogene de degre 1(rendement d’echelle constant) pour montrer que tout le produit est distribue aux facteurs.Il suffit de faire l’hypothese qu’a long terme le profit est egal a zero (voir chapitre suivant)et ceci a aussi l’avantage de montrer le lien avec la theorie des marches. En effet, si le profitest egal a zero on a:pq = pKK + pLL

En introduisant les conditions de premier ordre pour la maximisation du profit on obtient:pq = pfKK + pfLL

et, apres avoir divise par p, on retrouve le meme resultat que ci-dessus mais sans supposer quela fonction de production soit homogene de degre 1. Dans ce cas, la distribution du revenun’est pas exclusivement un probleme technique, lie au rendement d’echelle, mais le resultatd’hypotheses concernant les marches.L’evolution de la distribution du revenu depend de l’elasticite de substitution. Supposonsque la fonction de production soit homogene de degre 1. Soit ωK = fKK/q la part relativedu capital. Lorsque ce facteur augmente, la variation de sa part relative est:∂ωK

∂K = 1q2 [fKKKq + fKq − f2

KK]En utilisant le theoreme d’Euler on peut ecrire:q = fKK + fLL

fK = fKKK + fK + fKLL

Ces deux relations peuvent etre introduites dans la derivee ci-dessus. On obtient alors:∂ωK

∂K = LfK fL

q2σ−1

σ

Par consequent, la part relative du capital ne varie pas si l’elasticite de substitution est egalea l’unite. Le meme resultat est valable pour l’autre facteur. D’autre part, la part relativedepend uniquement du rapport des facteurs. Soit r = K/L , on a alors:∂ωK

∂r = L ∂ωK

∂K = L2

q2 fKfLσ−1

σ

Si r augmente, la part relative du capital diminue lorsque l’elasticite de substitution estinferieure a l’unite et augmente lorsque celle-ci est superieure a l’unite.Dans les pays developpes, le capital augmente plus fortement que le travail. Si le rendementd’echelle est constant, la stabilite de la part relative des facteurs implique une elasticite desubstitution egale a l’unite et ceci explique les bonnes estimations obtenues avec la fonctionde production Cobb-Douglas.L’analyse dualeComme dans la theorie du consommateur, l’approche duale est basee sur la minimisation descouts pour obtenir une production donnee. En resolvant les conditions de premier ordre dela minimisation des couts, on obtient les demandes conditionnelles des inputs:K = h1(pK , pL, q

o)L = h2(pK , pL, q

o)La fonction de cout de l’analyse duale est definie de la maniere suivante:C(w1, w2, q

o) = min (w1x1 + w2x2)S.C. qo = f(x1, x2)ou w1 et w2 sont les prix des facteurs x1 et x2.La fonction de cout est une fonction concave et homogene de degre 1 par rapport aux prixdes facteurs. D’autre part, la derivee de la fonction de cout par rapport au prix d’un facteurdonne la demande conditionnelle de ce facteur. Les demonstrations de ces resultats sont

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identiques a celles donnees dans la theorie du consommateur. Il suffit de remplacer u∗ parqo, p par w et q par x.ExemplesLa fonction de production Cobb-Douglas generalisee donne les demandes conditionnelles sui-vantes:x1 = A−1/sαβ/sβ−β/sw

−β/s1 w

β/s2 q1/s

x2 = A−1/sα−α/sβα/swα/s1 w

−α/s2 q1/s

ou s = α+ β. La fonction de cout est alors:

C = sA−1/sα−α/sβ−β/swα/s1 w

β/s2 q1/s

et ceci correspond a la fonction obtenue ci-dessus en prenant le chemin d’expansion.La fonction de production CES generalisee donne les demandes conditionnelles suivantes:x1 = kσA(σ−1)/saσw−σ

1 q1/s

x2 = kσA(σ−1)/s(1− a)σw−σ2 q1/s

ou k = A−1/s[aσw1−σ1 + (1− a)σw1−σ

2 ]1/(1−σ) et la fonction de cout est alors:C = kq1/s

La fonction de cout depend des prix des facteurs et de la quantite produite. Il est souventplus facile d’obtenir les donnees des couts de production et des prix que celles relatives a lafonction de production. Si l’on estime directement la fonction de cout, on peut obtenir lafonction de demande conditionnelle en derivant cette fonction par rapport au prix du facteur.Par ailleurs, il est aussi possible de remonter a la fonction de production.Les fonctions de demande (non conditionnelle) des inputs et la fonction d’offre d’outputpeuvent etre obtenues en utilisant la fonction de profit:π(p, w1, w2) = Max [pf(x1, x2)− (w1x1 + w2x2)]En effet, on a les relations suivantes, appelees le lemme d’Hotelling:∂π∂p = ψ(p, w1, w2)∂π∂wi

= −ϕi(p, w1, w2)ou ψ(p, w1, w2) est la fonction d’offre et ϕi(p, w1, w2) est la fonction de demande du facteuri (i=1,2).Soientx∗1 = ϕ1(p, w1, w2) et x∗2 = ϕ2(p, w1, w2) les quantites des deux facteurs qui maximisent leprofit. On a alors:π(p, w1, w1) = pf(x∗1 , x

∗2)− (w1x

∗1 + w2x

∗2)

La derivee par rapport a wi donne:∂π∂wi

= pfx1∂x1∂wi

+ pfx2∂x2∂wi

− w1∂x1∂wi

− w2∂x2∂wi

− x∗i

= (pfx1 − w1) ∂x1∂wi

+ (pfx2 − w2) ∂x2∂wi

− x∗i= −x∗i = −ϕi(p, w1, w2)en utilisant les conditions de premier ordre.On obtient la premiere relation en prenant la derivee par rapport au prix du produit:∂π∂p = q + pfx1

∂x1∂p + pfx2

∂x2∂p − w1

∂x1∂p − w2

∂x2∂p

= q + (pfx1 − w1) ∂x1∂p + (pfx2 − w2) ∂x2

∂p

= q = ψ(p, w1, w2)Exemples

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La fonction de production Cobb-Douglas generalisee conduit a la fonction de profit suivante:π = Aθααθββθw−αθ

1 w−βθ2 pθ/θ

ou θ = 1/(1− α− β).La fonction d’offre est alors:∂π/∂p = q = Aθααθββθw−αθ

1 w−βθ2 pθ−1

et les fonctions de demande des facteurs:− ∂π

∂w1= x1 = Aθα(1−β)θββθw

(β−1)θ1 w−βθ

2 pθ

− ∂π∂w2

= x2 = Aθααθβ(1−α)θw−αθ1 w

(α−1)θ2 pθ

La fonction de production CES generalisee donne la fonction de profit suivante:π = k−sθssθpθ/θ

ou θ = 1/(1− s) et k = A−1/s[aσw1−σ1 + (1− a)σw1−σ

2 ]1/(1−σ)

On a alors:q = k−sθssθpsθ

x1 = kσ−θA(σ−1)/ssθaσpθw−σ1

x2 = kσ−θA(σ−1)/ssθ(1− a)σpθw−σ2

Comme dans le cas de la fonction de cout, il est souvent plus facile de trouver des donneesconcernant le profit et les prix que celles relatives a la fonction de production. Si l’on estimedirectement la fonction de profit, on peut obtenir la fonction d’offre de l’entreprise et lesfonctions de demande des inputs utilises en derivant cette fonction par rapport aux prixappropries.

La fonction de production lineaireDans les sections precedentes, on a suppose qu’une substitution continue entre les inputs etaitpossible. Cette hypothese est tres plausible a plus ou moins long terme ou au niveau d’unebranche economique. Par contre, pour une entreprise et dans le court terme, il existe souventdes procedes de production qui impliquent l’utilisation des inputs dans des proportions fixes.La substitution d’un input par un autre peut souvent avoir lieu mais elle est discontinueet n’intervient qu’a la suite d’un changement du procede de production. Cette section seraconsacree a l’examen de ce cas.Supposons tout d’abord qu’il existe un seul procede de production. L’entreprise utilise deuxinputs dans des proportions fixes. Soient x1, x2 les deux inputs et a1, a2 les coefficients deproduction respectifs (quantite d’input pour obtenir une unite d’output). La fonction deproduction est alors:q = min

(x1a1, x2

a2

)et, comme on l’a vu ci-dessus, elle implique une elasticite de substitution egale a zero. Lacomplementarite entre les deux inputs est totale. D’autre part, si l’on double les inputs, laproduction double. Le rendement d’echelle est alors constant.L’entreprise peut souvent choisir un autre procede et dans ce cas la production est:qII = min

(x1a12

, x2a22

)ou II indique le deuxieme procede et aij est la quantite de l’input i necessaire pour uneproduction d’une unite d’output en utilisant le procede j. La production obtenue avec lepremier procede est alors:qI = min

(x1a11

, x2a21

)12

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Les procedes qui utilisent des quantites plus importantes de tous les inputs sont inefficaceset ne seront jamais employes. Il faut alors supposer qu’on a a12 > a11 et a22 < a21 ou lecontraire.

Supposons qu’il soit possible d’utiliser des combinaisons quelconque des deux procedes. Laproduction totale sera alors:

q = qI + qII

Dans ce cas, les isoquantes auront la forme representee sur le graphique PL.1.

Il a suffit d’ajouter un deuxieme procede pour retrouver des isoquantes ayant une formeconvexe. Un procede exige des coefficients de production fixes. La substitution d’un inputpar l’autre est toutefois possible. En effet, l’entreprise peut choisir le procede II qui utiliseune quantite inferieure de x2 et une plus grande quantite de x1 et, d’autre part, on peutchoisir une combinaison quelconque des deux procedes et ainsi les possibilites de substitutionsont plus grandes. La pente de la droite O-I est a21/a11 et celle de la droite O-II a22/a12.Il faut noter que tout point C sur la droite AB represente effectivement la meme productionque celle obtenue en A ou en B.

(Voir graphique PL.2)

Soit CD une droite parallele a OB et passant par le point C. De meme, soit CE une droiteparallele a OA et passant par C. En utilisant la propriete des triangles semblables, on peutecrire:ABOB = AC

CD = ACOE =⇒ OE

OB = ACAB

OE/OB = AC/AB est la fraction d’output produite avec le deuxieme procede.

La fraction produite avec le premier procede peut etre obtenue de la meme maniere:ABOA = CB

CE = CBOD =⇒ OD

OA = CBAB

OD/OA = CB/AB est la fraction d’output produite avec le premier procede.

Le premier procede utilise la quantite OF de x1 et le deuxieme OG. Le total est:

OG+OF = OG+GH = OH

puisque OD/OF = EC/GH et OD = EC.

Le premier procede utilise la quantite OL de x2 et le deuxieme OK. Le total est:

OL+OK = OL+ LM = OM

puisque OE/OK = DC/LM et OE = DC.

D’autre part, la somme des deux productions (CB/AB + AC/AB) donne une productionegale a l’unite. Par consequent, le point C se trouve sur l’isoquante correspondant a uneproduction unitaire.

(1) Maximisation de la production

Supposons que l’entreprise dispose d’une quantite limitee des deux inputs (xo1 et xo

2) et elledesire maximiser la production. Le probleme a resoudre est alors le suivant:

max q = qI + qII

S.C a11qI + a12q

II ≤ xo1

a21qI + a22q

II ≤ xo2

Graphiquement, il faut chercher l’isoquante la plus haute possible, compte tenu des con-traintes concernant les inputs (surface hachuree).

(Voir graphique PL.3)

13

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La solution est donnee par le point C ou deux unites d’output seront produites en utilisantune combinaison de deux procedes. Comme les deux inputs sont entierement employes, cesproductions sont obtenues en resolvant le systeme des contraintes ci-dessus. On trouve:qI = (1/D)(a22x

o1 − a12x

o2)

qII = (1/D)(a11xo2 − a21x

o1)

q = (1/D)[(a11 − a12)xo2 + (a22 − a21)xo

1]ou D = a11a22 − a12a21.Il est interessant d’examiner l’evolution de la production lorsqu’un input augmente. Sup-posons que x1 est fixe et x2 varie de 0 a x1

2.(Voir graphique PL.4)Si x2 ≤ xo

2 on emploie uniquement le deuxieme procede qui utilise peu d’unites de x2. Laquantite produite sera alors:q = x2/a22

Si x2 est compris entre xo2 et x1

2, on utilise une combinaison des deux procedes. La quantiteproduite sera:q = (1/D)(a11 − a12)x2 + (1/D)(a22 − a21)xo

1

En x12 on utilise uniquement le premier procede et la production sera q = xo

1/a11.L’evolution de la production totale et marginale peut etre representee de la maniere suivante:

(Voir graphique PL.5)La productivite marginale diminue mais la baisse se fait par paliers plutot que continuellementcomme dans les sections precedentes.(Voir graphique PL.6)(2) Minimisation du coutExaminons maintenant le probleme dual consistant a minimiser les couts pour une productiondonnee. La droite d’isocout est:x2 = C

w2− w1

w2x1

ou w1 et w2 sont les prix des facteurs:

(Voir graphique PL.7)Trois possibilites sont a considerer:(a) Si la droite d’isocout a une pente correspondant a la courbe (a), il faut utiliser le procedeI (le prix de x1 est eleve, il convient alors d’employer le procede I qui utilise peu de x1). Lecout total est:C = (a11w1 + a21w2)q(b) si la droite d’isocout a une pente correspondant a la courbe (b) (c’est-a-dire (a21 −a22)/(a12 − a11)), l’entreprise peut utiliser une combinaison quelconque des deux procedes.Le cout total est:C = {[αa11 + (1− α)a12]w1 + [αa21 + (1− α)a22]w2}qou α est la partie de l’output obtenue avec le premier procede (α = qI/q).(c) Si le prix de x1 continue a baisser et on a une pente correspondant a la courbe (c),l’entreprise emploie uniquement le deuxieme procede qui utilise peu de x2 (un input qui estdevenu cher par rapport a x1). Le cout total est:C = (a12w1 + a22w2)q

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L’entreprise remplace l’input x1 par l’input x2 mais cette substitution n’est pas continue. Ilfaut que la modification des prix soit importante pour qu’elle decide de changer de procedede fabrication.Si le prix du petrole augmente legerement, une entreprise ne change pas de procede de pro-duction. Toutefois, le quadruplement du prix du petrole a conduit plusieurs entreprises aemployer d’autres methodes de production utilisant le charbon, le gaz ou l’electricite.Il arrive parfois que l’entreprise dispose d’une quantite donnee des deux inputs. Dans cecas, si l’on veut augmenter la production au-dela d’une certaine limite, on est oblige de tenircompte de ces contraintes et ceci a un effet sur les couts.Supposons que l’entreprise dispose des quantites xo

1 et xo2 des deux inputs et le rapport des

prix des facteurs correspond a la pente de la droite (a) ci-dessus. La contrainte est representeepar la quantite de x2 disponible. L’entreprise peut produire q = xo

2/a21 unites d’output. Lecout est donne par l’equation ci-dessus.Pour produire davantage il faut utiliser une combinaison des deux procedes tout en produisantle maximum possible avec le premier procede qui est meilleur marche. La production estobtenue en resolvant le systeme:{a21q

I + a22qII = xo

2

qI + qII = q

La solution est:qI = xo

2a21−a22

− a22a21−a22

q

qII = a21a21−a22

q − xo2

a21−a22

α = qI

q = xo2

(a21−a22)q −a22

a21−a22

En introduisant cette derniere valeur dans l’equation ci-dessus on obtient la fonction de cout.ExempleLes coefficients de production sont a11 = 1 et a21 = 2 pour le procede I et a12 = 3, a22 = 1pour le deuxieme procede. L’entreprise dispose de 4 unites de x1 et de 3 unites de x2. Lesprix sont w1 = 1, w2 = 1.Le cout moyen du premier procede est:CM = a11w1 + a21w2 = 3 Frtandis que celui du deuxieme est:CM = a12w1 + a22w2 = 4 FrSi la quantite d’input n’etait pas limitee, l’entreprise utiliserait uniquement le premier procedequi est meilleur marche. Le cout de production estC = 3qet ceci correspond a la fonction de cout associee a une fonction de production ayant unrendement d’echelle constant.Avec le premier procede, on peut produire au maximum q = 3/2 = 1.5 unites d’output.Pour produire davantage, il faut utiliser une combinaison des deux procedes. Dans ce cas, lafonction de cout est:C = 5q − 3Comme on peut le constater, le cout marginal passe de 3 Fr a 5 Fr. Graphiquement on a:(Voir graphiques PL.8 et PL.9)Ici aussi, l’accroissement se fait par paliers.

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(3) Maximisation du profitLe rendement d’echelle est constant et il faut alors introduire des contraintes si l’on veutobtenir un niveau de production fini. Les contraintes considerees ici concernent les inputsdisponibles. On suppose que l’entreprise dispose des quantites xo

1 et xo2 des deux inputs.

Le profit unitaire obtenu avec le premier procede est π1 = p − CM1 et celui du deuxiemeπ2 = p− CM2. Le probleme est alors:max π = π1q

I + π2qII

S.C a11qI + a12q

II ≤ xo1

a21qI + a22q

II ≤ xo2

La solution graphique de ce probleme peut etre obtenue en utilisant des courbes d’isoprofit.La solution est donnee par le point qui satisfait les contraintes et se trouve sur la courbed’isoprofit la plus elevee.ExempleReprenons l’exemple considere ci-dessus et supposons que w1 = 40 ; w2 = 60 et le prix devente est de 260 Fr. Les profits unitaires sont alors 260 - 160 = 100 Fr avec le premier procedeet 260 - 180 = 80 Fr avec le deuxieme. On a alors:max π = 100qI + 80qII

S.C qI + 3qII ≤ 42qI + qII ≤ 3

En tracant la droite d’isoprofit π = 180 (on obtient ce profit avec 1 unite produite avec lepremier procede et 1 unite produite avec le deuxieme), on voit que la solution se trouve aupoint C.(Voir graphique PL.10)Ce point correspond a une production maximale, compte tenu des ressources disponibles. Ontrouve alors:qI = 1 ; qII = 1 ; π = 180Si le prix de vente est de 190 Fr, l’entreprise utilise uniquement le premier procede. Dansce cas la production sera q= 1.5 et le profit 45 Fr. Enfin, si les prix des facteurs sontw1 = 20, w2 = 80 on a la fonction de profit π = 10qI + 50qII et on utilise uniquement ledeuxieme procede. La production est q = 4/3 et le profit 66 2/3 Fr.(4) Generalisation au cas de v variables et h contraintesNous avons examine ci-dessus le cas de deux variables et deux contraintes afin de pouvoirpresenter une solution graphique qui souligne les similitudes avec les resultats obtenus dansles sections precedentes.Si l’on augmente le nombre de procedes, les isoquantes ressemblent de plus en plus a cellesd’une fonction de production avec substitution continue.Le meme resultat est obtenu avec les courbes de productivites marginales et celles de coutmarginal. On peut alors considerer la fonction de production avec substitution continuecomme le cas limite lorsque le nombre de procedes tend vers l’infini.S’il y a h inputs et v procedes, le probleme de maximisation du profit devient:max π = π1q

1 + π2q2 + · · ·+ πvq

v

S.C a11q1 + a12q

2 + · · ·+ a1vqv ≤ xo

1

a21q1 + a22q

2 + · · ·+ a2vqv ≤ xo

2

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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ah1q1 + ah2q

2 + · · ·+ ahvqv ≤ xo

h

q1, q2, . . . , qv ≥ 0ou qi designe l’output (q) obtenu avec le procede i. Il s’agit d’un probleme de programmationlineaire et nous verrons ci-dessous la methode utilisee pour trouver une solution.Jusqu’a present, nous avons considere que l’entreprise disposait de differents procedes pourproduire le meme output (q). Il faut maintenant examiner le cas plus general ou les procedessont utilises pour produire plusieurs biens. On parle alors d’activite plutot que de procede etl’etude de ces questions est appelee l’analyse des activites.Soit bij la quantite du i-ieme output produite en utilisant une unite de l’activite (ou procede)j. Si v est le nombre d’activites, la quantite totale de l’output i est:qi =

∑vj=1 bijzj

ou zj est le nombre d’unites de l’activite j.Soit aij la quantite du i-ieme input necessaire pour obtenir une unite de l’activite j. Laquantite totale de l’input i utilisee est:xi =

∑vj=1 aijzj

Le profit total sera alors:π = R− C =

∑ni=1 piqi −

∑hi=1 wixi

ou n est le nombre d’outputs et h le nombre d’inputs. En utilisant les expressions pour qi etxi donnees ci-dessus, on a:π =

∑ni=1 pi

∑vj=1 bijzj −

∑hi=1 wi

∑vj=1 aijzj

Le profit de l’activite j est:πjzj =

∑ni=1 pibijzj −

∑hi=1 wiaijzj

ou πj designe le profit d’une unite de cette activite. Le profit total est alors:π =

∑vj=1 πjzj

L’entreprise dispose d’une quantite donnee d’inputs. La maximisation du profit doit satisfaireles contraintes suivantes:a11z1 + a12z2 + · · ·+ a1vzv ≤ xo

1

a21z1 + a22z2 + · · ·+ a2vzv ≤ xo2

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

ah1z1 + ah2z2 + · · ·+ ahvzv ≤ xoh

On peut alors ecrire:max π =

∑vj=1 πjzj

S.C∑v

j=1 asjzj ≤ xos (s = 1, 2, . . . , h)

zj ≥ 0 (j = 1, 2, . . . , v)Nous avons ici le cas des productions jointes. D’autre part, l’entreprise peut substituer uneactivite a une autre et ceci conduit a une substitution indirecte d’un input a un autre.(5) La programmation lineaireLa programmation lineaire est une methode mathematique qui permet de resoudre des proble-mes de maximisation (ou minimisation) d’une fonction lineaire (appelee fonction objectif)sous une serie de contraintes lineaires. Elle peut donc etre utilisee pour les problemes examinesdans cette section.Nous avons resolu les problemes en utilisant un graphique avec les inputs sur les deux axes.Cette solution par l’espace des demandes d’inputs ne correspond pas au graphique utilise

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habituellement pour presenter la programmation lineaire. En effet, on prefere mettre lesdeux variables sur les axes plutot que les contraintes. Dans ce cas, le probleme suivant:max π = π1q

I + π2qII

S.C a11qI + a12q

II ≤ xo1

a21qI + a22q

II ≤ xo2

est resolu en utilisant un graphique ayant les procedes sur les deux axes. Tout d’abord, onconsidere les contraintes:qII ≤ xo

1a12

− a11a12

qI

qII ≤ xo2

a22− a21

a22qI

La droite 1© represente les points ou qII est egal a xo1/a12 − (a11/a12)qI . Par consequent, la

premiere contrainte est satisfaite lorsqu’on se trouve sur cette droite ou en dessous. La droite2© definit une contrainte similaire:(Voir graphique PL.11)La surface doublement hachuree represente la region ou les deux contraintes sont satisfaites.La droite d’isoprofit est:qII = πo

π2− π1

π2qI

Il faut alors chercher le point, dans la region doublement hachuree, qui se trouve sur la droited’isoprofit la plus elevee. Suivant la pente de cette droite, la solution peut etre le point C(comme dans le graphique ci-dessus) ou les deux contraintes sont saturees (les deux inputssont entierement utilises); A ou x1 n’est pas entierement utilise; B ou la deuxieme contrainten’est pas saturee ou enfin 0 si aucun procede n’est rentable.Si le nombre de variables est superieur a deux, il n’est pas possible de resoudre graphique-ment un probleme de programmation lineaire. Dans l’Appendice on presente les principauxresultats de cette technique et l’algorithme du simplexe qui permet de resoudre algebrique-ment ce type de problemes. On donne ici l’interpretation economique des resultats de laprogrammation lineaire.L’une des plus interessantes caracteristiques de la programmation lineaire est l’existence d’unprobleme dual qui peut etre formule en partant du probleme de depart, appele problemeprimal. Si le probleme primal est:max F = cT q S.C Aq ≤ b ; q ≥ 0ou c est un vecteur de coefficients (de la fonction objectif), q le vecteur des variables, A lamatrice h x v des coefficients des contraintes, b un vecteur de constantes (tous les vecteurssont des vecteurs-colonne); alors le probleme dual sera:min G = bT y S.C AT y ≥ c ; y ≥ 0ou y est un vecteur-colonne de variables (a preciser). D’autre part, F* = G* ou l’asterisqueindique qu’il s’agit de la valeur de la fonction objectif respective correspondant a la solutiondu probleme.Il convient enfin de mentionner le theoreme des ecarts complementaires qui exprime desconditions conformes a la logique economique. En termes algebriques, ces conditions sont:(cj −

∑hi=1 aijy

∗i )q∗j = 0 j = 1, 2, . . . , v

(bi −∑v

j=1 aijq∗j )y∗i = 0 i = 1, 2, . . . , h

ou v est le nombre de variable, h le nombre de contraintes (du probleme primal) et l’asteris-que indique qu’il s’agit de variables representant la solution du probleme respectif. De cesconditions on tire:

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(a) q∗j > 0 =⇒ cj −∑h

i=1 aijy∗i = 0

(b) y∗i > 0 =⇒ bi −∑v

j=1 aijq∗j = 0

(c)∑h

i=1 aijy∗i > cj =⇒ q∗j = 0

(d)∑v

j=1 aijq∗j < bi =⇒ y∗i = 0

La condition (a) dit qu’un procede (ou une activite) utilise implique une contrainte saturee(il y a egalite plutot qu’inegalite) dans le dual. La condition (b) indique qu’une variablepositive dans le dual implique une contrainte saturee dans le primal. La condition (c) ditqu’une contrainte non saturee dans le dual implique que le procede n’est pas utilise. Enfin,la condition (d) indique qu’une contrainte non saturee dans le primal implique une variableegale a zero dans le dual.Le probleme dual a toujours une interpretation economique interessante et ceci peut etreillustre en prenant les problemes examines ci-dessus. Le probleme dual de la maximisationdu profit est:min G = xo

1y1 + xo2y2

S.C a11y1 + a21y2 ≥ π1

a12y1 + a22y2 ≥ π2

Comme G∗ = F ∗ = π∗ est exprime en francs et xo1, x

o2 sont des quantites, les variables y1 et

y2 correspondent a des prix. On les appelle des prix implicites .Supposons que l’entreprise desire connaıtre la partie du profit due aux differents inputs. Ellecherche des prix comptables (ou prix implicites) de telle sorte que tout le profit soit imputeaux inputs. Comme le profit unitaire du premier procede est π1 et les quantites des inputsutilises pour une unite de ce procede sont a11 et a21, la premiere contrainte du problemedual exprime le lien entre les prix comptables et le profit du premier procede. En effet, sice procede est utilise, la condition (a) indique que le profit calcule avec les prix comptablescorrespond au profit effectif du procede. D’autre part, si le cout d’un procede, exprime enutilisant les prix implicites des ressources utilisees, est superieur au profit, le procede n’estpas employe (condition (c)). Les memes relations sont valables pour la deuxieme contrainte.L’egalite entre F ∗ et G∗ assure que tout le profit a ete impute aux inputs. Enfin, la condition(d) indique qu’une quantite inutilisee de l’input implique que le prix implicite est nul.Comme on peut le constater, tous ces resultats sont conformes aux principes economiques.Un procede non employe n’implique pas que son profit soit nul mais uniquement que lesinputs (qui sont rares) peuvent etre utilises de maniere plus rentable avec un autre procede.Ceci correspond a la notion de cout d’opportunite, ou produit de l’emploi alternatif, que leseconomistes utilisaient bien avant la decouverte de la

programmation lineaire. Le probleme dual, obtenu avec des techniques exclusivement mathe-matiques, revelent l’existence de criteres economiques tres importants et qui doivent etresatisfaits.ExempleOn a presente ci-dessus l’exemple suivant de maximisation du profit:max π = 100qI + 80qII

S.C qI + 3qII ≤ 42qI + qII ≤ 3

Le graphique utilise pour trouver la solution avait les deux inputs sur les axes. Si l’on prendun graphique avec les deux quantites, on a le graphique PL.11. et la solution est qI = 1,

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qII = 1, π = 180.Avec la fonction de profit π = 30qI + 10qII la solution est au point A (qI = 1.5, qII = 0, π =45). Enfin, la fonction π = 10qI +50qII donne la solution au point B (qI = 0, qII = 4/3, π =662/3).Examinons le dual du cas A. On a:min G = 4y1 + 3y2S.C y1 + 2y2 ≥ 30

3y1 + 1y2 ≥ 10(Voir graphique PL.12)L’equation representant la fonction objectif est:y2 = Go/3− (4/3)y1Il faut chercher ici la droite la plus proche de l’origine, compte tenu des deux contraintes asatisfaire (region doublement hachuree). La solution est:y∗1 = 0 ; y∗2 = 15 ; G∗ = 45Comme la premiere contrainte du primal n’est pas saturee, le prix implicite du premier inputest egal a zero. D’autre part, le cout du deuxieme procede, calcule en prenant les priximplicites, est superieur a son profit et alors ce procede n’est pas utilise.Le dual du probleme de la maximisation de la production est:min G = xo

1y1 + xo2y2

S.C a11y1 + a21y2 ≥ 1a12y1 + a22y2 ≥ 1

On peut interpreter ce probleme de la maniere suivante. L’entreprise desire vendre les inputset obtenir en paiement des unites d’output. La quantite minimale qu’elle exige corresponda l’output qu’elle peut obtenir elle-meme. Les deux contraintes expriment cette condition.Les prix calcules (prix en termes d’unites d’output) donnent une quantite d’output totale quisera egale a celle que l’entreprise peut produire (puisque G∗ = F ∗ = q∗ ). Par ailleurs, sil’entreprise emploie un procede, il y aura egalite entre sa production et l’output obtenu envendant les inputs utilises par ce procede (condition (a)). Les autres conditions sont similairesa celles examinees ci-dessus dans le probleme dual de la maximisation du profit.Une autre interpretation, qui montre le lien avec la productivite marginale, peut etre donnee.De la relation:q∗ = xo

1y1 + xo2y2

on tiredq∗ = y∗1dx

o1 + xo

1dy∗1 + y∗2dx

o2 + xo

2dy∗2

Prenons maintenant une petite variation de x1 et supposons que la solution du dual reste lameme. Comme les autres variations sont nulles, on a:∂q∗

∂xo1

= y∗1

et ceci correspond a la productivite marginale de l’input x1. La variable y∗1 represente le prixa payer (en termes d’unites d’output) pour une unite supplementaire de l’input x1. La memecondition est valable pour l’autre input. Par consequent, le rapport des prix implicites estegal au taux marginal de substitution:

TS =∂q

∂x1∂q

∂x2

= y∗1y∗2

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Le probleme primal n’est pas necessairement un probleme de maximisation. Par exemple,Au chapitre I, Stigler avait utilise les caracteristiques des biens afin d’obtenir un regimealimentaire equilibre au cout le plus bas. Il s’agit donc de minimiser le cout des biens achetessous la contrainte d’une quantite minimale de caracteristiques. Le probleme est, en utilisantla programmation lineaire:min C = wT q S.C Bq ≥ d

ou w est un vecteur-colonne de prix, d un vecteur-colonne de quantites minimales de car-acteristiques et B la matrice des caracteristiques.(6) Dualite et decentralisation des decisions economiquesLa programmation lineaire peut etre utilisee pour la planification economique. L’objectifpourrait etre la maximisation de la production nationale (ou de la valeur ajoutee: le produitinterieur brut), compte tenu des ressources disponibles. On doit evidemment se limiter auxprincipales branches economiques si l’on veut que le probleme puisse etre resolu (meme enutilisant les ordinateurs les plus puissants, il est impossible de resoudre un probleme ayantplusieurs millions de variables). Evidemment, il faut aussi supposer que les contraintes soientlineaires. La solution donnerait les quantites que chaque branche doit produire et on doittransmettre a toutes les branches les valeurs obtenues. Par contre, la solution du problemedual donne les prix implicites. Il suffit alors d’indiquer ces prix, qui sont les memes pourtoutes les branches, et laisser aux entreprises la determination des quantites a produire. Il yaurait ainsi une decentralisation des decisions economiques. D’autre part, un profit negatifindique que l’entreprise n’a pas utilise les ressources de maniere efficiente (theoreme des ecartscomplementaires) et on peut ainsi verifier la maniere dont les entreprises sont gerees.L’application de la programmation lineaire dans les pays socialistes a engendre une polemi-que entre les techniciens de la planification et les economistes orthodoxes qui enseignaientla theorie marxiste de la production. Le theoreme des ecarts complementaires revele que laprogrammation lineaire implique une allocation des ressources correspondant au mecanismedes prix d’une economie de marche et ceci n’est pas compatible avec la theorie economiquemarxiste. En particulier, l’attribution d’un prix positif a toute ressource rare n’est pas con-forme a la theorie de la valeur-travail qui est le fondement de l’ideologie marxiste.

Graphique PL.1

0 1 2 3 4

1

2

3

4

x1

x2 I

II

q = 1

A

B

a11 a12

a22

a21

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aij ; i = input ; j = procede

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(a11 = 1 ; a12 = 3) (a21 = 2 ; a22 = 1)

qI = min( x1a11

, x2a21

)

qII = min( x1a12

, x2a22

)

Graphique PL.2

0 1 2 3 4

1

2

3

4

x1

x2 I

II

q = 1

A

B

C

HGF

K

M

L D

E

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............................................

...........................................

qI = min( x1a11

, x2a21

)

qII = min( x1a12

, x2a22

)

C = 0.5qI + 0.5qII

Maximisation de la production (PL.3)

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

1

2

3

4

5

6

7

8

x1

x2 I

II

q = 2

q = 1

C

xo1

xo2 C

..............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

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max q = qI + qII

qI + 3qII ≤ x1 (a11 = 1 ; a12 = 3)

2qI + qII ≤ x2 (a21 = 2 ; a22 = 1)

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Graphique PL.4

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18

123456789

101112

x1

x2 I

II

q = 2q = 1

xo1

xo2

x12

...............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

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max q = qI + qII

qI + 3qII ≤ x1 (a11 = 1 ; a12 = 3)

2qI + qII ≤ x2 (a21 = 2 ; a22 = 1)

Graphique PL.5

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14

12345678

x2

q

..............................

..............................

.......................................................

....................................................................

....................................................................

....................................................................

....................................................................

...............................................................

Graphique PL.6

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 140.00.20.40.60.81.0

x2

∂q∂x2

..........................................................

..................................................................................................................................................................................................................................................................................................

..........................................................

Minimisation des couts (PL.7)

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0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

1

2

3

4

5

6

7

8

x1

x2 I

II

q = 2

a

b c........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

..........................................

..........................................

..........................................

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min C = w1x1 + w2x2

(a) C = (a11w1 + a21w2)q

(b) C = {[αa11 + (1− α)a12]w1 + [αa21 + (1− α)a22]w2}q

(c) C = (a12w1 + a22w2)q

Graphique PL.8

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0

12345678

q

C

.......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Graphique PL.9

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.00123456

q

Cm

..............................................................................................................................................................................................

................................................................

Maximisation du profit (PL.10)

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0 2 4 6 8 10 12 14 16 18

123456789

101112

x1

x2 I

II

q = 1q = 2

q = 4q = 5

xo1

xo2

π = 400

π = 180

...............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

.......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

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. . . . . . . . .

max π = 100qI + 80qII

qI + 3qII ≤ 4 (a11 = 1 ; a12 = 3)

2qI + qII ≤ 3 (a21 = 2 ; a22 = 1)

Maximisation du profit (PL.11)

0 1 2 3 4 5

1

2

3

4

qI

qII

A

B

C

....................................................................................................................................................................................................................................................................................................

..........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

....................

max π = 100qI + 80qII

1© qI + 3qII ≤ 4 → qII = 4/3− (1/3)qI

2© 2qI + qII ≤ 3 → qII = 3− 2qI

Probleme dual (PL.12)

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0 2 4 6 8 1012141618202224262830

123456789

101112131415

y1

y21©

...............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

....................................................................................................................................................................................................................................................................................

...................................

min G = 4y1 + 3y21© y1 + 2y2 ≥ 30 → y2 ≥ 15− 0.5y12© 3y1 + y2 ≥ 10 → y2 ≥ 10− 3y1

y∗1 = 0 ; y∗2 = 15 ; G∗ = 45

Production en situation d’incertitude

Nous avons suppose jusqu’ici que l’entreprise connaissait le prix de vente de ses produits.Comme celui-ci est fixe par le marche en fonction de la demande et de l’offre globales,l’entreprise doit determiner la quantite a produire en considerant le prix anticipe. Elle doitsouvent envisager plusieurs possibilites et ceci se traduit par une serie de prix avec leursprobabilites. Nous supposons ici que l’entreprise produit un seul bien. Soit Pi la probabilited’obtenir le prix pi. Le prix espere est alors:E(p) =

∑Ni=1 Pi.pi = pe

ou N est le nombre d’etats de la nature. Si l’entreprise maximise le profit espere, il suffitd’introduire la valeur pe, au lieu de p, dans les resultats des sections precedentes. En partic-ulier, le maximum de profit espere est obtenu lorsque le prix espere est egal au cout marginal(pe = Cm).

Prendre le profit espere signifie etre neutre vis-a-vis du risque. Si l’entreprise a de l’aversionvis-a-vis du risque, il faut prendre alors une fonction concave representant l’utilite du profit.Dans ce cas, la maximisation de l’utilite esperee du profit:E[u(π)] =

∑Ni=1 Piu(πi) =

∑Ni=1 Piu[piq − C(q)]

implique la condition de premier ordre suivante:d E[u(π)]

dq =∑Piu

′[πi][pi − C ′(q)] = 0

Si l’utilite marginale est constante (neutralite vis-a-vis du risque), on retrouve le resultatobtenu ci-dessus. Soit qe la quantite produite dans ce cas.Supposons maintenant que les differents etats de la nature ont ete classes de telle sorte que pi

et πi augmentent avec i. Si l’utilite marginale est decroissante (aversion vis-a-vis du risque),

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la condition de premier ordre sera satisfaite pour une valeur plus faible de q. Par consequent,l’aversion vis-a-vis du risque conduit a une baisse de la quantite produite.

Si le degre absolu d’aversion vis-a-vis du risque est decroissant, l’entreprise reduit la produc-tion lorsque les couts fixes augmentent. Ces couts fixes correspondent a un profit negatif etceci explique l’effet sur la production. Contrairement au cas en situation de certitude, lescouts fixes ont une influence sur l’offre de l’entreprise.

Le modele intertemporelComme pour la theorie du consommateur, on peut construire un modele intertemporel enajoutant plusieurs periodes au modele statique. On aurait alors le probleme suivant:max π =

∑Tt=1

∑mj=1 pjt qjt( 1

1+i )t−1

S.C. φ(q11, . . . , qm1; . . . , q1T , . . . , qmT ) = 0ou φ est la fonction de production implicite, qjt les quantites produites (si > 0) et les inputssont representes par des valeurs negatives (qjt < 0). Du lagrangien:L =

∑∑pjt qjt( 1

1+i )t−1 + λφ(q11, . . . , qmT )

on tire les conditions de premier ordre suivantes:{ ∂L∂qjt

= pjt( 11+i )

t−1 + λφjt = 0∂L∂λ = φ(q11, . . . , qm1; . . . , q1T , . . . , qmT )

j = 1, 2, . . . ,m ; t = 1, 2, . . . , TDe ces conditions on tire les relations suivantes:pjt(

11+i )t−1

phs( 11+i )s−1 = φjt

φhs

h, j = 1, 2, . . . ,m ; t, s = 1, 2, . . . , TPar consequent, il faut qu’il y ait egalite entre les rapports des prix actualises et les taux desubstitution technique (si h et j sont des inputs) ou les taux de transformation des produits(si h et j sont des outputs).Cette formulation n’est pas tres realiste car elle suppose des possibilites de substitution in-tertemporelle qui n’existent pas. Il vaut mieux developper un modele qui considere explicite-ment l’existence de periodes futures.La theorie economique qui etudie ces questions est appelee la theorie du capital ou par capitalon entend les fabriques, les machines et les stocks de biens (capital reel). On procede souventa des investissements (augmentation du capital) afin d’augmenter la productivite. L’exempleclassique est celui de Robinson Crusoe qui, au lieu de continuer a pecher avec les mains,construit une barque et des outils de peche. Grace a cet investissement, il peut obtenir uneplus grande quantite de poissons. Cette production est obtenue en deux etapes (il faut d’abordconstruire la barque) et exige aussi une certaine quantite de capital (la barque et les outilsde peche). En general, la quantite de capital augmente lorsque les techniques de productiondeviennent plus indirectes. On dit alors que la production devient plus capitalistique. Cettecaracteristique des methodes indirectes de production a ete soulignee par Bohm-Bawerk.Les methodes indirectes de production impliquent une periode de production plus longue queles methodes directes. S’il faut construire la barque, il est impossible d’obtenir immediatementdes poissons. La periode de production devient encore plus longue si le bois pour la barqueest prepare par une fabrique.Lorsque les investissements ont lieu a des periodes differentes, Bohm-Bawerk propose decalculer la periode moyenne de production en prenant le rapport:

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M =∑T

t=1tIt∑T

t=1It

ou T est le nombre de periodes et It l’investissement a la periode t. Cette definition, purementtechnique, n’est pas entierement satisfaisante. En effet, le deplacement d’un investissementd’une annee a l’autre, au debut ou a la fin de la periode de production, modifie M de lameme maniere. En d’autres termes, la distance de ce changement par rapport au debut del’investissement n’influence pas le calcul de M .On peut representer la courbe intertemporelle des possibilites de production de Crusoe (voirgraphique). Par exemple, si tout le ble est consomme a la periode 1 (c1 = OB), on auraune production et une consommation nulle a la periode 2. Par contre, si la quantite DB est“epargnee” afin d’etre utilisee comme semence pour l’annee suivante, on aura une productionOF a la periode 2. Un accroissement supplementaire de l’investissement (GD) conduira a uneaugmentation de la production a la periode 2. Cette augmentation (FH) sera superieure al’accroissement de l’investissement. On peut alors dire qu’il y a un taux d’interet techniquequi est donne par l’expression FH/GD - 1.Le montant que Robinson Crusoe consacre a l’investissement depend de ses preferences parrapport aux consommations presentes et futures.Si Robinson Crusoe peut vendre ou acheter du ble sur un marche concurrentiel et emprunterde l’argent au taux d’interet i, la consommation a la periode 1 peut etre plus grande que laproduction. Soit L−L′ la droite tangente a la courbe des possibilites de production et ayantune pente egale a (1+i) en valeur absolue. Le point E1 donne les quantites consommees et E2

les quantites produites. Dans ce cas, il y aura un emprunt qui sera rembourse en periode 2(y compris l’interet). A l’equilibre, il y a egalite entre le taux d’interet, le taux de preferencepour le temps et le taux d’interet technique. Grace a l’existence des marches, l’utilite deRobinson Crusoe est plus elevee qu’en cas d’autarcie.Comme on peut le voir, les decisions concernant les quantites a produire peuvent etre separeesde celles concernant les quantites a consommer. Dans le premier cas, on maximise la valeurde la production en choisissant la droite LL′ la plus elevee possible. Ensuite, la recetteainsi obtenue est utilisee pour acheter le complexe de biens prefere. Cette separabilite desdecisions de production et de consommation peut expliquer l’attribution des decisions deproduction aux entreprises.

Le choix des investissements

Les entreprises effectuent des investissements dans le but d’accroıtre les capacites de produc-tion. Par ailleurs, il arrive souvent que la production exige un temps plus ou moins grandentre le moment ou le premier input est employe et le jour ou le produit fini est vendu.Les differents projets de production impliquent un plan d’investissement precis. Le choixentre les differents projets dependra du profit escompte.L’investissement peut avoir lieu au debut de la periode de production ou alors s’etaler dansle temps. La recette est souvent obtenue a la fin mais peut aussi etre repartie sur plusieursperiodes. On examinera tout d’abord le cas le plus simple: un investissement unique au debutde la periode de production et une recette unique a la fin (on dit en anglais qu’il s’agit d’unprobleme de point input / point output). Les arbres qu’on plante afin d’obtenir du bois sontun exemple typique de ce cas. On peut aussi mentionner le whisky ou le vin qu’on laissevieillir.Soit R(T) la recette obtenue en vendant le bois au temps T. L’entreprise choisit la valeur deT qui maximise le profit actualise:

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πA = R(T )e−iT − Io

ou Io est l’investissement initial et i le taux d’escompte. On suppose que l’escompte estcontinu mais on obtient un resultat similaire en prenant une variable discrete pour le temps.La condition de premier ordre:dπA

dT = e−iTR′(T )− ie−iTR(T ) = 0conduit a la relation suivante, appelee la formule de Jevons:

i = R′(T )R(T )

Le taux d’interet doit etre egal au rapport entre la recette marginale et la recette totale.Graphiquement, le moment ou le bois doit etre vendu correspond au point de tangence entrela courbe de la recette totale et une courbe donnant la valeur capitalisee au temps T d’uncertain montant dont le rendement est de i% (par exemple, a1(T ) = a1(0)eiT ).En d’autres termes, le profit est maximise lorsque la difference entre la valeur actuelle de larecette et le cout de l’investissement est la plus grande. Ce maximum est obtenu en vendantle bois au temps T ∗. Si le produit de cette vente est place sur le marche des capitaux au tauxd’interet i, on a un montant qui croıt plus vite que la recette obtenue en vendant le bois plustard. Par contre, avant T ∗ la courbe R(T) croıt plus vite que celle d’un montant equivalentplace sur le marche des capitaux.La condition de deuxieme ordre est:d2πA

dT 2 = e−iTR′′(T )− 2ie−iTR′(T ) + i2e−iTR(T ) < 0En utilisant la condition de premier ordre, on peut ecrire:R(T )R′′(T )− [R′(T )]2 < 0On trouve l’effet d’une variation du taux d’escompte en prenant la differentielle de la conditionde premier ordre. On obtient:dTdi = R(T )

R′′(T )−iR′(T )

La condition de deuxieme ordre implique que cette expression est negative. Par consequent,le bois sera vendu plus tot si le taux d’escompte augmente.Prenons maintenant le cas d’un investissement continu et d’une recette unique a la fin de laperiode de production. La valeur actuelle du profit est:

πA = R(T )e−iT −∫ T

0I(t)e−itdt

ou I(t) est l’investissement a la periode t.La condition de premier ordre conduit a la relation suivante:

i = R′(T )−I(T )R(T )

L’effet d’une variation du taux d’escompte peut etre obtenu de la meme maniere que dansle cas precedent. Une hausse de ce taux conduit aussi ici a une diminution de la periode deproduction.Le cas plus general de plusieurs investissements et plusieurs recettes sera analyse en prenantune variable discrete pour le temps.Soient Io, I1, . . . , IT les investissements et Ro, R1, . . . , RT les recettes d’un projet donne. Tressouvent, au debut de la periode les recettes sont nulles et a la fin les investissements sontnuls. Dans ce cas, on aura Ro = 0 et IT = 0.La valeur actuelle du profit est:

πA =∑T

t=0(Rt−It)(1+i)t

Si cette valeur est positive, l’entreprise a interet a executer ce projet.

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On calcule souvent le taux de rentabilite interne d’un projet. Ce taux (ρ) correspond autaux d’escompte qui rend nulle la valeur actuelle du profit:∑T

t=0(Rt−It)(1+ρ)t = 0

On propose alors d’executer le projet si le taux de rentabilite interne est superieur au tauxd’escompte. Cette regle presente des inconvenients serieux et conduit parfois a une decisionfausse. En effet, l’equation ci-dessus peut avoir plusieurs solutions. Le nombre maximum desolutions positives est egal au nombre de changements de signe (regle de Descartes). Lorsqueles solutions sont multiples, il faudrait preciser le taux de rendement interne a utiliser.

La decision basee sur la valeur actuelle du projet ne presente pas ces inconvenients et peutetre obtenue sans aucune difficulte.

Si le taux d’escompte change, la valeur actuelle du profit se modifie tandis que le taux derendement interne reste le meme. Aujourd’hui, cet inconvenient de la valeur actualisee n’estplus tres important. Il suffit d’effectuer les calculs a l’aide d’un ordinateur et en utilisant unprogramme qui permet de choisir le taux d’escompte.

Exemple

Soient les couts et les recettes anticipes suivants:

Io = 2000 , I1 = 700 , I2 = 2400 ; Ro = 0 , R1 = 5000 , R2 = 90

Le taux de rendement interne est obtenu en calculant les racines de l’equation:

−2000 + 4300(1+ρ) −

2310(1+ρ)2 = 0

Comme il y a deux changements de signe, on peut avoir deux racines positives. Les solutionsont ρ1 = 5% et ρ2 = 10%.

L’entreprise a interet a executer ce projet lorsque le taux d’escompte est compris entre 5%et 10% car dans ce cas la valeur actuelle du profit est positive.

Le retour des techniques

La variation du taux d’interet peut parfois conduire a des changements tres particuliers destechniques de production. Des techniques, utilisees lorsque le taux d’interet est bas, peuventredevenir avantageuses a un taux d’interet eleve. On parle alors de retour des techniques(reswitching en anglais). Il faut que la fonction de production ait une forme speciale pouravoir un retour des techniques. Avec une fonction de production neo-classique, ce cas ne sepresente pas. L’exemple suivant illustre le retour des techniques.

Exemple

Le procede A exige un premier investissement de 100 Fr 16 annees avant la vente du produitet un deuxieme investissement de 15000 Fr l’annee ou le produit est vendu. Le procede Bdemande un investissement de 10000 Fr deux annees avant la vente et 3000 Fr au momentde la vente. Le premier procede pourrait representer la fabrication de meubles anciens enutilisant le bois qu’on laisse vieillir pendant 16 ans. Le deuxieme procede serait alors lafabrication et le vieillissement artificiel du bois deux ans avant la vente.

Les couts totaux, en fonction du taux d’interet, sont:i procede A procede B

10% 15’459.50 15’100.–

20% 16’848.80 17’400.–

30% 21’654.20 19’900.–

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Si le taux d’interet passe de 10% a 20%, le procede A devient meilleur marche. On pourraitexpliquer ce changement par l’investissement important que le procede B exige deux anneesavant la vente. Toutefois, une nouvelle hausse du taux d’interet devrait rendre le procede Aencore meilleur marche. Les chiffres ci-dessus indiquent que le resultat est juste le contraire.Si le taux d’interet est de 30%, le cout du procede B est plus bas. Ce procede redevientmeilleur marche. Il y a alors un retour des techniques.Cet exemple montre qu’une hausse du taux d’interet peut conduire a un retour des techniques.Cette possibilite a des consequences importantes sur certains resultats de la theorie du capitalet de la distribution des revenus.

Choix intertemporel (Robinson Crusoe)

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

123456789

1011

c1

c2

A

BD

G

H

E1

E2

F

L

L′

.........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

.............................................................................................................................................................................................................................................................................................

Point input, point output

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

1

3

5

7

9

11

13

15

t

V

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