Interaction entre un peptide de B-lactoglobuline bovine (B ...between β-lg f1-8 peptide and α-la....
Transcript of Interaction entre un peptide de B-lactoglobuline bovine (B ...between β-lg f1-8 peptide and α-la....
i
Interaction entre un peptide de β-lactoglobuline bovine (β-lg f1-8) et les protéines du lactosérum
Le cas de l’α-lactalbumine
Mémoire
GABRIEL RATTÉ
Maîtrise en sciences et technologie des aliments Maître ès Sciences (M. Sc.)
Québec, Canada
© Gabriel Ratté, 2013
ii
iii
Résumé
Des observations préliminaires ont montré que l’auto-assemblage d’un peptide issu
de l’hydrolyse trypsique de la β-lactoglobuline (β-lg f1-8) modifiait la composition de
mélanges de protéines de lactosérum, particulièrement en α-lactalbumine (α-la) soluble. Le
but du présent travail était de démontrer l’occurrence d’interactions entre le peptide β-lg f1-
8 et l’α-la. L’étude de l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 en présence d’α-la à 25
et 55 oC a permis d’observer que l’ajout d’α-la à un hydrolysat trypsique permettait de
retarder la floculation du peptide à 55 oC. La mise en contact d’α-la avec le peptide β-lg f1-
8 a permis de modifier le profil de solubilité de la protéine à différents pH, mais pas son
profil de dénaturation thermique obtenu par calorimétrie différentielle à balayage (DSC).
Ces observations suggèrent que le peptide β-lg f1-8 interagit avec l’α-la par le biais
d’interactions hydrophobes et qu’il pourrait être utilisé dans le développement de nouvelles
stratégies de fractionnement de mélanges protéiques.
v
Abstract
Preliminary observations showed that the self-assembly capacity of a β-
lactoglobulin peptide obtained from trypsin hydrolysis (β-lg f1-8) could modify the
composition of whey protein mixtures, mainly by reducing the amount of soluble α-
lactalbumin (α-la). The goal of this study was to demonstrate the occurrence of interactions
between β-lg f1-8 peptide and α-la. A study of the peptide self-assembly process in
presence of α-la at 25 and 55 oC showed that the addition of α-la to the original tryptic
hydrolysate delays the flocculation of peptide β-lg f1-8 at 55 oC. Adding β-lg f1-8 peptide
to α-la modified the solubility profile of the protein at various pH, but its thermal unfolding
profile obtained by differential scanning calorimetry (DSC) remained unchanged. All of
these observations suggest that the peptide β-lg f1-8 can interact with the α-la via
hydrophobic interactions and could be used for developing new strategies for the
fractionation of protein mixtures.
vi
vii
Avant-‐propos
Ce mémoire est composé de sept chapitres. Après une introduction sur les éléments
importants du sujet (chap. 1), le mémoire présente une revue de littérature traitant du
lactosérum et de ses principaux constituants, de la structure et des principales propriétés de
l’α-lactalbumine (α-la), de la production et des caractéristiques du peptide β-lg f1-8 et pour
finir, des principaux types d’interactions protéines-peptides. Par la suite, l’hypothèse de
recherche est formulée, de même que les principaux objectifs fixés pour la vérifier (chap.
3). Viennent par la suite les deux sections où sont présentés les protocoles expérimentaux et
les résultats obtenus durant le projet de maîtrise (chap. 4 et 5). Tous les résultats de travaux
qui sont présentés dans ces sections ont été obtenus par l’auteur, parfois avec une assistance
technique par un professionnel de recherche ou un stagiaire. Pour terminer, le mémoire
présente une discussion générale permettant de résumer l’ensemble des résultats et de
valider l’hypothèse (chap. 6), suivie d’une section sur les perspectives possibles de ces
travaux (chap. 7). La dernière section du mémoire (chap. 8) est constitué d’une
bibliographie décrivant l’ensemble des références citées.
La première partie expérimentale (chap. 4) s’intitule « Effet de la température sur
l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 en présence d’α-lactalbumine ». Ces travaux
visaient à vérifier, par une analyse turbidimétrique, si la température et la présence d’α-la
avait un impact sur le processus d’auto-assemblage menant à la floculation du peptide β-lg
f1-8 durant sa concentration par osmose inverse.
La deuxième partie expérimentale (chap. 5) s’intitule « Effet de la présence du
peptide β-lg f1-8 sur les propriétés physicochimiques de l’α-lactalbumine ». Ces travaux
ont été effectués dans le but de vérifier si la mise en contact entre l’α-la et le peptide β-lg
f1-8 pouvait provoquer un changement au niveau de certaines propriétés physicochimiques
de la protéine, soit sa solubilité à différents pH et son profil de dénaturation thermique
obtenu par calorimétrie différentielle à balayage (DSC).
ix
Remerciements
Pour commencer, je veux remercier le Dr Yves Pouliot, mon directeur de recherche,
pour m’avoir accepté au sein de son équipe et m’avoir fait confiance pour ce projet au cours
des deux dernières années. Le fait d’avoir commencé à m’accorder du temps et un projet
d’exploration lors de mon baccalauréat et de m’avoir permis de conserver et continuer ce
projet durant ma maîtrise m’a permis de m’y accrocher et d’apprécier mon expérience au
maximum. Un énorme merci pour les conseils, les réponses à mes nombreuses questions et
surtout, d’avoir continué de croire en ce que je faisais, même lorsque je semblais m’égarer
dans mes réflexions. Son approche humaine et sincère n’aura fait que rendre cette
expérience plus agréable. Également, je voudrais remercier la Dre Sylvie Gauthier, ma
codirectrice, pour ses conseils et sa rigueur qui m’ont permis de mieux comprendre les
détails et éléments clés de la recherche et ainsi rendre ma formation encore plus complète.
Une pensée également pour l’expérience en tutorat qu’elle m’a permis d’acquérir, puisque
ces deux sessions passées à superviser un cours m’auront permis de mieux cerner mes
forces et intérêts pour la suite de ma carrière.
Je souhaiterais également remercier le Dr Jean Amiot, qui a accepté de participer à
l’évaluation de mon mémoire.
J’aimerais également remercier mes collègues et amis du laboratoire 2322, passés et
présents. Fred, Valérie, Marie-Andrée, Maxime, Mélissa, Madani, Mimose, Daniel, Anne et
Maëlle, merci pour votre bonne humeur, les discussions et les rires échangés au cours des
années et pour nos sorties et moments pris ensemble pour décrocher. Un merci spécial à
Sophie et Dany, les deux stagiaires très motivés que j’ai eu la chance de superviser, qui en
plus de m’aider dans mes travaux, m’ont fait apprécier encore plus mon expérience en
recherche.
Je souhaiterais également remercier le personnel du département et tout
spécialement ceux qui m’ont aidé dans mes manipulations en laboratoire, soit Diane
x
Gagnon, Alain Gaudreault, Mélanie Martineau et Pascal Cliche. Je voudrais également
remercier la Dre Chrisina Ratti pour m’avoir permis d’utiliser son appareil DSC et pour son
aide dans mes analyses.
J’aimerais également remercier Mme Anne-François Allain et le Dr Joseph Arul,
pour m’avoir tous les deux permis d’acquérir de l’expérience lors de mes contrats
d’auxiliaire d’enseignement, contrats qui ont beaucoup aidé à alimenter ma passion pour
l’enseignement et la communication scientifique.
Un gros merci également aux autres étudiants de l’ACCESTA et tout
particulièrement à Élodie Rozoy, une amie précieuse depuis le baccalauréat et dont les
conseils m’auront été d’une grande aide au cours des deux dernières années.
J’aimerais finalement remercier mes parents et amis qui m’ont soutenu et encouragé
tout au long de ma maîtrise. Leur support moral, même s’il est souvent venu avec une part
d’incompréhension de mon sujet, a été d’une grande importance durant ces deux années.
Une pensée toute spéciale pour ma copine, Isabelle, sans qui la motivation aurait
probablement été plus ardue à trouver dans les moments plus difficiles.
xi
« Comme le corps s'accroît par les aliments, notre esprit s'accroît par les idées. »
Johann Gottfried von Herder, poète et théologien allemand
xiii
Table des matières Résumé ............................................................................................................................................... iii
Abstract ................................................................................................................................................ v
Avant-propos ...................................................................................................................................... vii
Remerciements .................................................................................................................................... ix
Table des matières ............................................................................................................................ xiii
Liste des tableaux ............................................................................................................................... xv
Liste des figures ............................................................................................................................... xvii
Liste des abréviations ........................................................................................................................ xix
1. Introduction .................................................................................................................................. 1
2. Revue de littérature ...................................................................................................................... 3
2.1 Le lactosérum ............................................................................................................................. 3 2.1.1 Production du lactosérum ................................................................................................... 3 2.1.2 Composition du lactosérum ................................................................................................ 4
2.1.2.1 Les principaux constituants ......................................................................................... 4 2.1.2.2 Les protéines du lactosérum ........................................................................................ 5
2.1.3 Séparation des constituants du lactosérum ......................................................................... 6
2.2 L’α-lactalbumine ........................................................................................................................ 9 2.2.1 Structure de la protéine ....................................................................................................... 9 2.2.2 Propriétés physicochimiques ............................................................................................ 11
2.2.2.1 Impact de la température ........................................................................................... 11 2.2.2.2 Impact du pH ............................................................................................................. 14 2.2.2.3 Potentiel d’interactions avec des ligands ................................................................... 15
2.2.3 Propriétés biologiques ...................................................................................................... 18
2.3 Le peptide β-lg f1-8 .................................................................................................................. 19 2.3.1 La β-lactoglobuline ........................................................................................................... 19 2.3.2 Description générale du peptide ....................................................................................... 21 2.3.3 Méthode de production du peptide β-lg f1-8 .................................................................... 22
2.3.3.1 Hydrolyse enzymatique ............................................................................................. 22 2.3.3.2 Concentration du mélange peptidique par membranes UF et OI .............................. 23 2.3.3.3 Purification du peptide β-lg f1-8 par lavage .............................................................. 24
2.3.4 Propriétés du peptide ........................................................................................................ 26 2.3.4.1 Impact du pH ............................................................................................................. 26 2.3.4.2 Impact de la concentration ......................................................................................... 27 2.3.4.3 Impact de la séquence d’acides aminés ..................................................................... 27
2.3.5 Interactions avec les protéines du lactosérum .................................................................. 28
2.4 Interactions protéines-peptides ................................................................................................ 29 2.4.1 Nature des interactions ..................................................................................................... 29
2.4.1.1 Interactions électrostatiques ....................................................................................... 29 2.4.1.2 Interactions hydrophobes ........................................................................................... 31
2.4.2 Méthodes de caractérisation ............................................................................................. 32
xiv
3. Hypothèse et objectifs ................................................................................................................ 35
4. Effet de la température sur l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 en présence d’α- lactalbumine ............................................................................................................................... 37
4.1 Objectifs spécifiques et approche méthodologique ................................................................. 37
4.2 Matériel et méthodes ............................................................................................................... 38 4.2.1 Produits et matériel utilisés .............................................................................................. 38 4.2.2 Méthodes .......................................................................................................................... 38
4.2.2.1 Préparation de l’hydrolysat ....................................................................................... 38 4.2.2.2 Osmose inverse ......................................................................................................... 38 4.2.2.3 Analyses HPLC ......................................................................................................... 39 4.2.2.4 Suivi de la floculation du peptide ............................................................................. 40 4.2.2.5 Analyses statistiques ................................................................................................. 41
4.3 Résultats et discussion ............................................................................................................. 42 4.3.1 Effet de la température sur l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 ................................ 42 4.3.2 Effet de la présence de l’α-la sur le processus d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 à 25 et 55 oC ........................................................................................................................ 44
4.4 Conclusion ............................................................................................................................... 48
5. Effet de la présence du peptide β-lg f1-8 sur les propriétés physicochimiques de l’α- lactalbumine .............................................................................................................................. 49
5.1 Objectifs spécifiques et approche méthodologique ................................................................. 49
5.2 Matériel et méthodes ............................................................................................................... 50 5.2.1 Produits et matériel utilisés .............................................................................................. 50 5.2.2 Méthodes .......................................................................................................................... 50
5.2.2.1 Préparation du peptide β-lg f1-8 ............................................................................... 50 5.2.2.2 Analyses HPLC ......................................................................................................... 51 5.2.2.3 Détermination de la solubilité de l’α-la par turbidimétrie ......................................... 51 5.2.2.4 Analyses calorimétriques (DSC) ............................................................................... 51 5.2.2.5 Analyses statistiques ................................................................................................. 53
5.3 Résultats et discussion ............................................................................................................. 54 5.3.1 Effet de la présence du peptide β-lg f1-8 sur la solubilité de l’α-la en fonction du pH ... 54 5.3.2 Effet de la présence du peptide β-lg f1-8 sur le profil de dénaturation thermique de l’α-la ......................................................................................................................................... 59
5.4 Conclusion ............................................................................................................................... 63
6. Discussion générale ................................................................................................................... 65
7. Conclusion et perspectives ........................................................................................................ 69
8. Bibliographie ............................................................................................................................. 71
xv
Liste des tableaux
Tableau 2.1 : Teneur approximative (en %) des différents composants
contenus dans les deux principaux types de lactosérum.
p.4 Tableau 2.2 : Principales caractéristiques des protéines de lactosérum de
lait bovin.
p.5 Tableau 2.3 : Résumé des résultats et conditions expérimentales de
travaux sur le profil de dénaturation thermique de l’α-‐la par DSC. p.13
Tableau 2.4 : Principales méthodes utilisées pour la formation de
complexe cytotoxiques protéine-‐OA.
p.16 Tableau 2.5 : Peptides à activité biologique issus de l’hydrolyse
enzymatique de l’α-‐la.
p.19 Tableau 2.6 : Principales méthodes permettant de détecter la présence
d’interactions protéines-‐peptides et leurs impacts sur la protéine.
p.33 Tableau 5.1 : Préparation des échantillons pour les analyses DSC. p.52
xvii
Liste des figures
Figure 2.1 : Échelle d’application des différents traitements de filtration sur membrane.
p.7
Figure 2.2 : Représentation de la structure tridimensionnelle de l’α-‐la
bovine.
p.9 Figure 2.3 : Comparaison des structures tridimensionnelles de l’α-‐la
sous forme native (à droite) molten globule (au centre) et dénaturée (à gauche).
p.11 Figure 2.4 : Schéma du four d’un appareil DSC du type power
compensation. (S = échantillon (sample), R = référence (reference), 1 = Élément chauffant, 2 = thermomètre).
p.12 Figure 2.5 : Modèle général de la formation des molécules HAMLET. p.17 Figure 2.6 : Séquence d’acides aminés et représentation de la
structure tridimensionnelle de la β-‐lg .
p.20 Figure 2.7 : Séquence en acides aminés du peptide β-‐lg f1-‐8. p.21 Figure 2.8 : Procédé de fabrication du peptide β-‐lg f1-‐8 selon la
méthode utilisée par Pouliot et al. (2009).
p.22 Figure 2.9 : Profil peptidique (RP-‐HPLC) du mélange peptidique avant
lavage (a), du culot obtenu après 2 lavages (b) et après 5 lavages (c) à 20 oC.
p.25 Figure 2.10 : Effet du pH sur l’aspect visuel des solutions de peptide β-‐lg
f1-‐8 selon leur concentration (Adapté de Guy et al, 2011).
p.26 Figure 2.11 : Effet de la concentration sur la conformation du peptide β-‐
lg f1-‐8 observée par DC à pH 10 (Adapté de Guy et al, 2011).
p.27
xviii
Figure 2.12 : Interactions entre molécules d’eau par le biais de liens hydrogène.
p.31
Figure 4.1 : Schéma du montage expérimental utilisé pour l’osmose
inverse (OI) des mélanges peptidiques.
p.41 Figure 4.2 : Débit moyen (a) du temps moyen de floculation (b) et
du facteur de concentration critique (FCC) (c) pour les OI effectuées sur l’hydrolysat trypsique complet (HTC) (10 %, p/v) à basse température (4 ± 2 oC), température ambiante (23 ± 2 oC) et température élevée (58 ± 2 oC).
p.43 Figure 4.3 : Débits moyens des traitements d’OI de l’hydrolysat
trypsique complet (HTC) (10 %, p/v) à 25 oC sans α-‐la (OI 25-‐SA) et avec α-‐la (OI 25-‐AA), puis à 55 oC sans α-‐la (OI 55-‐SA) et avec α-‐la (OI 55-‐AA).
p.45 Figure 4.4 : Évolution de l’A500 en fonction du temps (a) et du
facteur de concentration (b) des traitements d’OI des hydrolysats trypsiques complets (HTC) (10 %, p/v) à 25 oC sans α-‐la (OI 25-‐SA) et avec α-‐la (OI 25-‐AA), puis à 55 oC sans α-‐la (OI 55-‐SA) et avec α-‐la (OI 55-‐AA).
p.46 Figure 5.1 : Évolution de la turbidité de solutions d’α-‐la seule (1 %,
p/v), d’α-‐la avec le peptide β-‐lg f1-‐8 (1 %, p/v + 10 mg/mL) et d’α-‐la avec l’hydrolysat trypsique complet (HTC) (1 %, p/v + 5 %, p/v) (a) et de solutions d’HTC (5 %, p/v) et de peptide β-‐lg f1-‐8 (10 mg/mL) sans α-‐la (b) entre pH 2,0 et pH 9,0.
p.55 Figure 5.2 : Thermogrammes obtenus par DSC de l’α-‐la seule et en
présence du peptide β-‐lg f1-‐8. Les courbes illustrées sont la moyenne de trois analyses.
p.59 Figure 5.3 : Effet du pH sur l’α-‐la seule et en présence du peptide β-‐
lg f1-‐8 sur la température (a) et l’enthalpie (b) de dénaturation.
p.61
xix
Liste des abréviations α-‐la : alpha-‐lactalbumine
β-‐lg : bêta-‐lactoglobuline
ΔHD : enthalpie de dénaturation
A500 : absorbance à 500 nm
apo-‐α-‐la apo-‐alpha-‐lactalbumine
BAMLET : bovine alpha-‐lactalbumin made lethal for tumor cells
BSA : albumine de sérum bovin, de l’anglais bovine serum albumin
CPL : concentré de protéines de lactosérum
CD : dichroïsme circulaire, de l’anglais circular dichroism
DSC : calorimétrie différentielle à balayage, de l’anglais differential scanning
calorimetry
EDTA : acide éthylène diamine tétraacétique, de l’anglais
Ethylenediaminetetraacetic acid
FTIR : spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier, de l’anglais Fourier
transform infrared spectroscopy
HAMLET : human alpha-‐lactalbumin made lethal for tumor cells
holo-‐α-‐la : holo-‐alpha-‐lactalbumine
HPβCD : hydroxyl-propyl-β-cyclodextrine
HPLC : chromatographie liquide à haute performance, de l’anglais high
performance liquid chromatography
HPWP : heat-‐precipitated whey proteins
HTC : hydrolysat trypsique complet
IPL : isolat de protéines de lactosérum
MCBL : microscopie confocale à balayage laser
MG : molten globule
MF : microfiltration
NF : nanofiltration
OA : acide oléique, de l’anglais oleic acid
xx
OI : osmose inverse
pI : point isoélectrique
PM : poids moléculaire
SDS : laurysulfate de sodium, de l’anglais sodium dodecyl sulfate
UF : ultrafiltration
UV : ultra-‐violet
TD : température de dénaturation
1
1. Introduction
Le lactosérum est le liquide résiduel de la production fromagère et représente environ 80 à
90 % du volume total du lait. C’est un produit complexe avec une composition très variée
en nutriments (lactose, protéines, lipides, minéraux) selon sa provenance et ses
caractéristiques (lactosérum doux ou acide) (de Wit, 2001). Le lactosérum contient des
protéines solubles qui comptent pour environ 20 % des protéines totales du lait. La β-
lactoglobuline (β-lg) et l’α-lactalbumine (α-la), les deux protéines majeures du lactosérum,
ont fait l’objet de nombreuses études en raison de leur potentiel nutritionnel et fonctionnel.
De nombreux travaux ont montré que les protéines du lactosérum possèdent, entre autres,
des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires, antimicrobiennes, etc. (Ha & Zemel,
2003; Krissansen, 2007) en plus d’agir comme agents émulsifiants, moussants et gélifiants
(de Wit, 1998; Diaz et al., 2004). D’autres travaux originaux ont mis à profit la capacité de
l’α-la à fixer des acides gras pour lui conférer des propriétés biologiques nouvelles. Ainsi,
un complexe d’α-la et d’acide oléique (OA), baptisé HAMLET (human alpha-lactalbumin
made lethal to tumor cells), a montré des propriétés anticancer (Fischer et al., 2004;
Sullivan et al., 2013; Brinkmann et al., 2013).
Les deux protéines majeures du lactosérum, particulièrement la β-lg, ont été
également utilisées pour la production de peptides à activité biologique ou fonctionnelle par
voie d’hydrolyse enzymatique. Il a été démontré que l’hydrolyse de la β-lg par des enzymes
digestives humaines (trypsine, chymotrypsine, pepsine) permet d’obtenir des peptides
antihypertensifs, hypocholestérolémiants, antithrombiques, antimicrobiens, etc.
(Szajkowska et al., 2011; Urista et al., 2011). Certains peptides de la β-lg peuvent aussi être
utilisés pour leurs propriétés fonctionnelles (émulsification, moussage, etc.), lesquelles sont
comparables à celles des protéines natives (Caessens et al., 1999; Gauthier & Pouliot,
2003). Des protéines et peptides d’origine sérique peuvent provoquer la formation de
nanoparticules sphériques, de nanofibres, de nanotubes et d’hydrogels par phénomène
d’autoassemblage (Zhang, 2003; Graveland-Bikker et al., 2006; Graveland-Bikker & de
Kruif, 2006; Arroyo-Maya et al., 2012). Des peptides produits par hydrolyse de la β-lg à
2
l’aide de différentes enzymes, comme le β-lg f1-8 par la trypsine (Pouliot et al., 2009; Guy
et al., 2011) ou le β-lg f1-45 par une protéase bactérienne (Creusot & Gruppen, 2007),
possèdent cette propriété.
Le peptide β-lg f1-8 obtenu par hydrolyse trypsique de la β-lg démontre plusieurs
caractéristiques d’intérêt. En plus de sa capacité d’auto-assemblage, celui-ci fait partie d’un
groupe de peptides (principalement β-lg f9-14, f15-40, f142-148) ayant la capacité de se
lier à la β-lg et de modifier son profil de dénaturation thermique (Barbeau et al., 1996).
L’α-la aurait également la capacité d’interagir par des interactions hydrophobes avec
certains peptides, dont le peptide β-lg f1-8 (Groleau et al., 2003). Cependant, il n’est pas
possible de tirer de conclusions définitives à partir des résultats actuellement disponibles.
Par ailleurs, d’autres travaux ont montré qu’il était possible d’utiliser un peptide immobilisé
pour la séparation de l’α-la à partir d’un isolat de protéines de lactosérum (Gurgel et al.,
2001). Les données disponibles dans la littérature suggèrent donc fortement que des
interactions entre l’α-la et le peptide β-lg f1-8 seraient possibles et pourraient être mises à
profit pour modifier certaines propriétés de l’α-la. Une méthode de fractionnement de cette
protéine à partir de mélanges plus complexes pourrait également être envisagée.
Bien que certaines utilisations potentielles mettant à profit des interactions entre le
peptide β-lg f1-8 et l’α-la semblent possibles, il existe peu d’informations à l’heure actuelle
sur la capacité d’interaction de ce peptide avec cette protéine. Le présent projet de
recherche visait donc à mettre en évidence ces interactions et à déterminer leurs impacts sur
les propriétés physicochimiques du peptide β-lg f1-8 et de l’α-la.
3
2. Revue de littérature
2.1 Le lactosérum
2.1.1 Production du lactosérum
Au Canada et particulièrement au Québec, l’industrie fromagère est une industrie
importante, produisant chaque année près de 372 000 tonnes de fromages (dont 200 000
tonnes au Québec) et 2 100 000 tonnes de lactosérum (dont 1 200 000 tonnes au Québec)
(CILQ, 2010). Autrefois un déchet, la valorisation du lactosérum et de ses composantes est
devenue essentielle en raison de l’importante quantité produite et de sa forte DBO
(demande biologique en oxygène).
Selon le type de fabrication fromagère dont il est issu, le lactosérum peut être
considéré comme étant doux (lactosérum issu de la fabrication de caillés présure, fromages
à pâte pressée cuite ou non cuite, pH 5,9-6,6) ou acide (lactosérum issu des autres fromages
obtenus par coagulation mixte ou lactique, pH 4,3-4,6) (Bylund, 1995; de Wit, 2001). Dans
le cas des fromages produits par coagulation enzymatique, le lait est préalablement
standardisé et pasteurisé. Un mélange de cultures bactériennes lactiques et la présure
(mélange enzymatique de chymosine et de trypsine) sont ajoutés au lait pour le faire
coaguler. Une fois le gel formé, il est découpé en cubes à l’aide de tranchoirs rotatifs et les
cubes tombent au fond du réservoir, le lactosérum devenant le surnageant. Les étapes
suivantes dépendent beaucoup du type de fromage produit. La majorité du lactosérum est
retiré après la découpe du caillé, le reste lors de l’égouttage, puis sont effectuées les étapes
de salage et de pressage des grains de caillé. Dans la production de fromages par
coagulation acide, le lactosérum est obtenu par l’acidification du lait par des ferments
lactiques. Les caséines précipitent à pH 4,6 et le lactosérum est égoutté. Ce principe de
précipitation acide est également utilisé pour la production de caséinates, durant laquelle le
pH du lait est descendu au pI des caséines par des ferments lactiques ou des acides et le
lactosérum est récupéré par centrifugation ou décantation (de Wit, 2001). Une fois récolté,
4
le lactosérum liquide est souvent concentré et séché pour faciliter le transport et
l’entreposage. Des méthodes par traitement thermique comme l’évaporation et le séchage
(atomiseur ou séchoir à tambour) sont alors favorisées (Bylund, 1995). Le lactosérum est
rarement utilisé tel quel. Généralement, il subit différents traitements pour séparer,
concentrer ou fractionner certaines de ses composantes. Ces méthodes seront présentées à
la section 2.1.3.
2.1.2 Composition du lactosérum
2.1.2.1 Les principaux constituants
La composition du lactosérum dépend du lait utilisé au départ et du type de coagulation
dont il est issu. En général, le lactosérum est majoritairement composé d’eau, de lactose, de
protéines, de matière grasse et de minéraux. Les teneurs de ces différents éléments sont
présentées au tableau 2.1.
(Adapté de : Bylund, 1995; de Wit, 2001)
Tableau 2.1 : Teneur approximative (en %) des différents composants contenus dans les deux principaux types de lactosérum.
5
La composition de ces deux types de lactosérum est donc relativement similaire,
sauf au niveau de la teneur en minéraux. En effet, le lactosérum acide est légèrement plus
minéralisé que le lactosérum doux. Ce phénomène est principalement causé par la
décalcification des micelles de caséines lors de la baisse de pH, ce qui provoque la
libération de phosphates de calcium (Choi et al., 2008).
2.1.2.2 Les protéines du lactosérum
Les principales protéines retrouvées dans le lactosérum sont la β-lg, l’α-la, l’albumine de
sérum bovin (BSA), les immunoglobulines, la lactoferrine et les protéoses-peptones.
Certaines enzymes, comme la lactoperoxydase, le lysozyme, la phosphatase alcaline et la
catalase y sont également retrouvées. Le tableau 2.2 résume l’état des connaissances sur les
principales protéines du lactosérum et leurs caractéristiques.
(Adapté de : McIntosh et al., 1998; Gurgel et al., 2001; Baker & Baker, 2005)
Protéines
% des
protéines
totales du
lait
Masse
moléculaire
(kDa)
pI Structure
secondaire
Ponts
S-‐S
Groupements
thiol (S-‐H)
β-‐lg 12 18,4 5,3 45% feuillets β
10% hélices α 2 1
α-‐la 5,0 14,2 4,2 26% feuillets β
14% hélices α 4 0
BSA 1,2 69,0 5,1 40% feuillets β
54% hélices α 17 1
Immuno-‐
globulines 0,8 160-‐1600 6,3-‐7,0 Variable 32 -‐
Protéose-‐
peptones 1,0 4,0-‐200 Variable Variable -‐ -‐
lactoferrine <1,0 80,0 8,4-‐9,0
Deux domaines (N-‐
lobe et C-‐lobe) reliés
par une hélice α
-‐ -‐
Tableau 2.2 : Principales caractéristiques des protéines du lactosérum de lait bovin.
6
La β-lg et l’α-la représentent environ 17 % des protéines totales du lait et 85 % des
protéines du lactosérum. Ces deux protéines ont une structure assez différente, même si leur
pI et leur poids moléculaire (PM) sont relativement semblables. En effet, l’α-la ne possède
que des ponts S-S alors que la β-lg contient un groupement thiol libre, en plus d’une teneur
plus élevée en feuillets β.
2.1.3 Séparation des constituants du lactosérum
Les principaux constituants du lactosérum à être valorisés sont les protéines et le lactose.
Dans le cadre de ce mémoire, seules les méthodes concernant le fractionnement, la
purification et la concentration des protéines seront traitées.
Les protéines du lactosérum ont longtemps été isolées par différentes méthodes
nécessitant leur précipitation. La dénaturation thermique est un des procédés les plus
couramment utilisés, mais qui ne permet pas de dénaturer la totalité des protéines et qui
donne des fractions généralement insolubles appelées heat-precipitated whey protein
(HPWP) (Pearce, 1992; Bylund, 1995). Depuis, des méthodes plus efficaces d’isolation et
de séparation des protéines de lactosérum, principalement des méthodes de séparation sur
membrane et de chromatographie échangeuse d’ions, ont été développées et permettent
maintenant la fabrication à grande échelle de concentrés et d’isolats de protéines de
lactosérum.
Les systèmes de séparation membranaire permettent le fractionnement de particules
par filtration à travers des membranes de différentes porosités. La filtration peut se faire en
mode direct (flux perpendiculaire à la membrane) ou tangentielle (flux parallèle à la
membrane). Il existe également une grande variété de configurations (membranes spiralées,
à fibres creuses, tubulaires) et de matériaux (acétate de cellulose, polypropylène,
polysulfone, polyamide, etc.), selon le type de filtration à utiliser et la substance qui doit
être filtrée. Les principales méthodes de filtration utilisées en industrie alimentaire sont la
microfiltration (MF), l’ultrafiltration (UF), la nanofiltration (NF) et l’osmose inverse (OI)
7
(Allgeier et al., 2005). La figure 2.1 montre que la porosité des membranes varie selon le
type de filtration utilisé, ce qui permet de séparer les molécules selon leur taille.
La microfiltration est principalement utilisée pour le retrait de plus grosses
particules, comme les bactéries et la matière grasse. L’UF est utilisée pour produire des
concentrés de protéines de lactosérum (CPL). Ces poudres sont obtenues par séchage des
rétentats UF de lactosérum et contiennent généralement entre 25 et 80 % (p/p) de protéines
sur base sèche. Pour obtenir des poudres avec une teneur en protéines de 80 %, il faut
ajouter une étape de diafiltration après l’UF. La diafiltration est un procédé qui consiste à
ajouter de l’eau au cours de la filtration afin d’éliminer les composés de faible poids
moléculaire, comme les minéraux et le lactose. La nanofiltration est utilisée dans les
procédés de dessalement et de retrait des minéraux, tandis que l’osmose inverse sert
Figure 2.1 : Échelle d’application des différents traitements de filtration sur membrane. (Source : http://tpedessaler.e-‐monsite.com/pages/traitement/1-‐les-‐filtrations.html)
8
principalement à concentrer les particules retrouvées dans le rétentat et ce, en laissant
traverser uniquement l’eau (Pearce, 1992; Bylund, 1995; de Wit, 2001)
Les méthodes chromatographiques, comme la chromatographie échangeuse d’ions,
sont également utilisées pour purifier les composés protéiques du lactosérum. Cette
méthode permet d’obtenir des isolats de protéines de lactosérum (IPL). Les IPL peuvent
ainsi contenir plus de 90 % (p/p) de protéines. La chromatographie échangeuse d’ions
permet de séparer les molécules selon leur charge. Celles possédant une charge opposée à
la résine utilisée sont retenues, alors que les autres sont éluées plus rapidement de la
colonne. Cette méthode est également utilisée pour déminéraliser le lactosérum et pour
purifier la lactoferrine et la lactoperoxydase (Bylund, 1995; de Wit, 2001).
Pour arriver à fractionner et isoler les différentes protéines du lactosérum, il existe
principalement trois méthodes. L’UF, généralement suivie d’une diafiltration, est une
technique fréquemment utilisée pour réaliser le fractionnement des protéines majeures du
lactosérum. Par contre, cette technique est limitée par le fait que l’α-la et la β-lg ont des
poids moléculaires relativement semblables, ce qui rend leur séparation par UF moins
efficace (Goodall et al., 2008; Kamau et al., 2010). Une autre manière de procéder est de
combiner la filtration membranaire avec l’hydrolyse enzymatique. En effet, il est connu que
la β-lg est facilement hydrolysable par la pepsine et la trypsine, alors que l’α-la est
hydrolysée beaucoup plus lentement par la trypsine (Kamau et al., 2010). L’hydrolyse
sélective d’une des deux protéines suivie par une étape d’UF permet donc de récolter la
protéine non digérée à un haut niveau de pureté. Une autre méthode fréquemment utilisée
est la chromatographie échangeuses d’ions. En plus de mener à la production d’IPL, cette
méthode permet de séparer l’α-la, la β-lg et la BSA selon leur charge et leur affinité pour
les résines utilisées (Kim et al., 2003; El-Sayed & Chase, 2008; Kamau et al., 2010).
9
2.2 L’α-‐lactalbumine
2.2.1 Structure de la protéine
L’α-la est la seconde protéine globulaire présente en importance dans le lactosérum bovin.
Elle est composée de 123 résidus d’acides aminés (poids moléculaire de 14,2 kDa) et sa
structure tertiaire comporte quatre ponts disulfures. L’α-la native est constituée de deux
domaines distincts, soit une large section composée d’hélices α et un petit domaine en
feuillet β. Les deux sections sont reliées par une boucle de fixation du calcium (Relkin &
Mulvihill, 1996; McGuffey, 2004). Une représentation de la structure tridimensionnelle de
la protéine est présentée à la figure 2.2. L’α-la est une métalloprotéine capable de se lier à
plusieurs ions métalliques, principalement le calcium (Ca2+), mais également aux ions Zn2+,
Mg2+, Cu2+, Co2+, Na+, K+ et Al3+ (Ren & Stuart, 1993; Velusamy & Palaniappan, 2011).
D’autres travaux ont également démontré que tous les ions ne se lieraient pas au même
endroit sur la molécule, comme le zinc, dont le site de liaison spécifique serait à environ
11,5 Å de celui du calcium (Ren & Stuart, 1993; McGuffey, 2004).
La molécule d’α-la se retrouve principalement sous sa forme native (holo-α-la),
décalcifiée (apo-α-la) ou sous une forme intermédiaire appelée molten globule state (MG).
Figure 2.2 : Représentation de la structure tridimensionnelle de l’α-‐la bovine. (Source : http://www.intechopen.com/books/milk-‐protein/).
10
L’apo-α-la est obtenue par l’utilisation d’agents chélateurs ou séquestrants du calcium
(citrate, EDTA), une augmentation de la température et une diminution du pH autour du pI
de la protéine (pH 4,2-4,5). La perte de la capacité à lier le calcium de l’α-la est
principalement due à l’ionisation de groupements carboxyles et tyrosyles dans la boucle de
fixation du calcium (McGuffey, 2004). Cette forme est plus flexible, plus hydrophobe et
moins soluble que la forme native (Bramaud et al., 1997; Brinkmann et al., 2013).
Permyakov et Berliner (2000) ont rapporté que la liaison de cations métalliques,
principalement le calcium, augmente la stabilité de la protéine. La liaison avec le calcium
peut augmenter la résistance à la dénaturation thermique de plus de 40 oC, cette variation
étant plus faible avec d’autres cations comme le Mg2+, Na+ et K+. Ces résultats démontrent
que plus les ions sont liés fortement à la protéine, plus la transition vers une température de
dénaturation élevée sera importante. La conformation apportée par la liaison avec certains
cations métalliques augmente également la stabilité de la protéine face à l’action de certains
agents dénaturants comme l’urée et le chlorhydrate de guanidine (Relkin & Mulvihill,
1996; Permyakov & Berliner, 2000).
La forme MG est une conformation intermédiaire de l’α-la, compacte et très
hétérogène. Elle possède un domaine d’hélices α toujours très structuré (native like), mais
le domaine composé de feuillets β est en majorité dénaturé (Kuwajima, 1996; Permyakov
& Berliner, 2000). Le passage à la conformation MG se produit généralement sous trois
conditions, soit 1) la présence d’agents dénaturants en concentration modérée (urée,
chlorhydrate de guanidine), 2) un faible pH menant à la dénaturation acide de la protéine ou
3) le retrait du calcium à pH neutre et à une concentration faible en sel (Kuwajima, 1996;
McGuffey, 2004). Les différences structurales entre la forme native et MG de l’α-la sont
illustrées à la figure 2.3.
11
2.2.2 Propriétés physicochimiques
2.2.2.1 Impact de la température
Le profil de dénaturation thermique de l’α-la a été étudié à plusieurs reprises,
principalement à l’aide de la méthode de calorimétrie différentielle à balayage (DSC). Un
schéma d’un appareil DSC est présenté à la figure 2.4. La méthode DSC est une méthode
calorimétrique permettant la détection rapide et en temps réel de la variation de la chaleur
libérée (processus exothermique) ou absorbée (processus endothermique) par l’échantillon
analysé, comparativement à une référence. Cette méthode permet de mesurer la température
de transition (dénaturation) et de réaction de matériaux, en plus d’autres paramètres
calorimétriques comme l’enthalpie, la chaleur massique, etc. Cette méthode permet entre
autres de caractériser des matériaux, d’évaluer leur stabilité et leur pureté, d’évaluer des
diagrammes de phase et la cinétique de dénaturation de molécules, etc. (Höhne et al.,
2003a).
Figure 2.3 : Comparaison des structures tridimensionnelles de l’α-‐la sous forme native (à droite), molten globule (au centre) et dénaturée (à gauche) (Mizuguchi et al., 2009).
12
Étant donné les nombreuses conformations possibles de la protéine selon les
conditions de température et de pH, il est normal de retrouver des valeurs différentes de
température et d’enthalpie de dénaturation dans la littérature. Les résultats d’analyses DSC
de l’α-la issus de certains travaux ainsi que les principales conditions utilisées sont
présentés au tableau 2.3. Les écarts retrouvés entre les résultats peuvent être causés par des
variations au niveau de la protéine elle-même (source, conformation), mais également par
l’utilisation de différents appareils (sensibilité), la méthode utilisée (intervalle et gradient
de température) et la préparation des échantillons (nature et concentration du tampon, pH,
concentration en α-la).
Figure 2.4 : Schéma du four d’un appareil DSC du type power compensation. (S = échantillon (sample), R = référence (reference), 1 = Élément chauffant, 2 = thermomètre) (Höhne et al., 2003a).
13
Tableau 2.3 : R
ésum
é de
s rés
ulta
ts e
t con
ditio
ns e
xpér
imen
tale
s de
trav
aux
sur l
e pr
ofil
de d
énat
urat
ion
ther
miq
ue d
e l’α
-‐la p
ar D
SC.
14
À des valeurs de pH inférieures à 3,5, il n’est plus possible de détecter de transition
thermique, car la conformation de la protéine est modifiée par la perte de sa capacité à lier
le calcium (Bernal & Jelen, 1984; McGuffey, 2004). Cependant, plusieurs auteurs
s’entendent sur le fait que la température et l’enthalpie de dénaturation de l’α-la native dans
l’eau sont respectivement de 58 oC et 320 kJ/mol (Relkin & Mulvihill, 1996).
Contrairement à d’autres protéines, la dénaturation thermique de l’α-la est
réversible. En effet, des travaux en DSC sur la stabilité de la protéine face à la dénaturation
thermique entre 15 et 100 oC montrent des taux de réversibilité de 80-100 % pour l’holo-α-
la et de près de 50 % pour l’apo-α-la, particulièrement en présence de CaCl2 (Boye et al.,
1997). Cette stabilité provient de l’absence d’agrégation et de gélification de l’α-la lors de
la dénaturation de la protéine. Ce phénomène est possible grâce à la structure secondaire de
la protéine qui se dénature facilement lors du chauffage, mais qui retrouve sa conformation
native en présence de calcium. Des études en spectroscopie infrarouge (FTIR) semblent
montrer que la dénaturation de l’apo-α-la, qui s’accompagne quant à elle d’un certain
processus d’agrégation lors du chauffage, provoquerait la formation de feuillets β tandis
que l’holo-α-la adopterait davantage une structure en coudes, réduisant ainsi les possibilités
d’agrégation (Boye et al., 1997). Finalement, l’absence de groupements thiol libres,
reconnus pour être très actifs dans le processus d’agrégation protéique, limite également
l’agrégation de l’α-la (McGuffey, 2004).
2.2.2.2 Impact du pH
Comme il a été mentionné plus tôt, l’α-la possède une structure qui est fortement influencée
par le pH, phénomène principalement relié à sa capacité à lier le calcium (Permyakov &
Berliner, 2000). En effet, à pH acide (3,0-4,2) et en présence d’agent chélatant (EDTA), la
protéine perd la capacité à lier le calcium et passe sous la forme apo-α-la. À pH ≤ 3,0 ou
par traitement thermique léger à partir de l’apo-α-la, la protéine se retrouve alors sous
forme MG (Kuwajima, 1996; Brinkmann et al., 2013). Des analyses en fluorimétrie ont
démontré que le passage de l’α-la sous forme apo-α-la par baisse de pH provoque un
décalage de la longueur d’onde d’excitation vers le rouge (red shift), ce qui signifie que les
15
unités de tryptophane situés dans la zone hydrophobe au centre de la molécule d’α-la sont
davantage exposés au solvant (Stănciuc et al., 2012). À l’inverse, lorsque le pH est
remonté, la structure reprend son état natif en liant à nouveau le calcium et une déviation
vers le bleu (blue shift) est enregistrée. Cela signifie donc que les unités de tryptophane
sont davantage enfermées au sein de la structure et que la zone hydrophobe est moins
exposée (Permyakov & Berliner, 2000; Stănciuc et al., 2012).
À son pI, la protéine précipite et le calcium joue un rôle clé dans ce phénomène. À
ce pH, une faible concentration en calcium et une augmentation de la température
favorisent la forme décalcifiée de la protéine, laquelle a une plus faible solubilité. Plus la
température est élevée et plus la teneur en calcium est diminuée, plus la précipitation de la
protéine sera élevé (Bramaud et al., 1997).
2.2.2.3 Potentiel d’interactions avec des ligands
Selon les conditions dans lesquelles elle est placée (température, pH, force ionique, etc.),
l’α-la se montre capable d’interagir avec différents types de ligands comme des peptides et
des acides gras. Des travaux ont démontré qu’il était possible de purifier l’α-la contenue
dans un mélange protéique à l’aide de peptides fixés sur une colonne chromatographique
(Gurgel et al., 2001). Selon les conditions d’expérimentations et la composition des
peptides utilisés, l’α-la est capable de se lier à la colonne via trois mécanismes distincts,
soit par le biais d’interactions électrostatiques (basse température), par des interactions
hydrophobes (haute température) ou par un mécanisme non spécifique pouvant agir à un
grand intervalle de température (Gurgel et al., 2001).
La capacité d’interaction de l’α-la est exploitée depuis quelques années dans la mise
au point de complexes avec l’acide oléique (OA ou oleic acid), complexes qui est létal pour
certaines cellules tumorales humaines. Ces derniers, nommés Human/Bovine α-lactalbumin
made lethal to tumor cells (H/BAMLET) auraient la capacité de provoquer la mort
cellulaire (apoptosis-like mechanism) de certaines cellules cancéreuses (glioblastomes,
carcinomes, cellules tumorales lymphoïdes) (Fischer et al., 2004). Les mécanismes
16
entourant l’activité anti-cancer des molécules HAMLET ne sont pas encore tous bien
compris et font toujours l’objet de plusieurs études.
Étant donné que la formation des complexes α-la:OA se fait principalement par la
déstabilisation de l’α-la en sa forme apo-α-la, l’étude de ces complexes révèle plusieurs
caractéristiques structurales en lien avec l’α-la. Comme expliqué précédemment, cette
déstabilisation mène à la formation d’une structure plus flexible et plus hydrophobe, ce qui
permet donc à l’OA de se lier à l’α-la. Par contre, les analyses fluorimétriques montrent que
l’interaction OA:α-la est dépendante du pH, signe d’une combinaison entre des interactions
électrostatiques et hydrophobes (Stănciuc et al., 2013). Plusieurs méthodes ont été utilisées
pour effectuer cette mise en contact, principalement en utilisant différents traitements de
température et de pH. Un résumé des principales méthodes employées pour produire des
complexes d’α-la (et même d’autres protéines) et d’OA est présenté au tableau 2.4.
(Adapté de : Brinkmann et al., 2013)
Tableau 2.4 : Principales méthodes utilisées pour la formation de complexe cytotoxiques protéine-‐OA
17
Les éléments présentés au tableau 2.4 permettent donc de constater qu’il est possible
d’arriver à produire les complexes à l’aide de différentes méthodes et en utilisant différents
ratios OA:protéine. Par contre, une partie seulement des complexes formés a démontré un
effet cytotoxique, alors que d’autres sont demeurés biologiquement inactifs (Mossberg et
al., 2010). Selon Brinkmann et al. (2013), les analyses en cristallographie à rayon X
effectuées à ce jour pour déterminer la structure tridimensionnelle de ces complexes n’ont
pas fourni de résultats déterminants. En effet, l’α-la dans les complexes HAMLET
développe une structure instable et changeante avec une légère perte de sa structure
secondaire et la disparition presque complète de sa structure tertiaire. La figure 2.5 présente
néanmoins un modèle général de la formation des molécules HAMLET. Il est possible d’y
voir les trois principales étapes du processus, soit l’utilisation d’une molécule d’α-la sous sa
forme native, la décalcification de la protéine et la mise en contact avec l’OA.
Figure 2.5 : Modèle général de la formation des molécules HAMLET. (Ho et al., 2012)
18
2.2.3 Propriétés biologiques
L’α-la est une protéine reconnue pour ses qualités nutritionnelles, principalement chez les
nourrissons. L’α-la joue tout d’abord un rôle important dans la production du lait chez les
mammifères, se complexant à l’enzyme β-1,4-galactosyltransferase pour former le
complexe lactose synthase qui est essentiel à la formation de lactose (Velusamy &
Palaniappan, 2011). Elle est aussi la protéine sérique la plus abondante dans le lait humain,
contrairement au lactosérum de lait bovin qui contient principalement de la β-lg (de Wit,
2001). Elle doit donc être ajoutée dans les formulations de lait maternisé afin de mieux
reproduire la composition du lait humain. Un autre élément nutritionnel important de cette
protéine est sa teneur élevée en tryptophane puisqu’il s’agit d’un acide aminé essentiel. Cet
acide aminé a démontré des effets positifs sur le développement du cerveau et du système
nerveux des nouveaux nés, en plus de jouer un rôle important dans le fonctionnement de
ces systèmes comme précurseur direct de la sérotonine. Ainsi, des travaux ont montré
qu’un apport régulier d’α-la chez des sujets adultes permettait d’augmenter les quantités
plasmatiques de tryptophane, améliorant ainsi certaines fonctions neurologiques (attention,
performances cognitives, vigilance matinale, etc.) (Markus et al., 2002, 2005). Cette
protéine possède également une bonne digestibilité et d’un faible pouvoir allergène (Gurgel
et al., 2001; Velusamy & Palaniappan, 2011).
Comme il a été mentionné précédemment, les protéines du lactosérum sont de plus
en plus utilisées pour la production de peptides possédant des activités biologiques
intéressantes au niveau santé. L’α-la a également été étudiée pour cet aspect et même s’il
n’y a pas encore de produits issus de son hydrolyse sur le marché, plusieurs peptides
couvrant une large gamme d’activités ont été découverts. Une liste de certains de ces
peptides est présentée au tableau 2.5. Comme il est possible de constater, l’α-la est capable
de fournir des séquences peptidiques couvrant un large spectre de fonctions et qui peuvent
être obtenues à partir de plusieurs enzymes, dont les principales enzymes digestives
humaines (trypsine, chymotrypsine, pepsine).
19
(Adapté de : Kamau et al., 2010)
2.3 Le peptide β-‐lg f1-‐8
2.3.1 La β-‐lactoglobuline
La β-lg est la plus abondante des protéines du lactosérum bovin, représentant près de 40 %
de son contenu total. C’est une protéine globulaire contenant 162 acides aminés; elle est
reconnue pour sa richesse en lysine, leucine, acide glutamique et acide aspartique. Son
poids moléculaire est de 18 400 Da et son pI de 5,1. Sa structure secondaire est composée
en majorité de feuillets β (≈50 %), mais on retrouve également des hélices α (10 %), des
coudes β (8 %) et une assez forte proportion de structure désordonnée (35 %) (Allain, 1998;
Kontopidis et al., 2004). Sa structure est également renforcée par deux ponts disulfures et
par une structure tertiaire composée majoritairement de feuillets β antiparallèles. La
séquence primaire en acides aminés ainsi qu’une représentation de sa structure
tridimensionnelle sont présentées à la figure 2.6.
Tableau 2.5 : Peptides à activité biologique issus de l’hydrolyse enzymatique de l’α-‐la.
20
La β-lg est reconnue pour posséder plusieurs fonctions, tant nutritionnelles que
fonctionnelles. Une des fonctions les plus étudiées présentement est la capacité de la
protéine à lier certaines molécules d’intérêt nutritionnel et à servir de matrice protectrice
lors de la digestion. Il a été démontré que la β-lg est capable de lier certaines vitamines (D2
et D3), le cholestérol, certaines catéchines et même le mercure (Kontopidis et al., 2004;
Zorilla et al., 2011; Diarrassouba, 2013). Ces interactions se produisent principalement
dans une zone centrale de la protéine, nommée calyx ou β-barrel, qui est formée de feuillets
β. Cette cavité hydrophobe, qui permet de fixer une grande variété de ligands, est régulée
par une boucle (EF loop) qui agit comme une porte au site de liaison. À bas pH, cette
boucle est en position « fermée » et les interactions sont impossibles. Lorsque le pH
augmente, la boucle s’ouvre ce qui permet aux ligands de s’insérer dans la cavité
hydrophobe (Kontopidis et al., 2004). Ce changement de structure, nommé transition de
Tanford, se produit généralement entre pH 6,5 et 7,5 (Taulier & Chalikian, 2001).
Un autre aspect important de la β-lg est la production de peptides par hydrolyse
enzymatique. L’hydrolyse de cette protéine par une grande variété d’enzymes (pepsine,
trypsine, chymotrypsine, plasmine, protéases bactériennes, etc.) permet de générer plusieurs
peptides bioactifs, qui ont démontré des propriétés antioxydantes, hypocholestérolémiantes,
antimicrobiennes, opioïdes, anti-cancer, antihypertensives, etc. (Caessens et al., 1999;
Madureira et al., 2010; Urista et al., 2011). En plus de leur potentiel d’activités biologiques,
Figure 2.6 : Séquence d’acides aminés et représentation de la structure tridimensionnelle de la β-‐lg (Filion, 2006).
21
les hydrolysats de β-lg contiennent certains courts peptides (5-15 acides aminés) qui
possèdent une capacité d’autoassemblage, pour ainsi former des structures complexes de
nanofibres et même d’hydrogels. Le peptide β-lg f1-8 produit par hydrolyse trypsique de la
β-lg (Pouliot et al., 2009), de même que le fragment β-lg f1-45 obtenu à l’aide d’une
protéase bactérienne (Creusot et al., 2007 et 2008), démontrent cette propriété.
2.3.2 Description générale du peptide
Comme le démontre la figure 2.7, le peptide β-lg f1-8 est constitué des huit premiers acides
aminés de la β-lg localisés à l’extrémité N-terminale (Leu-Ile-Val-Thr-Gln-Thr-Met-Lys)
de la protéine. Son point isoélectrique est de 8,75 et sa masse moléculaire est de 933,5
g/mol (Pouliot et al., 2009). En raison de sa composition en acides aminés (7 résidus
hydrophobes et 1 résidu basique), le peptide β-lg f1-8 est généralement très peu soluble
dans l’eau. De plus, les conditions de concentration, de pH et de température sous
lesquelles sa réhydratation est effectuée peuvent donner lieu à la formation de nanofibres et
d’hydrogels.
Sa capacité d’auto-assemblage a été observée au départ durant la concentration par
osmose inverse (OI) d’un hydrolysat de protéines de lactosérum obtenu à l’aide de la
trypsine. Lors de ce procédé, un précipité s’est formé spontanément et s’est montré
insoluble dans les différents solvants testés (urée, mercaptoéthanol et SDS). Par contre, le
précipité s’est avéré soluble en conditions très acides (pH < 2). L’analyse de la fraction
insoluble a permis de confirmer que le peptide β-lg f1-8 était majoritairement responsable
de la formation d’agrégats. Ce peptide représentait plus de 94 % du contenu peptidique de
Figure 2.7 : Séquence en acides aminés du peptide β-‐lg f1-‐8 (Adapté de Pouliot et al., 2009).
22
la fraction insoluble, ce qui a pu être démontré à l’aide d’une analyse en chromatographie
liquide en phase inversée (RP-HPLC) et par spectrométrie de masse (MS) (Pouliot et al.,
2009).
2.3.3 Méthode de production du peptide β-‐lg f1-‐8
La méthode suggérée par les travaux de Pouliot et al. (2009) est illustrée à la figure 2.8. La
production du peptide β-lg f1-8 comprend quatre principales étapes, soit l’hydrolyse
trypsique d’un IPL (1), la séparation du mélange peptidique par UF (2) et sa concentration
par OI jusqu’à l’apparition d’un précipité (3). Pour terminer la purification du peptide, le
précipité doit subir un lavage (3-5 stages) à l’eau déionisée suivi d’une centrifugation (4).
2.3.3.1 Hydrolyse enzymatique
Le peptide β-lg f1-8 est issu d’une hydrolyse enzymatique d’un IPL par la trypsine, une
endopeptidase qui coupe préférentiellement du côté carboxyl des acides aminés basiques
(Lys et Arg). Cette enzyme produit donc le peptide β-lg f1-8 en coupant le lien entre la
lysine en position 8 et la glycine en position 9 de la protéine, à partir de son extrémité N-
terminale. D’autres peptides comme le β-lg f15-20, f76-82 et f142-148 se retrouvent
également dans l’hydrolysat (Pouliot et al., 2009). L’utilisation de la trypsine nécessite
l’ajout de calcium dans la solution d’IPL puisque les ions Ca2+ stabilisent la structure de
l’enzyme, ce qui permet d’augmenter son activité (Cliffe & Grant, 1981). Durant
Figure 2.8 : Procédé de fabrication du peptide β-‐lg f1-‐8 selon la méthode utilisée par Pouliot et al. (2009).
(1) (2) (3) (4)
23
l’hydrolyse, la méthode pH-stat est utilisée pour mesurer l’avancement de la réaction
jusqu’au degré d’hydrolyse recherché (5,6 %). Cette méthode permet de mesurer en temps
réel l’hydrolyse des liens peptidiques par une ou plusieurs enzymes. La progression de la
réaction est évaluée par titration des groupes d’acides aminés libérés par l’enzyme à l’aide
d’une solution alcaline (NaOH 2 N). Le degré d’hydrolyse (DH) est calculé à partir de la
formule suivante :
Il est possible de déterminer le volume de base à ajouter durant la réaction pour
atteindre le degré d’hydrolyse requis (del Toro & García-Carreño, 2002). Les avantages de
cette méthode sont qu’elle permet de suivre en temps réel la réaction d’hydrolyse et qu’elle
ne nécessite pas l’utilisation de tampons puisque le pH est maintenu à 8,0 durant tout le
processus.
2.3.3.2 Concentration du mélange peptidique par membranes UF et OI
Suite à l’hydrolyse trypsique, la réaction est arrêtée par une étape d’UF avec une membrane
de seuil de coupure de 10 kDa. L’UF permet de conserver la trypsine encore active et les
protéines non-hydrolysées dans le rétentat. Cette méthode permet d’arrêter l’hydrolyse sans
avoir à chauffer l’hydrolysat pour dénaturer l’enzyme. Le perméat, riche en peptides, est
récupéré et concentré par OI, ce qui permet d’éliminer un grand volume d’eau et d’amener
le peptide β-lg f1-8 à sa concentration de floculation critique de 2,0-2,5 mg/mL (Pouliot et
al., 2009; Guy et al., 2011). L’effet de la concentration sur le peptide sera traité plus loin.
DH = B × NB × 1α × 1
MP × 1
htot × 100
où :B = Volume de base (mL)NB = Normalité de la base1/α = Degré de dissociation approximatif des groupements - NH3
+
Mp = Teneur en protéines dans la solutionhtot = Nombre de liaisons peptidiques dans la protéine (meq/g)
24
2.3.3.3 Purification du peptide β-‐lg f1-‐8 par lavage
La purification du peptide β-lg f1-8 peut se faire par une simple séquence de lavages à
l’aide d’eau déionisée et de centrifugations. La centrifugation s’effectue à 5000 × g pendant
12 min. Le peptide étant insoluble, il forme un culot qui est ensuite lavé afin d’augmenter
le degré de purification du fragment. Après élimination du surnageant, le même volume
d’eau HPLC est ajouté dans les tubes qui sont ensuite agités au vortex, puis centrifugés à
nouveau. Cette opération de lavage/centrifugation est répétée de 3 à 5 fois. La figure 2.9
montre l’évolution de la composition peptidique entre l’hydrolysat trypsique complet
(HTC) (a) le précipité obtenu après deux lavages (b), puis après une séquence de cinq
lavages (c). Dans ce dernier cas, la pureté du peptide est supérieure à 94 %.
25
Figure 2.9: Profil peptidique (RP-‐HPLC) du mélange peptidique avant lavage (a), du culot obtenu après 2 lavages (b) et après 5 lavages (c) à 20 oC (Résultats non-‐publiés).
a
b
c
26
2.3.4 Propriétés du peptide
2.3.4.1 Impact du pH
L’impact de la variation du pH sur le processus d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 a
été vérifié par dichroïsme circulaire (CD) à différentes concentrations. Ces analyses ont
démontrées qu’à toutes les concentrations étudiées, les solutions peptidiques restaient
claires à pH inférieur à 2,0. À des valeurs supérieures de pH, une concentration critique
d’environ 2,5 mg/mL a été observée, donnant une suspension trouble entre pH 3,0 et 8,0. À
pH 9,0-11,0, les solutions commencent à former des hydrogels, passant de gels tendres à
des concentrations entre 3 et 30 mg/mL, à des gels fermes et opaques pour des
concentrations supérieures à 50 mg/mL (figure 2.10).
Les analyses en CD ont démontré un passage de la forme complètement aléatoire à
des pH acides, puis à l’apparition de plus en plus d’unités peptidiques sous la forme de
feuillets β lorsque le pH augmente. Cette transition est causée par le changement de la
charge globale du peptide qui est de +2 à pH 1,0-2,0, +1 entre pH 3,0 et 8,0, nulle aux
alentours de son pI (8,75) et -1 à des pH supérieurs à 9,0. Le changement de configuration
du peptide et l’auto-assemblage menant à sa floculation sont davantage favorisés lorsque la
charge du peptide s’approche de la neutralité ou est négative (Guy et al., 2011).
Figure 2.10 : Effet du pH sur l’aspect visuel des solutions de peptide β-‐lg f1-‐8 selon leur concentration (Adapté de Guy et al., 2011).
27
2.3.4.2 Impact de la concentration
Le passage du peptide de sa conformation aléatoire à une structure en feuillets β, qui mène
au processus d’auto-assemblage, est dépendant de la concentration. Des analyses de CD ont
démontré qu’à pH 10 et à une concentration entre 0,4 et 1,0 mg/mL, le peptide β-lg f1-8
adopte principalement une conformation aléatoire. Lorsque la concentration est augmentée
entre 1,0 et 1,5 mg/mL, la solution contient un mélange de peptide sous la forme aléatoire
et en feuillets β. Les résultats obtenus par Guy et al. (2011) sont synthétisés à la figure 2.11.
Les résultats présentés aux figures 2.10 et 2.11 démontrent donc qu’à un pH
supérieur à 2,0 et à une concentration supérieure à 1,5-2,0 mg/mL, le peptides adopte une
conformation en feuillet β et les unités peptidiques interagissent alors entre-elles, ce qui
peut mener à la formation de structures insolubles plus complexes (nanofibres, hydrogels).
2.3.4.3 Impact de la séquence d’acides aminés
Pour vérifier l’impact de la séquence d’acides aminés du peptide sur le processus d’auto-
assemblage, celle-ci a été modifiée par le biais de soustractions, d’ajouts et de substitutions
d’acides aminés (Guy, 2011). Le raccourcissement de la section hydrophobe en début de
chaîne, en substituant la leucine par une glycine, a provoqué une très forte diminution de la
transition du peptide en feuillet β. Cet effet s’est montré minime suite à la réduction du
caractère hydrophile du peptide, par substitution de la lysine par une alanine, signe que le
Figure 2.11 : Effet de la concentration sur la conformation du peptide β-‐lg f1-‐8 observée par DC à pH 10 (Adapté de Guy et al., 2011).
28
caractère hydrophobe du peptide est un élément dominant du processus d’auto-assemblage.
Par contre, une balance entre les interactions hydrophobes et électrostatiques est également
essentielle au processus. Une substitution de la lysine par l’acide glutamique n’a provoqué
aucun changement dans les spectres CD du peptide aux différents pH étudiés. La lysine
n’est donc pas nécessaire à l’auto-assemblage du peptide f1-8 et pourrait donc être
remplacée par un autre acide aminé (Guy, 2011).
2.3.5 Interactions avec les protéines du lactosérum
Des signes d’interactions entre le peptide β-lg f1-8 et les protéines du lactosérum ont déjà
été observés lors d’études précédentes. L’analyse par calorimétrie différentielle à balayage
(DSC) des interactions entre la β-lg et des peptides issus de protéines de lactosérum a
permis de constater une stabilisation de la protéine face à sa dénaturation thermique
(Barbeau et al., 1996). L’introduction d’une molécule hydrophobe dans la zone hydrophobe
de la protéine induit une modification de sa conformation vers une forme plus compacte et
la formation de nouveaux liens hydrogène internes. Ces interactions augmentent donc la
stabilité thermique de la protéine et cette stabilité varie selon la proportion de résidus non-
polaires des ligands. Plus la proportion de résidus non-polaires est élevée, plus la stabilité
de la protéine à la dénaturation thermique augmente. Selon les résultats obtenus par
Barbeau et al. (1996), la fraction protéique qui provoque le plus grand changement dans la
température de dénaturation de la protéine contient trois peptides, dont le peptide β-lg f1-8,
signe que ce peptide serait capable d’interagir avec la protéine et de provoquer une
modification de sa conformation.
Les travaux de Groleau et al. (2003) ont porté sur l’effet des conditions
physicochimiques sur les interactions peptides-peptides d’un hydrolysat trypsique de β-lg.
Les résultats ont mis en évidence un processus d’agrégation à pH acide qui impliquerait un
nombre limité de peptides, dont le peptide β-lg f1-8. Parmi les espèces retrouvées dans la
fraction précipitée, les fragments β-lg f1-8 et f15-20 sont des peptides hautement
hydrophobes, ce qui pourrait expliquer leur interaction à pH 4,0. De l’α-la non hydrolysée a
également été retrouvée dans le précipité, indiquant que la protéine pourrait interagir avec
29
elle-même ou avec certains peptides à pH acide. Les mécanismes expliquant ces résultats
ne sont cependant pas déterminés par les auteurs.
Plus récemment, dans le cadre d’essais préliminaire (non-publiés), il a été observé
que la mise en contact de solutions d’IPL et de protéines isolées avec le peptide β-lg f1-8
modifiait la composition protéiques des isolats, particulièrement lors du contact avec l’α-la.
Ceci suggère donc que l’interaction du peptide β-lg f1-8 avec l’α-la pourrait être utilisée
comme approche de fractionnement des protéines de lactosérum.
2.4 Interactions protéines-‐peptides
L’étude des interactions protéines-protéines et protéines-peptides, comme celles entre l’α-la
et le peptide β-lg f1-8, est d’une grande importance puisque ces interactions jouent un rôle
clé dans de nombreuses fonctions cellulaires. En effet, plusieurs processus comme la
transduction de signaux, la réplication et la réparation de l’ADN, l’expression de certains
gènes et le fonctionnement de certaines voies métaboliques dépendent de ces interactions
(Petsalaki et al., 2009; London et al., 2010). Les connaissances sur la nature de ces
interactions ainsi que les méthodes pour les évaluer sont également importantes dans le
cadre de ces travaux. En effet, elles devraient permettre de mieux comprendre les effets
observés lors de la mise en contact du peptide β-lg f1-8 avec l’α-la. Dans cette section, les
principaux types d’interactions retrouvées dans ce phénomène seront présentés, en plus des
principales méthodes utilisées pour les caractériser.
2.4.1 Nature des interactions
2.4.1.1 Interactions électrostatiques
Les deux principaux types d’interactions retrouvés dans les cas d’interactions protéines-
peptides sont les interactions électrostatiques et les interactions hydrophobes. Les
interactions électrostatiques représentent les forces d’attraction et de répulsion entre
30
molécules ou groupes de molécules chargées. Selon la loi de Coulomb, qui est utilisée pour
quantifier ces interactions, les molécules de charges opposées auront tendance à s’attirer,
alors que des charges similaires provoqueront de la répulsion (Creighton, 1993). Ces
interactions sont d’un grand intérêt puisqu’elles jouent un rôle important dans plusieurs
processus impliquant des protéines comme le repliement protéique, les changements de
conformation induits par le pH, la formation de gels, etc. (Hünenberger et al., 2001).
Il existe plusieurs types d’interactions électrostatiques comme les forces de Van der
Waals, les interactions dipôles-dipôles et les liens hydrogène (liens H). De plus, les
interactions électrostatiques entre les groupements acides (chargés négativement) et
basiques (chargés positivement) des acides aminés sont appelées ponts salins. Ces liaisons
entre les groupements carboxyliques (acide aspartique, acide glutamique ou C-terminal) et
les résidus azotés (arginine, lysine, histidine ou N-terminal) influencent la conformation des
protéines (Guy, 2011). Dans le cas des interactions protéines-peptides, ce sont surtout les
liens H qui sont en cause. Ces liens sont de faible intensité et se produisent lorsqu’un atome
d’hydrogène, qui est déjà lié à un atome (C, O, N), est également attiré par un autre atome
par le biais d’une interaction électrostatique. Généralement, le dipôle contenant l’hydrogène
qui possède une charge partielle positive, interagit avec la charge négative de l’autre atome
(Creighton, 1993). Une illustration de ce type de liaison est présentée à la figure 2.12.
Les paramètres physicochimiques qui influencent le plus les interactions
électrostatiques sont la force ionique du milieu et le pH. En effet, une force ionique élevée
nuit aux interactions électrostatiques, car les ions en solution masquent les charges des
protéines ou des peptides, ce qui diminue les interactions possibles entre les groupements
chargés (Guy, 2011). Étant donné que des groupements chargés sont impliqués dans le cas
d’interactions électrostatiques, le pH a aussi une grande influence sur leur impact. En effet,
les protéines et peptides en solution deviennent fortement chargés et les répulsions
intermoléculaires sont maximales lorsque le pH est éloigné de leur pI. À l’inverse, un pH
près du pI diminuera les répulsions entre les unités protéiques (ou peptidiques), favorisant
leur rapprochement (Pace et al., 2004).
31
2.4.1.2 Interactions hydrophobes
Les interactions hydrophobes peuvent être vues comme la tendance spontanée de
groupements non polaires à se regrouper pour minimiser leur contact avec l’eau dans une
solution aqueuse (Creighton, 1993; Meyer et al., 2006). Les interactions hydrophobes
provoquent généralement la formation de solutés peu solubles, étant généralement la cause
de la coalescence ou floculation dans des systèmes colloïdaux. De plus, un grand nombre
de processus d’auto-assemblage est causé par ces interactions, que ce soit la formation de
micelles, l’arrangement en bicouches lipidiques ou l’agrégation de protéines ou de peptides
(Meyer et al., 2006). Dans la structure des protéines et peptides, les interactions
hydrophobes surviennent généralement entre les acides aminés possédant un groupement
latéral non polaire aromatique ou aliphatique (tryptophane, leucine, isoleucine,
phénylalanine, etc.), lesquels se regroupement généralement au centre de la structure pour
former une zone hydrophobe (Creighton, 1993; Guy, 2011). Comme mentionné
précédemment, la β-lg possède un cavité hydrophobe qui peut lier certaines molécules
hydrophobes de nature lipidique (Diarrassouba et al., 2013) ou peptidique (Barbeau et al.,
1996).
Figure 2.12 : Interactions entre molécules d’eau par le biais de liens hydrogène (Source : http://biobook.nerinxhs.org/bb/cells/chemistry.htm)
32
L’action des interactions hydrophobes est dépendante de la température, étant plus
importante à température élevée (Meyer et al., 2006). En effet, l’eau est moins structurée à
haute température, ce qui provoque une baisse de solubilité des molécules non polaires.
Tout comme les interactions électrostatiques, les interactions hydrophobes sont influencées
par la force ionique de leur milieu aqueux, car la présence de certains ions fait augmenter la
tension superficielle de l’eau. La forte présence de ces ions provoque ainsi une diminution
de la solubilité des molécules non polaires et favorise leur précipitation (phénomène de
« salting-out ») (Guy, 2011).
2.4.2 Méthodes de caractérisation
Il existe une grande variété de méthodes pour déterminer l’occurrence d’interactions
protéines-peptides. Certaines méthodes permettent d’évaluer directement l’impact de ces
interactions sur la structure de la protéine, alors que d’autres permettent d’observer les
effets sur ses paramètres physicochimiques (solubilité, température de dénaturation, etc.).
Un résumé des principales méthodes retrouvées dans la littérature est présenté au tableau
2.6. Il est possible d’y retrouver les principaux types de méthodes (calorimétriques,
spectroscopiques et chromatographiques), l’effet mesuré par la méthode et les informations
qu’il est possible de retirer des résultats.
33
Tableau 2.6 : P
rinc
ipal
es m
étho
des p
erm
etta
nt d
e dé
tect
er la
pré
senc
e d’
inte
ract
ions
pro
téin
es-‐p
eptid
es e
t leu
rs
impa
cts s
ur la
pro
téin
e
34
Cette revue de littérature permet donc de constater que l’étude des interactions
protéines-peptides est importante, car cela permet d’obtenir beaucoup d’informations sur la
structure et les propriétés des protéines. Dans le cas de l’α-la, des variations structurales lui
permettent d’interagir avec de nombreux ligands. Les différentes interactions étudiées
jusqu’à présent, principalement le cas des complexes HAMLET, fournissent des
informations importantes qui seront utiles afin de vérifier l’occurrence des interactions
entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la et de mieux les comprendre.
35
3. Hypothèse et objectifs
La revue de littérature a permis de démontrer que des interactions sont possibles entre le
peptide β-lg f1-8 et l’α-la. Cependant, il est aussi possible de penser que, selon les
conditions physicochimiques, ces interactions sont susceptibles d’affecter la capacité
d’auto-assemblage du peptide, de même que les propriétés physicochimiques de l’α-la. En
raison de la nature fortement hydrophobe de ce peptide, son potentiel d’interaction est
fortement dépendant de la température. De plus, l’α-la possède dans sa structure plusieurs
sites de liaisons avec des molécules hydrophobes. Ainsi, les interactions entre les deux
molécules étant potentiellement de nature hydrophobe, ces dernières sont susceptibles
d’affecter le profil de dénaturation thermique de l’α-la.
Ce travail repose donc sur l’hypothèse qu’en raison du caractère hydrophobe et de
la forte capacité du peptide ββ-lg f1-8 à floculer, sa mise en contact avec l’α-la induira
un changement au niveau des propriétés physicochimiques des deux molécules.
Deux objectifs généraux ont été définis dans le cadre de ces travaux afin de vérifier cette
hypothèse, soit :
3.1- Déterminer l’effet de la température et de la présence d’α-la sur le processus de
floculation du peptide β-lg f1-8.
3.2- Caractériser l’impact de l’interaction entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la sur la
solubilité de la protéine à différents pH et sur son profil de dénaturation thermique.
37
4. Effet de la température sur l’auto-‐assemblage du peptide β-‐lg f1-‐8 en présence d’α-‐lactalbumine
4.1 Objectifs spécifiques et approche méthodologique
L’objectif général de cette section expérimentale était de déterminer l’effet de la
température et de la présence d’α-la sur le processus de floculation du peptide β-lg f1-8 en
cours de concentration par osmose inverse (OI).
Plus spécifiquement, les travaux visaient à :
- Évaluer l’effet de la température sur le phénomène d’auto-assemblage du peptide β-
lg f1-8.
- Caractériser l’effet de la présence d’α-la sur les propriétés d’auto-assemblage du
peptide β-lg f1-8 en fonction de la température.
L’approche méthodologique développée afin de rencontrer ces objectifs a été basée
sur l’observation de la turbidité en cours d’OI de l’hydrolysat trypsique complet (HTC) seul
et en présence d’α-la, à 4 oC, 25 oC et 55 oC.
38
4.2 Matériel et méthodes
4.2.1 Produits et matériel utilisés
L’IPL (BiproTM, 95 % protéine, p/p) et l’α-la (BiopureTM, lait bovin, 92,5 % protéine, p/p)
qui ont été utilisées provenaient de Davisco Food International Inc. (Le Sueur, MN, USA).
La trypsine (pancréas bovin, type VI) usilisée pour l’hydrolyse provenait de Neova
Technologies (Abbotsford, BC, Canada). Les solutions de phases mobiles pour les analyses
HPLC ont été préparées dans l’eau de grade HPLC (PureLab Ultra, Elga Labwater,
Marlow, UK) et filtrées avec des membranes de nylon de 0,2 µm (Whatman, Dassel,
Germany).
4.2.2 Méthodes
4.2.2.1 Préparation de l’hydrolysat
L’hydrolysat trypsique a été préparé à l’échelle laboratoire selon la méthode décrite par
Pouliot et al. (2009). Une solution d’IPL (10 %, p/v) a été préparée en dissolvant 200 g de
poudre dans 2 L d’eau déminéralisée additionnée de 0,01 M de CaCl2. Le pH de la solution
a été ajusté à 8,0 avec du NaOH 2 N et la température stabilisée à 45 oC. L’hydrolyse a été
initiée par l’ajout d’une solution de trypsine (10 %, p/v) dissoute dans du HCl 0,001 N. Le
ratio enzyme:substrat était de 1:700. Le pH de la solution a été maintenu à pH 8,0 avec du
NaOH 2 N et la méthode pH-stat a été utilisée pour arrêter l’hydrolyse à un degré
d’hydrolyse (DH) de 5,6 % (del Toro & García-Carreño, 2002). La réaction a été arrêtée
par UF à l’aide d’un système Prep/Scale-TFF (Millipore Corporation, Billerica, MA) et
d’une membrane de polyéthersulfone de 10 kDa (Millipore Corporation). La filtration a été
effectuée à 45 oC à une pression de 1,4 bar. Le perméat récolté, représentant l’hydrolysat
trypsique complet (HTC), a été maintenu à 4 oC jusqu’à son utilisation.
4.2.2.2 Osmose inverse
La concentration par OI de l’HTC a été réalisée à l’aide d’un module Sepa ST (Osmonics,
Vista, CA) équipé de coupons membranaires à usage unique de 300 Da (MX07, Osmonics).
39
La vérification du débit à l’eau des membranes a été effectuée à 25 oC, avant et après la
réalisation du bloc expérimental. Les coupons membranaires n’étaient pas humidifiés
préalablement aux essais d’OI. Pour les analyses préliminaires sans α-la, le système de
filtration a été placé dans un bain d’eau à température pièce (23 oC), dans un système
thermostaté ajusté à 58 oC ou dans un bain de glace (4 oC). Pour les analyses sur l’impact
de l’α-la, le système d’OI était placé dans un bain thermostaté ajusté à 25 ou 55 oC. Un
volume de 200 mL d'HTC a été placé dans le module sous agitation jusqu’à l’atteinte de la
température désirée (voir figure 4.1). Les échantillons contenant de l’α-la (200 mL, 1 %,
p/v) étaient préparés la veille et laissés sous agitation à 4 oC toute la nuit. Le pH des
hydrolysats n’a pas été modifié avant l’étape de filtration, afin de reproduire le plus
fidèlement possible le procédé réalisé à l’échelle pilote. Les filtrations se sont déroulées à
une pression de 6,9 bars. Le volume de perméat et un échantillon pour les analyses
turbidimétriques ont été relevés toutes les 30 min pendant 240 min. Pour chacun des
traitements, l’expérience a été réalisée en triplicata. Le débit moyen a été évalué à partir de
l’équation suivante :
4.2.2.3 Analyses HPLC
Les différents lots d’hydrolysats produits ont été analysés par HPLC (1100 Series, Agilent
Technologies, Palo Alto, CA) pour vérifier l’homogénéité de leur profil peptidique. Le
système était équipé d’un détecteur UV-visible (modèle G1314A) à une longueur d’onde de
214 nm, d’un dégazeur (modèle G1312A), d’une pompe binaire (modèle G1379A), d’un
injecteur (modèle G1329A) et d’un module de chauffage de la colonne (modèle G1330B).
L’acquisition des données s’est faite à l’aide du logiciel Chem Station (version B.01.03,
Agilent Technologies). La phase stationnaire était une colonne Luna C18 (250 × 2 mm,
Phenomenex, Torrance, CA). La phase mobile était constituée du solvant A (0,10 % v/v,
Débit moyen (ml/min) = V180 (mL)180 min
où :V180 = Volume de perméat récolté après 180 min d'OI
40
acide trifluoroacétique (TFA) dans de l’eau) et du solvant B (90 % v/v, acétonitrile (ACN);
10 % v/v, eau; 0,10 % v/v, TFA). Les échantillons d’hydrolysats liquides ont été dilués
dans un rapport 1:2 avec du solvant A, pour un volume d’injection de 50 µL. L’élution des
composantes a été réalisée avec un gradient de solvant B allant de 1 à 40 % en 90 min., puis
avec une montée jusqu’à 100 % B de 90 à 125 min. Ce niveau a été ensuite maintenu
pendant 20 min. Le débit d’élution était de 0,2 mL/min. L’analyse HPLC des différents
lots hydrolysats obtenus par hydrolyse trypsique a démontré que leur profil peptidique et
leur teneur en peptide β-lg f1-8 étaient semblables (résultats non présentés) et ne pouvaient
donc pas influencer les résultats de manière importante.
4.2.2.4 Suivi de la floculation du peptide
Lors d’essais préliminaires, l’apparition de la floculation a été observée visuellement par
des prélèvements du rétentat d’OI à toutes les 30 min. Le facteur de concentration critique
(FCC) a été déterminé par la formule suivante :
Pour les analyses avec α-la, l’absorbance à 500 nm (A500) des échantillons de
rétentat d’OI, prélevés à toutes les 30 min, ont été analysés à l’aide d’un spectrophotomètre
UV-visible Multiscan Spectrum, modèle 1500 (Thermo Electron, Vantaa, Finland).
L’acquisition des données a été effectuée par le logiciel SkanIT, version 2.1.86 (Thermo
Electron).
FCC = VI
VRF
où :VI = Volume initial (mL)VRF = Volume de rétentat à l'apparition de la floculation (mL)
41
4.2.2.5 Analyses statistiques
Les figures et les analyses statistiques présentées dans cette section ont été réalisées à l’aide
du logiciel GraphPad Prism 5, version 5,04 (GraphPad Software Inc., La Jolla, CA, USA).
Les valeurs moyennes (n = 3) des débits moyens à la figure 4.3 ont subi une analyse de la
variance (ANOVA) suivi d’un test de Bonferroni (p ≤ 0,5) pour comparer tous les
traitements entre eux. Les valeurs moyennes (n = 3) d’absorbance en fonction du temps
(figure 4.4) ont subi une analyse de la variance à deux facteurs par la procédure Mixed
(Mixed ANOVA) suivi d’un test de Bonferonni (p ≤ 0,5) pour comparer tous les
traitements entre eux.
Figure 4.1 : Schéma du montage expérimental utilisé pour l’osmose inverse (OI) des mélanges peptidiques. 1) Alimentation en azote; 2) Module d’OI; 3) Bain thermostaté; 4) Contenant récepteur du perméat; 5) Plaque agitatrice; 6) Élément chauffant; 7) Pinces de fermeture du module; 8) Barreau magnétique; 9) Support de la membrane; 10) Disque membranaire; 11) Joints d’étanchéité.
42
4.3 Résultats et discussion
4.3.1 Effet de la température sur l’auto-‐assemblage du peptide β-‐lg f1-‐8
L’impact de la température sur la floculation du peptide β-lg f1-8 a été déterminé en
comparant le débit moyen de l’OI (figure 4.2a), le temps moyen de floculation (figure 4.2b)
et le FCC (figure 4.3c) à trois différentes températures (4 ± 2, 23 ± 2, 58 ± 2 oC). Comme le
démontrent ces résultats, le débit moyen augmente lorsque la température devient plus
élevée. À l’inverse, le temps moyen de floculation est plus élevé à basse température et
diminue lorsque la température augmente. Par contre, le FCC ne varie pas autant que les
deux autres paramètres, restant relativement stable aux trois niveaux de température.
L’augmentation du débit en fonction de la température peut être attribuée à la
viscosité des fluides qui a tendance à diminuer lorsque la température augmente (Fogel’son
& Likhachev, 2001). De plus, Goosen et al. (2002) ont démontré qu’une augmentation de la
température avait un effet sur le débit en modifiant certains paramètres de la membrane,
dont la taille des pores. Comme le débit de filtration augmente avec la température, le
rétentat se concentre donc plus rapidement à température plus élevée. Selon Guy et al.
(2011), la floculation du peptide β-lg f1-8 dépend de sa concentration. Ces observations
expliquent pourquoi le temps de floculation diminue alors que le débit augmente, puisqu’à
température plus élevée, la concentration critique menant à l’agrégation des unités de
peptide β-lg f1-8 est atteinte plus rapidement. Les résultats de FCC obtenus semblent donc
confirmer ceux de Guy et al. (2011), qui ont également permis de déterminer que la
température n’a pas un effet significatif sur le processus d’auto-assemblage et n’influence
donc pas directement la formation des feuillets β. Ceci pourrait donc expliquer la stabilité
des valeurs de FCC observées dans les trois séries d’OI. Un débit de filtration plus élevé
signifie donc que le rétentat se concentre plus rapidement, ce qui diminue le temps
nécessaire pour atteindre la concentration critique du peptide β-lg f1-8. Par contre, même si
la floculation se produit plus rapidement, le niveau de concentration du rétentat atteint
lorsqu’elle se produit (FCC) reste sensiblement le même aux trois températures étudiées.
43
Figure 4.2 : Débit moyen (a) du temps moyen de floculation (b) et du facteur de concentration critique (FCC) (c) pour les OI effectuées sur l’hydrolysat trypsique complet (HTC) (10 %, p/v) à basse température (4 ± 2 oC), température ambiante (23 ± 2 oC) et température élevée (58 ± 2 oC). Les valeurs sont des moyennes ± SD (n = 2).
a b
c
44
Suite à ces résultats, il a été décidé de poursuivre les travaux en excluant les
analyses à 4 oC, car le débit de filtration à cette température est très faible. De plus,
l’utilisation d’un bain thermostaté avec de la glace ne permettait pas un maintien de la
température aussi efficace que les deux autres traitements. Il a également été décidé
d’effectuer les filtrations à 55 oC plutôt qu’à 58 oC, et ce, pour éviter de trop s’approcher de
la température de dénaturation thermique de l’α-la.
4.3.2 Effet de la présence de l’α-‐la sur le processus d’auto-‐assemblage du peptide β-‐lg f1-‐8 à 25 et 55 oC
La figure 4.3 présente les valeurs de débits moyens pour les quatre traitements d’OI
effectués. Tout comme pour les résultats présentés à la section précédente, il est observé
que le débit est significativement plus élevé lorsque l’OI est réalisée à 55 oC plutôt qu’à 25 oC. Par contre, même si une certaine diminution du débit est observée en présence d’α-la,
les valeurs ne sont pas significativement différentes de celles des filtrations sans protéine.
Les travaux d’Andersen et al. (2008) ont montré que la présence d’α-la (10 %, p/v)
provoque une augmentation de la viscosité de solutions aqueuses, même si cet effet est
moins important que dans le cas de la β-lg. Dans le cadre de ces essais, il semblerait donc
que cet effet n’ait pas été assez important pour causer des différences significatives sur les
flux de perméation des OI.
45
Durant les analyses préliminaires en absence d’α-la, le phénomène de floculation
était très rapide, ainsi le moment précis où l’apparition de la floculation était observable
visuellement et a été utilisé pour marquer le départ du processus de floculation (FCC). Pour
les analyses en présence d’α-la, l’utilisation de la turbidimétrie a permis de constater que
l’apparition de la floculation était un processus plus graduel. La figure 4.4a présente
l’évolution de la turbidité du rétentat d’OI (A500) en fonction du temps pour les quatre
traitements d’OI. La figure 4.4b illustre également l’évolution de la turbidité des différents
rétentats, mais en fonction du facteur de concentration (FC). Ce facteur, qui est le rapport
entre le volume initial d’hydrolysat dans la cellule de filtration et le volume de rétentat au
temps de prélèvement, représente l’avancement de la concentration du rétentat durant la
Figure 4.3 : Débits moyens des traitements d’OI de l’hydrolysat trypsique complet (HTC) (10 %, p/v) à 25 oC sans α-‐la (OI 25-‐SA) et avec α-‐la (OI 25-‐AA), puis à 55 oC sans α-‐la (OI 55-‐SA) et avec α-‐la (OI 55-‐AA). Les valeurs sont des moyennes ± SEM (n = 3).
46
filtration. En effet, comme le débit moyen des différentes filtrations varie selon la
température, il est fort probable que, pour un temps donné, les rétentats des quatre
traitements de filtration ne soient pas tous aussi concentrés. Étant donné que la
concentration est un élément clé dans le processus d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8,
l’utilisation de ce facteur s’avère donc importante pour l’analyse des résultats.
Figure 4.4 : Évolution de l’A500 en fonction du temps (a) et du facteur de concentration (b) des traitements d’OI des hydrolysats trypsiques complets (HTC) (10 %, p/v) à 25 oC sans α-‐la (OI 25-‐SA) et avec α-‐la (OI 25-‐AA), puis à 55 oC sans α-‐la (OI 55-‐SA) et avec α-‐la (OI 55-‐AA). Les valeurs sont des moyennes ± SEM (n = 3).
a
b
47
La figure 4.4a montre que l’augmentation de la turbidité est nettement plus
importante pour le traitement OI 55-SA que pour les trois autres traitements. Selon les
analyses statistiques effectuées pour comparer l’évolution de la turbidité en fonction du
temps des traitements OI 25-AA, OI 25-SA et OI 55-AA, ces filtrations ne sont pas
significativement différentes à tous les temps analysés. Par contre, les valeurs d’A500 des
temps 210 (p ≤ 0,05) et 240 min (p ≤ 0,0001) du traitement OI 55-SA sont
significativement différentes des trois autres. La figure 4.4b démontre, quant à elle, que les
quatre traitements d’OI n’ont pas autant concentré le rétentat, celui à 55 oC sans α-la étant
le plus performant avec un FC final environ 30 % plus élevé que les autres traitements.
Comme dans la section précédente, les résultats obtenus par spectrophotométrie
démontrent qu’une augmentation de la température accélère la floculation du peptide β-lg
f1-8, mais sans influencer le processus global d’auto-assemblage. En effet, l’évolution de la
turbidité en fonction du FC montre que le traitement à 25 oC sans α-la n’atteint pas le même
niveau de concentration que le traitement équivalent à 55 oC, ce qui rejoint toujours les
conclusions de Guy et al. (2011). L’ajout d’α-la (1 %, p/v) ne semble pas non plus
influencer les résultats à 25 oC, puisque l’A500 maximale et le FC final ne sont pas
significativement différents pour les deux traitements à cette température. Par contre,
l’ajout d’α-la à 55 oC provoque une modification du profil de floculation du peptide β-lg f1-
8. En effet, même si seulement les deux dernières mesures de la courbe OI 55-SA (figure
4.4a) sont significativement différentes, il est possible d’observer que l’ajout de l’α-la
ramène l’évolution de la turbidité au même niveau qu’à 25 oC. Il est possible que le débit
moyen légèrement plus faible observé pour le traitement à 55 oC avec α-la puisse avoir
ralenti la floculation en réduisant la concentration du rétentat, ce qui peut être observé à la
figure 4.4b. Par contre, comme cette variation n’est pas significative, le débit seul ne peut
pas expliquer la diminution globale de la turbidité du rétentat.
Gurgel et al. (2001) ont démontré que l’α-la pouvait interagir avec de courts
peptides à l’aide de trois mécanismes distincts, dont un via des interactions hydrophobes.
Groleau et al. (2003) ont également mentionné dans leurs travaux que la précipitation de
l’α-la au sein d’un mélange peptidique à pH 4,0 pouvait être liée à l’interaction de la
48
protéine avec des peptides hydrophobes, dont le peptide β-lg f1-8. Il est donc possible que
dans les rétentats contenant l’α-la, celle-ci fixe des molécules de peptide β-lg f1-8 ce qui
diminue la quantité d’unités peptidiques disponibles pour le processus de floculation et
retarde l’élévation de la turbidité. Comme cet effet est remarqué à 55 oC et que le peptide β-
lg f1-8 possède un fort caractère hydrophobe (Guy, 2011), il est donc probable que ces
interactions soient de nature hydrophobe puisqu’elles sont favorisées à haute température
(Meyer et al., 2006). Par contre, la présence d’autres peptides hydrophobes au sein de
l’hydrolysat (β-lg f15-20, f142-148) et la capacité de l’α-la de lier également des peptides
plus polaires permettent de penser que d’autres éléments pourraient avoir participé au
ralentissement du processus de floculation du peptide β-lg f1-8. Davantage d’analyses
seront donc nécessaires afin de déterminer avec plus de précision l’effet de l’α-la sur l’auto-
assemblage du peptide β-lg f1-8. De plus, une meilleure caractérisation des interactions
entre les deux molécules serait également nécessaire, bien que les interactions hydrophobes
semblent être prédominantes.
4.4 Conclusion
Les résultats obtenus dans ce bloc expérimental ont permis de confirmer certains résultats
obtenus par Guy et al. (2011) et ce, en démontrant que la température n’a pas d’effet direct
sur le processus d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8. Le seul effet observé est
l’apparition plus rapide de la floculation due à la concentration plus rapide du peptide β-lg
f1-8 en OI, laquelle est provoquée par un flux de perméation plus élevé. Par contre, l’ajout
d’α-la à 55 oC provoque des changements importants du profil de turbidité du rétentat. En
effet, le facteur de concentration atteint après 240 min de filtration est près de 13 %
inférieur lorsque l’α-la est ajoutée. De plus, les valeurs d’A500 dans le temps diminuent au
même niveau que celles des filtrations à 25 oC. Ces résultats suggèrent donc que la
présence de l’α-la a un impact sur le processus de floculation du peptide β-lg f1-8 à haute
température, signe de probables interactions hydrophobes entre les deux molécules.
49
5. Effet de la présence du peptide β-‐lg f1-‐8 sur les propriétés physicochimiques de l’α-‐lactalbumine
5.1 Objectifs spécifiques et approche méthodologique
L’objectif général de cette partie expérimentale était d’évaluer l’impact de l’interaction
entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la sur la solubilité de la protéine et sur son profil de
dénaturation thermique à différents pH.
Plus spécifiquement, les travaux visaient à :
- Déterminer la solubilité de l’α-la seule ou en présence du peptide β-lg f1-8 en
fonction du pH.
- Caractériser le comportement thermique par calorimétrie différentielle à balayage
(DSC) de l’α-la seule et en présence du peptide β-lg f1-8 entre 25 et 100 oC et ce, à
des valeurs de pH de 4,5 et 7,0.
L’approche méthodologique pour réaliser ces objectifs consistait en deux blocs
expérimentaux, le premier étant l’observation de l’évolution de la turbidité de solutions
d’α-la seule, d’α-la avec le peptide β-lg f1-8 et avec l’HTC, à des pH entre pH 2,0 et 9,0. Le
second bloc expérimental a consisté à déterminer le profil de dénaturation thermique par
DSC entre 25 et 100 oC de l’α-la seule et avec le peptide β-lg f1-8 à pH 4,5 et 7,0.
50
5.2 Matériel et méthodes
5.2.1 Produits et matériel utilisés
L’IPL (BiproTM, 95 % protéine, p/p) et l’α-la (lait bovin, BiopureTM) utilisés pour les
analyses de turbidité provenaient de Davisco Food International Inc. (Le Sueur, MN, USA).
La trypsine (pancréas bovin, type VI) utilisée pour l’hydrolyse provenait de Neova
Technologies (Abbotsford, BC, Canada). L’α-la (lait bovin, type 1, ≥ 85 %) utilisée pour
les analyses DSC provenait de Sigma-Aldrich (Oakville, ON, Canada). Les tampons et
solutions de phases mobiles ont été préparés dans l’eau de grade HPLC (PureLab Ultra,
Elga Labwater, Marlow, UK) et filtrés avec des membranes de nylon de 0,2 µm (Whatman,
Dassel, Germany).
5.2.2 Méthodes
5.2.2.1 Préparation du peptide β-‐lg f1-‐8
L’hydrolysat trypsique a été préparé suivant les mêmes étapes qu’à la section 4.2.2.1, mais
à l’échelle pilote selon la méthode de Pouliot et al. (2009). Une solution d’IPL (10 %, p/v)
a été préparée en dissolvant 10 Kg de poudre dans 100 L d’eau déminéralisée et en ajoutant
0,01 M de CaCl2. Le pH de la solution a été ajusté à 8,0 avec du NaOH 2 N et la
température stabilisée à 45 oC. L’hydrolyse a débuté par l’ajout d’une solution de trypsine
(10 %, p/v) dissoute dans du HCl 0,001 N. Le ratio enzyme:substrat était de 1:700. Le pH
de la solution a été maintenu à pH 8,0 avec du NaOH 2 N et la méthode pH-stat a été
utilisée pour contrôler l’hydrolyse jusqu’à un degré d’hydrolyse (DH) de 5,6 % (del Toro &
García-Carreño, 2002). La réaction a été arrêtée par UF à l’aide d’un système GE Niro
(Hudson, WI) et d’une membrane de polyéthersulfone avec un seuil de coupure de 10 kDa
(Osmonics, Vista, CA). La filtration a été effectuée à 45 oC à une pression de 6,9 bars. Le
perméat récolté a été concentré par OI sur le même système, mais avec une membrane de
polyamide de 300 Da (DesalTM RO membrane, Osmonics) et à une pression de 17,2 bars.
La solution peptidique concentrée a été lyophilisée et entreposée à température pièce. Pour
obtenir le peptide β-lg f1-8, l’HTC a été réhydraté dans l’eau de grade HPLC à une
concentration à de 5 % (p/v), puis centrifugé à 5000 × g pendant 12 min à 20 oC. Pour
51
augmenter la pureté du peptide β-lg f1-8, le culot a été resuspendu dans un même volume
d’eau HPLC, puis centrifugé quatre (4) autres fois dans les mêmes conditions. Le peptide
purifié a été lyophilisé et conservé à -20 oC.
5.2.2.2 Analyses HPLC
La méthode HPLC utilisée pour les analyses de pureté du peptide β-lg f1-8 a été la même
que celle décrite a la section 4.2.2.3. Les échantillons lyophilisés ont été analysés suivant
leur mise en solution dans la phase mobile A à une concentration de 2 mg/mL, puis un
volume de 50 µL a été injecté dans la colonne (résultats non-présentés).
5.2.2.3 Détermination de la solubilité de l’α-‐la par turbidimétrie
Des solutions d’α-la (1 %, p/v), de l’HTC (5 %, p/v), du peptide β-lg f1-8 (10 mg/mL) et de
combinaisons d’α-la avec les autres produits (1 %, p/v d’α-la avec 5 %, p/v de l’HTC ou 10
mg/mL du peptide β-lg f1-8) ont été préparées en triplicata. Les solutions ont été agitées
pendant 15 min à température de la pièce, puis le pH a été ajusté à 2,0 avec du HCl 2 N. À
partir de cette valeur, le pH a été augmenté de pH 2,0 à 9,0 avec du NaOH 1 N. La turbidité
a été évaluée à chaque intervalle de pH par la mesure de l’absorbance à 500 nm (A500) à
l’aide d’un spectrophotomètre UV-visible Multiscan Spectrum, modèle 1500 (Thermo
Electron, Vantaa, Finland). L’acquisition des données a été effectuée par le logiciel SkanIT,
version 2.1.86 (Thermo Electron).
5.2.2.4 Analyses calorimétriques (DSC)
L’étude calorimétrique de l’α-la seule et en présence du peptide β-lg f1-8 a été effectuée par
DSC selon la méthode de Barbeau et al. (1996). L’appareil était un DSC Pyris 1 de
PerkinElmer (Woodbridge, ON, Canada). Le balayage de température a été fait de 5 à
100 oC avec une augmentation de 5 oC/min. Les échantillons ont été préparés à température
pièce et placés dans des cupules en acier inoxydable à large volume (LVC) d’une capacité
de 60 µL (PerkinElmer, Shelton, CT). Un volume d’échantillon de 40 µL a été pipeté dans
les cupules. Les solutions d’α-la seule (15 mg/50 µL) et les solutions d’α-la en présence du
52
peptide β-lg f1-8 (15:1,0 mg/50 µL) ont été préparées dans un tampon acétate 0,5 M pour
les analyses à pH 4,5 et dans un tampon phosphate 0,5 M pour les analyses à pH 7,0. Ces
valeurs ont été choisies pour les raisons suivantes : le pI de l’α-la est à pH 4,5 (forme apo-
α-la) et le comportement thermique de l’α-la a déjà été étudié à pH 7,0 (Relkin & Mulvihill,
1996; Permyakov & Berliner, 2000; McGuffey, 2004; Fernández et al., 2012). Un résumé
des conditions de préparation des échantillons est présenté au tableau 5.1.
À cause du faible volume des échantillons, leur pH final n’a pas été mesuré après leur
préparation. La calibration du système a été effectuée avec un standard d’indium, alors
qu’une capsule vide scellée a été utilisée comme référence. Des échantillons contenant les
tampons et le peptide β-lg f1-8 seul ont aussi été analysés et aucune réponse endothermique
n’a été observée (résultats non présentés). La température de dénaturation (TD) et
l’enthalpie de dénaturation (ΔHD) ont été calculées par le logiciel de l’appareil.
Description des
paramètres et des
échantillons
Sans α-‐lactalbumine Avec α-‐lactalbumine
Sans peptide
β-‐lg f1-‐8
Avec peptide
β-‐lg f1-‐8
Sans peptide
β-‐lg f1-‐8
Avec peptide
β-‐lg f1-‐8
Tampon acétate
0,5 M, pH 4,5
Volume de
40 μL
1,0 mg peptide 15 mg protéine 15,0 mg pro. +
1,0 mg pep.
50 μL de tampon 50 μL de tampon 50 μL de tampon
Triplicata Volume de 40 μL Volume de 40 μL Volume de 40 μL
Triplicata Triplicata Triplicata
Tampon phosphate
0,5 M, pH 7,0
Volume de
40 μL
1,0 mg peptide 15 mg protéine 15,0 mg pro. +
1,0 mg pep.
50 μL de tampon 50 μL de tampon 50 μL de tampon
Triplicata Volume de 40 μL Volume de 40 μL Volume de 40 μL
Triplicata Triplicata Triplicata
Tableau 5.1 : Préparation des échantillons pour les analyses DSC.
53
5.2.2.5 Analyses statistiques
Les figures et les analyses statistiques présentées dans cette section ont été réalisées à l’aide
du logiciel GraphPad Prism 5, version 5,04 (GraphPad Software Inc., La Jolla, CA, USA).
Les valeurs moyennes (n = 3) d’absorbance à la figure 5.1b ont subi une analyse de la
variance à deux facteurs par la procédure Mixed (Mixed ANOVA) suivi d’un test de
Bonferroni (p ≤ 0,5), cette fois-ci en comparant les résultats des mélanges (α-la + peptide β-
lg f1-8 et α-la + HTC) avec les résultats obtenus pour l’α-la seule (valeurs de référence).
Les valeurs moyennes (n = 3) des paramètres analysés en DSC ont subi une analyse de la
variance à deux facteurs (ANOVA) avec un test de Bonferonni (p ≤ 0,5) pour comparer
tous les traitements entre eux.
54
5.3 Résultats et discussion
5.3.1 Effet de la présence du peptide β-‐lg f1-‐8 sur la solubilité de l’α-‐la en fonction du pH
Le profil de turbidité de l’α-la a été établi par turbidimétrie entre pH 2,0 et pH 9,0 afin de
vérifier si sa mise en contact avec le peptide β-lg f1-8 ou l’HTC pouvait influencer sa
solubilité (figure 5.1a). Pour des fins de comparaison, les profils de turbidité aux mêmes pH
de solutions d’HTC et du peptide β-lg f1-8 sans α-la sont également présentés à la figure
5.1b.
Dans le cas de la protéine seule, le profil de turbidité (figure 5.1a) présente deux
zones où l’A500 est presque nulle et où l’α-la demeure soluble, soit avant pH 4,0 et après pH
5,0. Entre ces deux pH, l’élévation soudaine de l’A500 résulte de l’opacification de la
solution causée par la précipitation de la protéine. L’α-la est reconnue pour être une
protéine généralement soluble, sauf dans la région de son pI (pH 4,2-4,8) où elle précipite.
En effet, c’est dans cette zone de pH qu’elle passe sous sa forme décalcifiée (apo-α-la),
laquelle est plus hydrophobe et donc moins soluble (Schneider, 2008).
Les profils de turbidité de l’α-la en présence du peptide β-lg f1-8 et de l’HTC
(figure 5.1a) sont sensiblement différents de celui de la protéine seule. En effet, le mélange
contenant l’HTC (5 %, p/v) présente une diminution significative (p ≤ 0,0001) d’environ 75
% de la valeur d’A500 à pH 5,0 par rapport à la protéine seule. Cette diminution en présence
de l’HTC signifie que ce mélange de peptides interfère dans le processus de floculation de
l’α-la à son pI et améliore sa solubilité.
55
Figure 5.1 : Évolution de la turbidité de solutions d’α-‐la seule (1 %, p/v), d’α-‐la avec le peptide β-‐lg f1-‐8 (1 %, p/v + 10 mg/mL) et d’α-‐la avec l’hydrolysat trypsique complet (HTC) (1 %, p/v + 5 %, p/v) (a) et de solutions d’HTC (5 %, p/v) et de peptide β-‐lg f1-‐8 (10 mg/mL) sans α-‐la (b) entre pH 2,0 et pH 9,0. Les valeurs sont des moyennes ± SEM (n = 3).
a
b
56
Pour ce qui est du mélange α-la:peptide β-lg f1-8 (10 mg/mL), l’A500 suit le même
profil que la protéine seule jusqu’à pH 5,0, puis reste significativement plus élevée jusqu’à
pH 9,0 (p ≤ 0,0001) (figure 5.1a). Si la présence du peptide β-lg f1-8 n’avait aucun effet sur
l’α-la, l’A500 de la solution aurait diminué suite à la resolubilisation de la protéine au-delà
de son pI et le profil de turbidité observé aurait normalement été équivalent à celui du
peptide β-lg f1-8 seul (figure 5.1b). Cependant, les valeurs d’A500 du mélange α-la:peptide
à pH ≥ 5,0 restent élevées et sont même supérieures à celles du peptide β-lg f1-8 seul, ce
qui signifie que la présence du peptide β-lg f1-8 diminue la solubilité de l’α-la.
Dans le cas du profil de turbidité du peptide β-lg f1-8 seul (figure 5.1b), il
correspond aux observations de Guy et al. (2011) puisque la turbidité de la solution
augmente en fonction du pH. Cela signifie que l’auto-assemblage en feuillets β des unités
peptidiques progresse lorsque le pH augmente, ce qui favorise leur floculation et contribue
à augmenter l’opacité de la solution. Le profil observé pour l’HTC seul (figure 5.1b)
concorde également avec les résultats des travaux effectués précédemment sur le peptide β-
lg f1-8 (Guy et al., 2011). En effet, il a été démontré que la conformation en feuillet β et les
noyaux d’agrégation formés par l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 étaient très stables
lorsque la concentration critique de 2,0 mg/mL était atteinte. Des analyses en CD ont
montré la forte présence de feuillets β dans des solutions diluées avec une concentration
initiale ≥ 2,0 mg/mL. Par contre, les solutions de concentration initiale ≤ 2,0 mg/mL, puis
diluées à une concentration de 0,4 mg/mL, ont présenté une plus forte teneur en peptides
sous forme aléatoire. Dans le cas de l’HTC utilisé pour les présents travaux, il est donc
probable que la trop faible concentration initiale en peptide β-lg f1-8 et la dilution par
l’ajout de NaOH 1 N n’ait pas permis l’apparition d’une floculation stable, ce qui pourrait
expliquer la faible A500 aux différents pH de l’analyse.
Des travaux ont démontré que la thioflavin-T, un colorant utilisé dans la détection
de fibrilles amyloïdes, était capable de se fixer dans la structure en feuillets β de ces
fibrilles, entrainant une déstabilisation du processus d’agrégation (Krebs et al., 2005;
Schneider, 2008). L’efficacité de la thioflavin-T et d’un autre colorant (quercetin) pour
bloquer le processus de floculation de l’α-la entre pH 4,0 et 6,0 a également été étudié, mais
57
aucun impact significatif n’a pu être observé (Schneider, 2008). L’hydroxyl-propyl-β-
cyclodextrine (HPβCD), une molécule composée d’un anneau de sept molécules de propyl-
glucose formant une cavité centrale hydrophobe et une surface hydrophile, a également été
utilisée dans ces travaux. Il a été démontré que le centre hydrophobe de cette molécule
pourrait interagir avec les acides aminés hydrophobes exposés au pI de l’α-la, bloquant
ainsi les interactions protéines-protéines menant à sa précipitation (Schneider, 2008). Dans
cette optique, il est donc possible que le peptide β-lg f1-8 retrouvé dans l’hydrolysat
trypsique interagisse avec l’α-la et bloque l’accès aux zones hydrophobes exposées de la
forme décalcifiée. La diminution de la capacité d’interaction des unités protéiques entre-
elles, causée par des interactions avec les peptides, pourrait donc expliquer l’amélioration
de la solubilité de l’α-la à son pI.
Des études sur la formation de molécules H/BAMLET durant une digestion gastro-
intestinale simulée donnent des pistes d’explications intéressantes en regard de ces
observations. Les travaux de Sullivan et al. (2013) ont étudié le processus de formation de
ces molécules lors d’un traitement initial à pH acide (pH 2,5), suivi d’une remontée du pH
à 7,0 et d’une étape d’UF. Les résultats ont démontré que le passage à la forme apo-α-la ou
molten globule est essentiel pour la formation des complexes, mais que la descente à pH 2,5
et la présence d’interactions hydrophobes entre l’α-la et l’OA ne sont pas suffisantes. Par
contre, des analyses FTIR effectuées après la remontée à pH 7,0 et l’UF ont démontré que
la majorité de l’OA dans le rétentat était complexée et que les molécules BAMLET formées
ne traversaient pas la membrane. Dans le cas de nos travaux, il est donc possible que la
descente préalable à pH 2,0 favorise les interactions de nature hydrophobe entre le peptide
β-lg f1-8 et l’α-la et que la remontée du pH stabilise le complexe, lequel devient insoluble à
l’approche du pI de la protéine et le demeure par la suite. Pour déterminer qu’il s’agit bien
du comportement des deux molécules dans ces conditions, il serait intéressant de faire des
études en microscopie confocale à balayage laser (MCBL). Cette technique étant souvent
utilisée pour observer les structures dans les réseaux protéiques (Ako et al, 2009; Guéwol-
Guèdè, 2010), ce type de travaux permettrait de vérifier s’il y a vraiment présence
d’interactions entre les deux molécules ou si l’α-la est simplement entrappée dans la
structure formée par le peptide β-lg f1-8 (nanofibres, hydrogels).
58
Les effets différents observés sur la solubilité de l’α-la en présence d’HTC et du
peptide β-lg f1-8 sont un autre phénomène intéressant. En effet, les deux produits
provoquent des changements très différents au profil de turbidité de la protéine, surtout à
partir de son pI. Creusot & Gruppen (2008) ont étudié le peptide β-lg f1-45 qui possède des
propriétés d’auto-assemblage et de floculation se rapprochant de celles du peptide β-lg f1-8.
Ces auteurs ont utilisé le peptide β-lg f1-45 en vue de précipiter des protéines natives (β-lg,
α-la, BSA et caséines) pour ensuite les fractionner. Leurs résultats ont démontré que
l’utilisation de ce peptide seul provoque très peu d’agrégation des protéines, signe que sa
seule capacité de floculation n’est pas suffisante pour entrainer les protéines intactes. Les
auteurs ont conclu que ce peptide insoluble favorise les interactions peptides-peptides au
détriment des interactions protéines-peptides. Par contre, l’utilisation de fractions contenant
le peptide β-lg f1-45 et certains peptides solubles a mené au processus de précipitation
protéique recherché. Il semblerait donc qu’une certaine fraction de peptides solubles et
insolubles soit nécessaire pour favoriser les interactions protéines-peptides et faire
précipiter les protéines intactes. Bien que les mécanismes expliquant ce phénomène ne
soient pas encore élucidés, il est possible que le même effet puisse se retrouver dans le cas
du peptide β-lg f1-8, ce qui pourrait expliquer les résultats différents entre les mélanges α-
la:HTC et α-la:peptide β-lg f1-8. Il serait donc intéressant de fractionner différemment
l’hydrolysat et de refaire des essais afin de préciser l’effet du peptide β-lg f1-8 et de la
portion peptidique soluble de l’hydrolysat dans les changements observés sur la solubilité
de l’α-la.
59
5.3.2 Effet de la présence du peptide β-‐lg f1-‐8 sur le profil de dénaturation thermique de l’α-‐la
Tout comme dans les travaux de Barbeau et al. (1996) sur la β-lg, des analyses en DSC ont
été effectuées pour déterminer l’effet de la présence du peptide β-lg f1-8 sur la dénaturation
de l’α-la. Les thermogrammes obtenus pour l’α-la seule et pour le mélange α-la:peptide β-
lg f1-8 à pH 4,5 et 7,0 sont présentés à la figure 5.4.
Figure 5.2 : Thermogrammes obtenus par DSC de l’α-‐la seule et en présence du peptide β-‐lg f1-‐8. Les courbes illustrées sont la moyenne de trois analyses.
60
L’analyse de ces courbes permet de déterminer les principaux paramètres
thermodynamiques liés à la dénaturation thermique de l’α-la. La température de
dénaturation (TD), qui est la température maximale du pic endothermique, représente la
stabilité thermique de la protéine (Barbeau et al., 1996; McGuffey, 2004). Pour une analyse
thermodynamique plus complète, les valeurs d’enthalpie de dénaturation (ΔHD) ont
également été déterminées. L’enthalpie de dénaturation est généralement reliée à la quantité
d’énergie libérée lors du déplissement de la protéine. Cette libération d’énergie est due au
bris des liens qui maintiennent en place l’organisation de la structure secondaire de la
protéine, mais également de sa structure tertiaire et des interactions protéines-protéines
présentes. Cette information est obtenue par le calcul de l’aire sous le pic de dénaturation
thermique du thermogramme (Barbeau et al., 1996, Höhne et al, 2003b). Les valeurs TD et
ΔHD calculées à partir des thermogrammes obtenus lors des analyses de l’α-la seule et du
mélange α-la:peptide β-lg f1-8 sont présentées à la figure 5.3.
Étant donné que le peptide β-lg f1-8 n’est soluble qu’à des valeurs de pH inférieures
à 2,0, des essais à ce pH ont également été effectués. Par contre, la très grande
concentration d’α-la et de peptide β-lg f1-8 nécessaire dans l’échantillon pour obtenir un
signal de l’appareil a provoqué la formation de gels dans les solutions, rendant toute
analyse impossible. De plus, les travaux effectués sur le sujet ont démontré qu’à des valeurs
de pH aussi basses, aucun pic endothermique ne peut être détecté (Bernal & Jelen, 1984;
McGuffey, 2004). Les analyses à ce pH ont donc été abandonnées.
61
Les valeurs de TD obtenues pour l’α-la seule sont comparables à celles obtenues
dans la littérature, bien qu’elles soient légèrement différentes (61,5 oC à pH 4,5 et 63,1-64,0 oC à pH 7,0). Toutefois, les valeurs publiées varient grandement entre elles tel que présenté
précédemment dans le tableau 2.3. En effet, certains auteurs arrivent à la conclusion que les
valeurs TD et ΔHD augmentent en fonction du pH, alors que d’autres obtiennent des valeurs
plus élevées à pH 4,5. Comme mentionné à la section 2.2.2.1, tous les paramètres utilisés
en DSC peuvent avoir un impact sur la température de dénaturation de la protéine. Selon
McGuffey (2004), les variations de TD retrouvées dans la littérature s’expliquent surtout par
l’utilisation de tampons différents et de très hautes concentrations en protéines pour
compenser le manque de sensibilité des appareils. C’est d’ailleurs le cas pour nos travaux
où une concentration très élevée en α-la a été utilisée afin d’obtenir un signal suffisamment
élevé de l’appareil DSC. Ce paramètre a influencé particulièrement les valeurs ΔHD qui
sont largement inférieures à celles mesurées par McGuffey (2004) à pH 7,0 (51,34 kJ/mol
vs 261-309 kJ/mol).
Figure 5.3 : Effet du pH sur l’α-‐la seule et en présence du peptide β-‐lg f1-‐8 sur la température (a) et l’enthalpie (b) de dénaturation. Les valeurs sont des moyennes ± SEM (n = 3). Dans un même graphique, les résultats marqués d’une lettre différente sont significativement différents (p ≤ 0,5).
a b
62
Selon Biliaderis (1983), une trop grande concentration en protéine favorise les
interactions protéines-protéines durant le chauffage, provoquant ainsi une certaine
agrégation. L’agrégation protéique est un phénomène exothermique, à l’inverse de la
dénaturation qui est un processus endothermique. La détermination de ΔHD devient donc
plus complexe, car le pic observé sur le thermogramme est la somme d’un processus
endothermique (positif) et exothermique (négatif). Les analyses statistiques démontrent tout
de même un impact significatif du pH sur les paramètres thermodynamiques, ce qui permet
d’obtenir certaines informations. La plus faible valeur ΔHD obtenue à pH 4,5 (39,25
kJ/mol) démontre par exemple que la structure secondaire de la protéine devient moins
structurée par le passage vers sa forme décalcifiée (Griko et al., 1994; McGuffey, 2004).
Ainsi, il y a moins de liens à briser au sein de la molécule ce qui demande moins d’énergie
et se traduit par un pic endothermique moins important (Ragone, 2001).
Les analyses statistiques démontrent également qu’il n’y a aucune différence
significative entre les valeurs pour l’α-la seule et le mélange α-la:peptide β-lg f1-8 pour les
deux paramètres étudiés. Il semble donc que la mise en contact de l’α-la avec le peptide β-
lg f1-8 ne provoque pas de modification du profil de dénaturation thermique de la protéine.
Par contre, cela ne signifie pas qu’il n’y a pas d’interactions entre les deux molécules. Des
études en DSC et en CD ont démontré que les molécules HAMLET, obtenues par la mise
en contact de l’α-la et de l’OA, ont une stabilité thermique égale ou légèrement inférieure à
la protéine native selon les conditions expérimentales (teneur en Ca2+, force ionique du
tampon, présence d’EDTA, etc.) (Fast et al., 2005). En effet, cette association donnerait un
complexe ne possédant pas une stabilité thermique optimale, mais qui serait assez stable au
niveau cinétique pour se former et demeurer ordonné (kinetically trapped complex). Étant
donné le caractère hydrophobe du peptide β-lg f1-8 et la nature hydrophobe des interactions
menant à la formation des complexes HAMLET, une association entre le peptide et l’α-la
suivant le même processus serait envisageable. Ainsi, cette mise en contact pourrait
expliquer les résultats obtenus par DSC dans la présente étude, soit une absence de
changements significatifs dans le profil de dénaturation thermique de la protéine.
63
L’absence de modification du profil de dénaturation thermique de l’α-la par l’ajout
du peptide β-lg f1-8 à pH 7,0 peut également être expliquée par le fait que normalement, la
protéine s’y trouve sous sa forme holo-α-la calcifiée. Barbana et al. (2008) ont démontré
que l’holo-α-la n’est pas capable de lier des molécules d’acides gras et donc de former le
complexe HAMLET avec l’OA. Si le principe d’interaction du peptide β-lg f1-8 avec l’α-la
se rapproche de celui de l’OA, il est donc peu probable qu’il puisse interagir avec la
protéine à pH 7,0 et provoquer une modification de son profil de dénaturation. Un
chauffage des échantillons ou l’utilisation d’apo-α-la à pH 7,0 pourrait éventuellement
permettre de vérifier cette hypothèse.
5.4 Conclusion
Les résultats présentés dans cette section ont permis de démontrer que la présence du
peptide β-lg f1-8 provoque des changements au niveau de la solubilité de l’α-la à différents
pH. La mise en contact de l’α-la avec l’HTC a provoqué une augmentation de la solubilité
de la protéine à son pI, tandis que le mélange α-la:peptide β-lg f1-8 a causé une forte
diminution de sa solubilité à des valeur de pH supérieures au pI. Ces différences entre les
profils de turbidité suggèrent que l’action du peptide varie selon qu’il est compris dans une
fraction contenant des peptides solubles ou non. Étant donné que les effets des substrats sur
la solubilité de l’α-la sont principalement observés autour de son pI et qu’il s’agit d’une
région où la protéine devient plus hydrophobe (forme apo), il est probable que ces
interactions soient de nature hydrophobe. Par contre, en DSC, la présence du peptide β-lg
f1-8 n’influence pas le profil de dénaturation thermique de l’α-la puisqu’aucun changement
significatif n’a été mesuré pour les valeurs TD et ΔHD à pH 4,5 et pH 7,0. Il serait donc
intéressant de fractionner davantage l’HTC afin de déterminer, avec plus de précision, quels
sont les impacts possibles de son contenu peptidique sur l’α-la et quelle est la part du
peptide β-lg f1-8 sur ces impacts.
65
6. Discussion générale
L’hydrolyse enzymatique des protéines du lactosérum est une pratique de plus en plus
courante puisqu’elle permet d’obtenir une large variété de peptides, dont certains possèdent
une activité fonctionnelle et/ou biologique. En outre, l’hydrolyse trypsique de la β-lg libère
le peptide β-lg f1-8, un fragment qui possède un fort caractère hydrophobe et dont la
capacité d’auto-assemblage permet la formation de nanofibres et d’hydrogels. Des travaux
antérieurs ont démontré que des fractions peptidiques contenant ce peptide pouvaient
modifier le profil de dénaturation thermique de la β-lg (Barbeau et al., 1996), mais aussi de
provoquer la floculation de l’α-la (Groleau et al., 2003). Dans le cadre d’essais
préliminaires, il a aussi été observé que la mise en contact du peptide β-lg f1-8 avec des
protéines du lactosérum réduisait le contenu en protéines solubles des solutions,
principalement leur teneur en α-la. À partir de ces observations, suggérant l’occurrence
d’interactions entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la, nos travaux visaient à étudier l’impact de
ces interactions sur certaines propriétés physicochimiques des deux molécules. Dans un
premier temps, l’effet de la température et de la présence d’α-la sur le processus de
floculation du peptide β-lg f1-8 a été étudié en cours de concentration par osmose inverse
afin d’évaluer leurs effets sur le phénomène d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8
(objectif 1). Les principaux résultats obtenus ont montré que :
- La température n’a pas d’effet direct sur le processus d’auto-assemblage du peptide β-lg
f1-8 au cours de sa concentration par OI. Par contre, une augmentation de la température
accélère sa floculation en augmentant le débit de filtration, ce qui permet de concentrer
le rétentat plus rapidement et par conséquent, d’atteindre la concentration critique du
peptide β-lg f1-8 plus rapidement.
- L’ajout d’α-la n’a pas d’impact significatif sur les débits de filtration, autant à 25 oC
qu’à 55 oC, bien qu’une légère diminution ait été observée en présence de la protéine à
ces deux températures. Cet effet pourrait s’expliquer par la capacité de l’α-la à
augmenter la viscosité des solutions contenant le peptide β-lg f1-8.
66
- À 55 oC, l’ajout de l’α-la aux solutions de peptides retarde de façon significative
l’apparition de la floculation du peptide β-lg f1-8. Étant donné que la diminution du
débit causée par l’ajout de la protéine n’est pas significative, ce retard pourrait
s’expliquer par l’établissement d’interactions entre l’α-la et le peptide β-lg f1-8,
diminuant ainsi la teneur en peptide libre dans le rétentat. Il serait alors nécessaire
d’atteindre un plus haut niveau de concentration du peptide pour observer sa floculation
dans le rétentat. Ce phénomène ayant été observé uniquement à 55 oC, les interactions
pourraient être de nature hydrophobe puisque ces dernières sont favorisées à haute
température.
Le deuxième objectif de nos travaux visait à caractériser l’effet de la présence d’α-la
sur les propriétés d’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8 en fonction de la température en
étudiant l’impact de l’interaction des deux molécules sur la solubilité de l’α-la à différents
pH et sur son profil de dénaturation thermique. Les principaux résultats obtenus lors de
cette étude ont démontré que :
- La solubilité (A500) de l’α-la en fonction du pH est typique de la protéine, avec une forte
diminution dans la région de son pI (pH 4,0-5,0), indiquant sa précipitation due à
l’augmentation des interactions protéines-protéines suite à la diminution de sa capacité à
lier le calcium.
- La mise en contact de l’hydrolysat trypsique complet (HTC) améliore fortement (≈ 75
%) la solubilité de la protéine dans la région de son pI. Cette amélioration pourrait être
attribuée à des interactions entre les peptides de l’HTC, contenant le fragment β-lg f1-8,
avec la région hydrophobe de l’α-la qui est davantage exposée à son pI. Ces interactions
pourraient ainsi interférer avec les interactions protéines-protéines entre les unités d’α-
la, ce qui entraînerait une amélioration de sa solubilité.
- La mise en contact du peptide β-lg f1-8 avec l’α-la provoque une diminution de la
solubilité de la protéine aux valeurs de pH supérieures à son pI. Il est difficile de fournir
67
une explication claire à ce phénomène, mais il est probable que la variation du pH des
solutions (diminution à pH 2,0, puis remontée à pH 7,0) mène à la formation de
complexes insolubles suivant le principe de formation des complexes H/BAMLET.
- La mise en contact du peptide β-lg f1-8 seul ou au sein de l’HTC ne provoque pas le
même effet sur l’α-la. Il est donc possible que des interactions différentes s’établissent
avec la protéine selon la nature des peptides présents dans les mélanges.
- Les résultats obtenus par DSC pour la protéine seule sont différents de ceux rapportés
dans la littérature, surtout au niveau de l’enthalpie de dénaturation (ΔHD). Ces
différences sont principalement causées par la concentration trop élevée en α-la dans les
échantillons, ce qui a tendance à faire diminuer les signaux thermiques de dénaturation.
- Les analyses DSC ont démontré que la présence du peptide β-lg f1-8 n’influençait pas
les paramètres thermodynamiques (TD, ΔHD) de l’α-la à pH 4,5 et 7,0. Néanmoins, ces
résultats ne signifient pas qu’il y a absence d’interactions entre les deux molécules. En
effet, il existe des formes d’interactions protéines-ligands qui arrivent à former des
complexes stables (ex : molécules HAMLET), mais dont la résistance à la dénaturation
thermique est relativement équivalente à celle de la protéine native. Des interactions
entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la pourraient donc être établies, mais n’auraient pas
d’influence sur la stabilité thermique de la protéine.
Enfin, des résultats contradictoires ont été obtenus en turbidimétrie et DSC pour les
mélanges α-la:β-lg f1-8 à pH 7,0. En effet, la présence du peptide a modifié le profil de
solubilité de l’α-la à ce pH, alors qu’aucun effet n’a été détecté sur les valeurs de TD et ΔHD
de la protéine à ce même pH. Ce résultat pourrait s’expliquer par le très faible volume des
échantillons analysés en DSC, lequel n’a pas permis un ajustement préalable des solutions à
pH 2,0. Or, il est connu que les interactions entre l’α-la et des ligands se produisent
généralement lorsque l’α-la est sous sa forme apo ou molten globule qui apparaît surtout à
pH acide. En DSC, il est donc probable que les interactions protéines-peptides n’aient pas
été favorisées puisque les molécules ont été solubilisées directement à pH 7,0. Une autre
68
différence majeure entre les analyses de turbidité et celles en DSC est la température,
laquelle demeure constante pendant les analyses de turbidité alors qu’un gradient (5 oC/min) est appliqué en DSC. Comme les interactions hydrophobes sont favorisées à
température plus élevée et qu’elles sont probablement responsables des interactions entre
l’α-la et le peptide β-lg f1-8, elles n’ont donc pas été influencées de la même manière avec
les deux méthodes. Il serait donc intéressant de reprendre ces analyses sur une plus large
gamme de températures et de pH dans les deux cas, pour tenter cette fois-ci d’obtenir des
conditions optimales pour permettre les interactions entre l’α-la et le peptide β-lg f1-8.
L’hypothèse à la base de ces travaux de recherche était qu’en raison du caractère
hydrophobe et de la forte capacité du peptide β-lg f1-8 à floculer, sa mise en contact avec
l’α-la induirait un changement au niveau des propriétés physicochimiques des deux
molécules. Les résultats obtenus dans le cadre de ce travail permettent de confirmer cette
hypothèse. En effet, il a été démontré que la présence d’α-la dans le rétentat OI de
l’hydrolysat trypsique complet (HTC) avait pour effet de ralentir le processus de floculation
du peptide β-lg f1-8. Également, la mise en contact des deux molécules a entraîné une
modification de la solubilité de la protéine entre pH 2,0 et 9,0. Par contre, en présence de
peptide β-lg f1-8, aucun changement n’a été observé dans le profil de dénaturation
thermique de l’α-la à pH 4,5 et 7,0. Étant donné que les effets observés se sont
principalement manifestés à haute température et autour du pI de l’α-la, il est probable que
les interactions entre les deux molécules soient de nature hydrophobe.
69
7. Conclusion et perspectives
L’objectif à moyen terme de nos travaux était de vérifier si les propriétés d’agrégation du
peptide β-lg f1-8 pourraient mener à de nouvelles voies de fractionnement des protéines et
peptides du lactosérum, notamment dans le cas de l’α-la. Cet objectif reposait sur les
résultats d’essais préliminaires qui avaient démontré une certaine affinité entre cette
protéine et le peptide β-lg f1-8. Dans le présent travail, il a été démontré que le peptide β-lg
f1-8 peut influencer certaines propriétés physicochimiques de solutions d’α-la. Ce peptide
pourrait donc, éventuellement, être utilisé dans un procédé de fractionnement de l’α-la. Par
contre, des connaissances supplémentaires seraient nécessaires afin de mettre au point ce
type de procédé, soient :
- Déterminer la nature exacte des interactions entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la qui
mènent à la formation des complexes. Ces informations permettraient alors
d’identifier les paramètres à optimiser pour favoriser ces interactions et stabiliser les
complexes.
- Améliorer notre compréhension de l’effet du peptide β-lg f1-8 seul et des autres
peptides contenus dans l’HTC sur les paramètres physicochimiques de l’α-la. Cette
étape pourrait être réalisée en préparant des fractions peptidiques de nature
différente (ex : chargée, neutre, hydrophobe, etc.) à partir de l’HTC.
Pour réussir à réaliser ces objectifs, des analyses en spectroscopie infrarouge (FTIR)
et en fluorimétrie seraient nécessaires. Ces analyses permettraient de mieux comprendre les
interactions entre le peptide β-lg f1-8 et l’α-la en déterminant les impacts de leur mise en
contact sur la structure de l’α-la. Aussi, des analyses en microscopie confocale à balayage
laser permettraient de vérifier visuellement l’occurrence d’interactions entre les deux
molécules et d’observer le réseau protéines-peptides formé par ces interactions.
70
Le peptide β-lg f1-8 n’est certainement pas encore exploitable au niveau
commercial. Par contre, sa méthode de production est bien définie et sa purification à partir
de l’hydrolysat est très simple, ne nécessitant qu’une série de lavages avec de l’eau et des
étapes de centrifugation. De plus, cette méthode de purification, qui serait facilement
applicable en industrie, produit une fraction d’une très grande pureté (≥ 90 %) et permet de
retirer la presque totalité du peptide contenu dans l’HTC. En effet, alors que le peptide
correspond à environ 5,2 % de la masse totale de la β-lg, il est possible de le produire et de
le purifier en obtenant des rendements entre 2 et 5 %. En recherche, comme la production
d’hydrolysats afin d’obtenir des fractions peptidiques à activité biologique est de plus en
plus utilisée, les données sur le peptide β-lg f1-8 pourraient mener à de nouvelles méthodes
de fractionnement et de purification de peptides bioactifs. Étant donné le caractère
hydrophobe du peptide, il serait également intéressant de vérifier si des interactions sont
possibles avec des acides gras. Des essais préliminaires (non publiés) ont permis de réduire
la teneur en matière grasse d’un lactosérum issu de la production de cheddar de 0,48 %
(m/v) à 0,03 % (m/v). Ces essais ont été réalisés en ajoutant le peptide β-lg f1-8 au
lactosérum suivi de son acidification à pH 2,0, puis le mélange a subi un traitement
thermique modéré avant de remonter le pH et le centrifuger. Ces possibles interactions
entre le peptide β-lg f1-8 et des acides gras pourraient donc mener à la mise au point d’une
méthode de délipidation du lactosérum qui pourrait être utilisée lors de la production de
CPL et d’IPL.
Une fois bien compris, l’effet sur la solubilité observée lors du mélange de l’α-la
avec l’HTC pourrait avoir des applications au niveau industriel, particulièrement dans la
production de breuvages enrichis en α-la. En effet, l’augmentation de la solubilité de l’α-la
par les peptides de l’HTC pourrait permettre d’empêcher la floculation de la protéine dans
les cas où le pH des produits doit être ajusté à des valeurs près du pI de l’α-la. C’est en effet
le cas pour certaines boissons sportives où le pH, initialement très acide, doit être remonté
pour éviter une saveur astringente, ce qui peut entraîner la précipitation de l’α-la. Par
contre, même si les résultats de ces travaux de recherche suggèrent que des mélanges
peptidiques pourraient être utilisés comme agents stabilisants des protéines alimentaires,
cette approche demeure encore peu développée et mériterait d’être approfondie davantage.
71
8. Bibliographie
Ako, K.; Durand, D.; Taco, N.; Becu, L. Quantitative analysis of confocal laser scanning microscopy images of heat-set globular protein gels. Food Hydro. 2009, 23, 1111-1119 Allain, A.-F. Étude des relations entre les propriétés structurales et rhéologiques de la β-lactoglobuline. Université Laval, Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, 1998, Mémoire de maîtrise Allgeier, S.; Alspach, B.; Vickers, J. Overview of membrane filtration. In Membrane filtration guidance manual; Allgeier, S.; Alspach, B.; Vickers, J.; United States Environmental Protection Agency, Office of Water : Cincinnati, Ohio, 2005, 2.1-2.55 Andersen, J.; Ipsen, R.; Karlsson A. O. Relative influence of α-lactalbumin and β-lactoglobulin on the viscosity of whey protein solutions. Annu. Trans. Nord. Rheol. Soc. 2008, 16 Arroyo-Maya, I. J.; Rodiles-López, J.O.; Cornejo-Mazón, M.; Gutiérrez-López, G. F.; Hernández-Arana, A.; Toledo-Núñez, C.; Barbosa-Cánovas, G. V.; Flores-Flores, J. O.; Hernández-Sánchez, H. Effet of different treatments on the ability of α-lactalbumin to form nanoparticles. J. Dairy Sci. 2012,95, 6204-6214 Baker, N. E.; Baker, M. H., Molecular structure, binding properties and dynamics of lactoferrin. Cell. Mol. Life Sci. 2005, 62, 2531-2539 Barbana, C.; Perez, M. D.; Pocovi, C.; Sanchez, L.; Wehbi, Z. Interaction of human α-lactalbumin with fatty acids : Determination of binding parameters. Biochem. 2008, 73, 711-716 Barbeau, J.; Gauthier, S. F.; Pouliot, Y. Thermal stabilization of β-Lactoglobulin by whey peptide fractions. J. of Agr. Food Chem. 1996, 44, 3939-3945 Bernal, V.; Jelen, P. Effect of calcium binding on thermal denaturation of bovine α-lactalbumin. J. Dairy Sci. 1984, 67, 1452-2454 Biliaderis, C. G. Differential scanning calorimetry in food research - A Review. Food Chem. 1983, 10, 239-265 Boye, J. I.; Alli, I.; Ismail, A. A. Use of differential scanning calorimetry and infrared spectroscopy in the study of thermal and structural stability of α-lactalbumin. J. Agric. Food. Chem. 1997, 45, 1116-1125
72
Bramaud, C.; Aimar, P.; Daufin, G. Whey protein fractionation : Isoelectric precipitation of α-lactalbumin under gentle heat treatment. Biotechnol. Bioeng. 1997, 56, 391-397 Brinkmann, C. R.; Thiel, S.; Otzen, D. E. Protein-fatty acid complexes : biochemistry, biophysics and function. FEBS J. 2013, 280, 1733-1749
Bylund, G. Whey Processing. In Handbook of milk and dairy products, First edition.; Bylund, G.; Tetra Pak Processing Systemps AB : Lund, Sweden, 1995; 331-346 Caessens, P.; Visser, S.; Gruppen, H.; Voragen, A. β-lactoglobulin hydrolysis. 1. Peptide composition and functionnal properties of hydrolysates obtained by the action of plasmin, trypsin and Staphylococcus aureus V8 protease. J. Agric. Food Chem. 1999, 47, 2973-2979 Choi, J.; Horne, D. S.; Johnson, M. E.; Lucey, J. A. Effects of the concentration of insoluble calcium phosphate associated with casein micelles on the functionality of directly acidified cheese. J. Dairy Sci. 2008, 91, 513-522 Cliffe, S. G. R.; Grant, A. W. Calcium-binding constant of trypsin and trypsinogen. Biochem. J. 1981, 193, 655-658 Conseil des industriels laitiers du Québec (CILQ). (Page consultée le 24 juin 2013). « Fiche d’information – Substances laitières modifiées », Adresse URL : http://www.cilq.ca/userfiles/file/1_Ingrédient%20laitiers(1).pdf Creighton, T. E. Physical interactions that determine the properties of proteins. In Proteins – Structure and molecular properties, Second edition; Creighton, T. E.; W. H. Freeman and Company: New York, USA, 1993; 139-170 Creusot, N.; Gruppen, H. Hydrolysis of whey protein isolate with Bacillus licheniformis protease : Fractionation and identification of aggregating peptides. J. of Agr. Food Chem. 2007, 55, 9241-9250
Creusot, N.; Gruppen, H. Hydrolysis of whey protein isolate with Bacillus licheniformis protease : Aggregating capacities of peptide fractions. J. of Agr. Food Chem. 2008, 56, 10332-10339 del Toro, A. N.; García-Carreño, F. L. Evaluation of the progress of protein hydrolysis. In Current Protocols in Food Analytical Chemistry. First edition; Wrolstad, N. E.; Acree, T. E.; An, H.; Decker E. A.; Penner M. H.; Reid, D. S.; Schwartz, S. J.; Shoemaker, C. F.; Smith, D. M.; Sporns, P.; John Miley & sons, inc.: New York, NY, 2002; B2.2.1-B.2.2.14 Diaz, O.; Pereira, C. D.; Cobos, A. Functional properties of ovine whey protein concentrates produced by membrane technology after clarification of cheese manufacture by-products. Food Hydrocolloids. 2004, 18, 601-610
73
de Wit, J. N. Nutritional and functional characteristics of whey proteins in food products. J. Dairy Sci. 1998, 81, 597-608 de Wit, J. N. From milk to whey. In Lecturer’s handbook on whey and whey products, First edition; de Wit, J.N.; European Whey Products Association : Brussels, Belgium, 2001; 8-15 Diarrassouba, F.; Remondetto, G.; Liang, L.; Garrait, G.; Beyssac E.; Subirade, M. Effects of gastrointestinal pH conditions on the stability of the β-lactoglobulin/ vitamin D3 complex and on the solubility of vitamin D3. Food Res. Inter. 2013, 52, 515-521 El-Sayed, M. M. H.; Chase, H. A. Separation of the two major whey proteins using cation-exchange adsorption. Proc. World Congr. Eng. Comput. Sci. 2008
Eynard, L.; Iametti, S.; Relkin, P.; Bonomi, F. Surface hydrophobicity changes and heat-induced modifications of α-lactalbumin. J. Agric. Food Chem. 1992, 40, 1731-1736 Fast, J.; Mossberg, A.-K.; Svanborg, C.; Linse, S. Stability of HAMLET−A kinetically trapped α-lactalbumin oleic acid complex. Prot. Sci. 2005, 14, 329-340 Fernández, A.; Menéndez, V.; Riera, F. A. α-lactalbumin solubilisation from a precipitated whey protein concentrates fractions : pH and calcium concentration effects. Int. J. Food Sci. Technol. 2012, 47, 467-474 Fisher, W.; Gustafsson, L.; Mossberg, A-K; Gronli, J.; Morl, S.; Bjerkvig, R.; Svanborg, C. Human α-lactalbumin made lethal to tumor cells (HAMLET) kills human glioblastoma cells in brains xenografts by an apoptosis-like mechanism and prolongs survival. Cancer Res. 2004, 64, 2105-2112 Filion, M.-M. Amélioration de la stabilité thermique du lait par modulation du potentiel d'oxydoréduction. Université Laval. 2006, Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, Mémoire de maîtrise Fogel’son, R. L.; Likhachev E. R. Temperature Dependence of Viscosity. Tech. Phys. 2001, 46, 1056-1059 Gauthier, S. F.; Pouliot, Y. Functional and Biological properties of peptides obtained by hydrolysis of whey proteins. J. Dairy Sci. 2003, 86, 78-87 Goodall, S.; Grandison, A. S.; Jauregi, P. J.; Price, J. Selective separation of the major whey proteins using ion exchange membranes. J. Dairy Sci. 2008, 91, 1-10 Goosen, M. F. A.; Sablani, S. S.; Al-Maskari, S. S.; Al-Belushi, A. H.; Wilf, M. Effect of feed temperature on permeate flux and mass transfer coefficient in spiral-wound reverse osmosis systems. Desal. 2002, 144, 367-372
74
Graveland-Bikker, J. F.; Schaap, I. A. T.; Schmidt, C. F.; de Kruif, C. G. Structural and mechanical study of a self-assembling protein nanotube. Nano Lett. 2006, 6, 616-621
Graveland-Bikker, J. F; de Kruif, C. G. Unique milk protein based nanotubes: Food and nanotechnology meet. Food Sci. Technol. 2006, 17, 196-203 Griko, Y. V.; Freire, E.; Privalov, P. L. Energetics of the α-lactalbumin states : A calorimetric and statistical thermodynamic study. Biochem. 1994, 33, 1889-1899 Groleau, P.-E.; Morin, P.; Gauthier, S. F.; Pouliot, Y. Effect of physiochemical conditions on peptide-peptide interactions in a tryptic hydrolysate of β-lactoglobulin and identification of aggregating peptides. J. of Agr. Food Chem. 2003, 51, 4370-4375 Gross, J. Caractérisation de surfaces biofonctionnalisées pour l’étude de protéines de la chaîne respiratoire par spectroscopie infrarouge couplée à l’électrochimie. Université de Strasbourg, Institut de chimie, 2011, Thèse de doctorat Guéwoul-Guèdè, A. K. Etude de la structure des gels protéiques par Microscopie confocale. Université du Maine, Faculté des sciences et technologies, 2010, Thèse de doctorat
Gurgel, V. P.; Carbonell, G. R.; Swaisgood, E. H. Studies of the binding of α-lactalbumin to immobilized peptide ligands. J. of Agr. Food Chem. 2001, 49, 5765-5770 Guy, M.-M.; Tremblay, M.; Voyer, N.; Gauthier, S. F.; Pouliot, Y. Formation and stability of nanofibers from a milk-derived peptide. J. of Agr. Food Chem. 2011, 59, 720-726
Guy, M.-M. Caractérisation des interactions moléculaires menant à l’auto-assemblage du peptide β-lg f1-8. Université Laval. 2011, Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, Mémoire de maîtrise Ha, E.; Zemel, M. B. Functional properties of whey, whey components, and essential amino acids: mechanisms underlying health benefits for active people. J. Nutr. Biochem. 2003, 14, 251-258 Ho CS, J.; Rydström, A.; Trulsson, M.; Bålfors, J.; Storm, P.; Puthia, M.; Nadeem, A.; Svanborg, C. HAMLET: Functional properties and therapeutic potential. Future Oncol. 2012, 8, 1301-1313 Höhne, G. W. H.; Hemminger, W.F.; Flammersheim, H.-J. Introduction. In Differential Scanning Calorimetry, Second Edition; Höhne, G. W. H.; Hemminger, W.F.; Flammersheim H.-J.; Springer : Berlin, Germany, 2003a, 1-7
75
Höhne, G. W. H.; Hemminger, W.F.; Flammersheim, H.-J. Applications of differential scanning calorimetry. In Differential Scanning Calorimetry, Second Edition; Höhne, G. W. H.; Hemminger, W.F.; Flammersheim H.-J.; Springer : Berlin, Germany, 2003b, 147-244 Hünenberger, P. H.; Börjesson, U.; Lins, R. D. Electrostatic interactions in biomolecular systems. Chimia, 2001, 55, 861-866 Jackson, M.; Mantsch, H. The use and misuse of FTIR spectroscopy in the determination of protein structure. Crit. Rev. Biochem. Mol. Biol. 1995, 30, 95-120 Kamau, S. M.; Cheison, S. C.; Chen, W.; Liu, X.-M.; Lu, R.-R. Alpha-lactalbumin : It’s production technologies and bioactive peptides. Compr. Rev. Food Sci. Saf. 2010, 9, 197-212 Kim, J. I.; Choi, D. Y.; Ho Row, K. Separation of whey by anion-exchange membranes. Korean J. Chem. Eng. 2003, 20, 538-541 Kontopidis, G.; Holt, C.; Sawyer, L. Invited review : β-lactoglobulin : Binding properties, structure and function. J. Dairy Sci. 2004, 87, 785-796 Krebs, M. R. H.; Bromley, E. H. C.; Donald A. M. The binding of thioflavin-T to amyloid fibrils: localisation and implications. J. Struct. Biol. 2005, 149, 30-37
Krissansen, G. W. Review: Emerging Health Properties of Whey Proteins and Their Clinical Implications. J. Am. Coll. Nutr. 2007, 26, 713-723 Kuwajima, K. The molten-gobule state of α-la. FASEB J. 1996, 10, 102-109 London, N.; Movshovitz-Attias, D.; Schueler-Furman, O. The structural basis of peptide-protein binding strategies. Struct. 2010, 18, 188-199 Madureira, A. R.; Tavares, T.; Gomes, A. M. P.; Pintado, M. E.; Malcata, F. X. Invited review: Physiological properties of bioactive peptides obtained from whey proteins. J. Dairy. Sci. 2010, 93, 437-455 Markus, C. R.; Olivier, B.; de Haan, E. HF. Whey protein rich in α-lactalbumin increases the ratio of plasma tryptophan to the sum of the other large neutral amino acids and improve cognitive performances in stress-vulnerable subjects. Am. J. Clin. Nutr. 2002, 75, 1051-1056 Markus, C. R.; Jonkman, L. M.; Lammers, J. HCM.; Deutz, N. EP.; Messer, M. H.; Rigtering, N. Evening intake of α-lactalbumin increases plasma tryptophan availability and improves morning alertness and brain measures of attention. Am. J. Clin. Nutr. 2005, 81, 1026-1033
76
McGuffey, M. K. Thermal stability of α-lactalbumin. North Carolina State University. Food science. 2004, Thèse de doctorat McIntosh, G. H.; Royle, P. J.; Le Leu, R. K.; Regester, G. O.; Johnson, M. A.; Grinsted, R. L.; Kenward, R. S.; Smithers, G. W. Whey proteins as functional food ingredients? Int. Dairy J. 1998, 8, 425-434 Meyer, E. E.; Rosenberg, K. J.; Israelachvili, J. Recent progress in understanding hydrophobic interactions. PNAS, 2006, 103, 15739-15746 Mizuguchi, M.; Aizawa, T.; Kawano, K.; Demura, M. Chapter 2 : NMR studies of protein folding : Folding studies of calcium-binding lyzozyme and α-lactalbumin. Annu. Rep. NMR Spectrosc. 2009, 65, 53-76 Mossberg, A.-K.; Hun Mok, K.; Morozova-Roche, L. A.; Svanborg, C. Structure and function of human α-lactalbumin made lethal to tumor cells (HAMLET)-type complexes. FEBS J. 2010, 277, 4614-4625 Pace, N. C.; Trevin, P.; Prabhakaran, E.; Scholtz M. J. Protein structure, stability and solubility in water and other solvents. Philos. Trans. R. Soc. London, B. 2004, 359, 1225-1235 Pearce, R. J. Whey protein recovery and whey protein fractionation. In Whey and lactose processing, First edition.; Zadow, J. G. Elsevier Science Publishers LTD : Barking, England, 1992; 217-316 Permyakov, E. A.; Berliner, L. J. α-lactalbumine : Structure and function. FEBS Lett. 2000, 473, 269-274 Petsalaki, E.; Stark, A.; Garcia-Urdiales, E.; Russell, R. B. Accurate prediction of peptide binding sites on protein surfaces. Comput. Biol. 2009, 5, 1-10
Pouliot, Y.; Guy, M.-M.; Tremblay, M.; Gaonac’h, A-C.; Bertrand, C. P. T.; Gauthier, S. F.; Voyer, N. Isolation and characterization of an aggregating peptide from a tryptic hydrolysate of whey proteins. J. of Agr. Food Chem. 2009, 75, 3760-3764 Ragone, R. Hydrogen-bonding classes in proteins and their contribution to the unfolding reaction. Prot. Sci. 2001, 10, 2075-2082 Relkin, P.; Mulvihill, D. M.; Thermal unfolding of β-lactoglobulin, α-lactalbumin and bovine serum albumin. A thermodinamic approach. Crit. Rev. Food Sci. Nutr. 1996, 36, 565-601 Ren, J.; Stuart, D. I. α-lactalbumin possesses a distinct binding site. J. Biol. Chem. 1993, 268, 19292-19298
77
Roufik, S. Étude des interactions de la β-lactoglobuline bovine : Peptides bioactifs et digestibilité in vitro des complexes. Université Laval. Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation. 2005, Thèse de doctorat Schneider, P. A. Aggregation of α-lactalbumin at pH 3.5-6.0. North Carolina State University, Food Science, 2008, Mémoire de maîtrise Stănciuc N.; Râpeanu, G.; Bahrim, G.; Aprodu, I. pH and heat-induce structural changes of bovine apo-α-lactalbumin. Food Chem. 2012, 131, 956-963
Stănciuc N.; Aprodu, I.; Râpeanu, G.; Bahrim, G. pH and heat-induce structural changes of bovine apo-α-lactalbumin in response to oleic acid binding. Eur. Food Res. Technol. 2013, 236, 257-266 Sullivan, L. M.; Hun Mok, K.; Brodkorb, A. The formation of an anti-cancer complex under stimulated gastric conditions. Food Dig. 2013, 4, 7-18 Szwajkowska, M.; Wolanciuk, A.; Barlowska, J.; Król, J.; Litwińczuk, Z. Bovine milk proteins as the source of bioactive peptides influencing the consumers’ immune system – a review. Anim. Sci. Pap. Rep. 2011, 4, 269-280 Taulier, N.; Chalikian, T. V. Characterization of pH-induced transitions of β-lactoglobulin : Ultrasonic, densimetric and spectroscopic studies. J. Mol. Biol. 2001, 314, 873-889 Urista, C. M.; Fernandez, R. A.; Rodriguez, F. R.; Cuenca, A. A.; Jurado, A. T., Review: Production and functionality of active peptides from milk. Food Sci. Technol. Int. 2011, 17, 293-317 Velusamy, V.; Palaniappan, L. Compositionnal analysis α-lactalbumin. Am. J. Biochem. Mol. Biol. 2011, 1, 106-120
Zhang, S. Fabrication of novel biomaterials through molecular self-assembly. Nat. Biotechnol. 2003, 21, 1171-1178
Zhang, Y.; Zhong, Q. Probing the binding between norbixin and dairy proteins by spectroscopy methods. Food Chem. 2013, 139, 611-616
Zorilla, R; Liang, L.; Remondetto, G.; Subirade, M. Interaction of epigallocatechin-3-gallate with β-lactoglobulin: molecular characterization and biological implication. Dairy Sci. & Technol. 2011, 91, 629-644