1.1 INTRODUCTION 1.2 … · POROSITÉS 3 as = [1.4] M s V t = M s V s +V v ρas...

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CHAPITRE 1 Notions de base en physique des sols 1.1 INTRODUCTION Les principaux objectifs de la physique des sols consistent à établir les lois générales décrivant de manière quantitative le comportement à court terme des sols, de sorte qu’elles puissent être utilisées à la solution de problèmes. Les phénomènes rapides de transfert d’eau, d’air, de cha- leur et de solutés exercent une influence déterminante sur les conditions et la croissance des plantes, mais aussi sur la protection et la conservation des sols et la protection des nappes phréatiques contre les contaminants. Ce chapitre présente les notions de physique des sols nécessaires à la compréhension des prin- cipaux phénomènes d’écoulement de l’eau en milieu poreux. 1.2 LES COMPOSANTES DU VOLUME DE SOL En première analyse, le sol peut être représenté schématiquement comme constitué d’un volume de solides et d’un volume de vides (figure 1.1). Le volume des solides est constitué des Figure 1.1 Représentation schématique d’un volume de sol. Solides Vides Gaz Liquides différents minéraux et des particules de matière organique et les vides occupent les espaces libres entre les particules (minéraux et matière organique). À son tour, le volume des vides est divisé en une phase liquide et gazeuse. La phase liquide est constituée principalement de l’eau et des éléments (sels, nitrates, etc.) en solution dans celle--ci. La phase gazeuse est constituée

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CHAPITRE 1Notions de base en physique des sols

1.1 INTRODUCTION

Les principaux objectifs de la physique des sols consistent à établir les lois générales décrivantde manière quantitative le comportement à court terme des sols, de sorte qu’elles puissent êtreutilisées à la solution de problèmes. Les phénomènes rapides de transfert d’eau, d’air, de cha-leur et de solutés exercent une influence déterminante sur les conditions et la croissance desplantes, mais aussi sur la protection et la conservation des sols et la protection des nappesphréatiques contre les contaminants.

Ce chapitre présente les notions de physique des sols nécessaires à la compréhension des prin-cipaux phénomènes d’écoulement de l’eau en milieu poreux.

1.2 LES COMPOSANTES DU VOLUME DE SOL

En première analyse, le sol peut être représenté schématiquement comme constitué d’unvolume de solides et d’un volume de vides (figure 1.1). Le volume des solides est constitué des

Figure 1.1 Représentation schématique d’un volume de sol.

Solides

Vides

GazLiquides

différents minéraux et des particules de matière organique et les vides occupent les espaceslibres entre les particules (minéraux et matière organique). À son tour, le volume des vides estdivisé en une phase liquide et gazeuse. La phase liquide est constituée principalement de l’eauet des éléments (sels, nitrates, etc.) en solution dans celle--ci. La phase gazeuse est constituée

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2 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

d’azote gazeux (N2), d’oxygène (O2), d’argon (Ar), de gaz carbonique (CO2), de vapeur d’eauet d’autres gaz (CH4, H2S, etc.). L’air atmosphérique sec est actuellement composé, sur unebase volumique, de 78,08%deN2, de 20,95%deO2, de 0,934%deAr et de 0,038%deCO2 et0,002 % d’autres gaz. Dans les sols bien aérés, la proportion des différents gaz est près de cellede l’air atmosphérique alors que dans les sols mal aérés, l’oxygène est remplacée par le gazcarbonique (CO2) et d’autres gaz résultant de l’activité anaérobique (CH4, H2S, etc.). La phasegazeuse est le complément de la phase liquide, les gaz remplaçant l’eau lorsque celle--ci seretire. Le volume des solides est considéré comme constant pour autant que le sol est considérécomme indéformable. Le volume des vides est aussi appelée porosité totale. Un bon sol agri-cole a une porosité d’environ 50%.

Les volumes de solides, de liquides et de gaz sont généralement exprimés en terme de m3 oucm3 et parfois en terme de fractions ou pourcentages (m3/m3 ou cm3/cm3). Les relations entreles différents volumes sont représentées par les équations suivantes :

[1.1]Vt = Vs + Vv = Vs + Ve + Va

[1.2]Vv = Ve + Va

Vt = volume total du sol (cm3)Vs = volume des solides (cm3)Vv = volume des vides (cm3)Ve = volume d’eau ou de liquide (cm3)Va = volume d’air ou de gaz (cm3)

1.3 MASSES RÉELLES ET APPARENTES

Les paramètres fondamentaux sur lesquels reposent la description générale d’un sol relèventdes relation de masse et de volume caractérisant sa constitution. Le premier est lamasse volu-mique réelle “ρs“ qui est le rapport de la masse des constituants solides sur leur volume :

[1.3]�s =Ms

Vs

ρs = masse volumique réelle du sol (g/cm3)Ms = masse des solides (g)

Lamasse volumique réelles des éléments constituants le sol est fonction du type dematériaux :

minéraux argileux 2,00 -- 2,65 g/cm3

quartz et feldspath (limon et sable) 2,50 -- 2,60 g/cm3

minéraux contenant des éléments métalliques 4,90 -- 5,30 g/cm3

fraction organique 1,30 -- 1,40 g/cm3

Les valeurs moyennes des masses volumiques réelles sont généralement comprises entre lesvaleurs suivantes :

sols minéraux 2,60 -- 2,70 g/cm3

sols organiques 1,40 -- 2,00 g/cm3

Le second paramètre, lamasse volumique apparente sèche “ �as“ permet de tenir compte del’importance relative du volume des solides et des vides du sol :

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POROSITÉS 3

[1.4]�as =Ms

Vt=

Ms

Vs + Vv

ρas = masse volumique apparente sèche du sol (g/cm3)

La masse volumique apparente sèche d’un sol est toujours inférieure à sa masse volumiqueréelle, puisque la masse solide est toujours rapportée au volume total apparent et non seule-ment au volume de solides. Les ordres de grandeur des masses volumiques apparentes sèchessont pour différents types de sols :

sols sableux 1,40 -- 1,70 g/cm3

sols argileux 1,00 -- 1,50 g/cm3

sols tourbeux 0,30 -- 1,00 g/cm3

Lamasse volumique réelle“ �e“ de la phase liquide est définie comme le rapport de lamasse duliquide sur son volume :

[1.5]�e =Me

Ve

ρe = masse volumique du liquide (g/cm3)Me = masse de liquides (g)

Comme la phase liquide est constituée principalement de l’eau et des éléments (sels, nitrates,etc.) en solution dans celle--ci et que les sols présentent généralement de faibles concentrationset qu’ils sont soumis à de faibles variations de température, la masse volumique liquide estassimilée à celle de l’eau pure, soit 1,00 g/cm3.

1.4 POROSITÉS

Laporosité “p“, définie comme le rapport du volumedes vides sur le volume total du sol (aussiappelé le volume apparent), permet aussi de caractériser les espaces entre les particules de sol :

[1.6]p =Vv

Vv + Vs= 1 −

�as

�s

Dans les sols minéraux, la porosité varie entre 30 % et 60 %, alors que les tourbes peuventprésenter des porosités de près de 90 %.

Le volume relatif des vides peut aussi être exprimé par l’indice des vides “e” qui est peu utiliséen agronomie mais très utilisée en ingénierie :

[1.7]e =Vv

Vs

e = indice des vides

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4 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

Il existe une relation entre l’indice des vides et la porosité :

[1.8]e =p

1 − p

[1.9]p = ee + 1

Le système poral, considéré comme un réseau de pores et de conduits de faibles dimensionscommuniquant entre eux, peut être décomposé en plusieurs classes de porosité. Les deux plusimportantes sont :

Macroporosité : la partie des pores dans laquelle se déroulent la majorité des transfertd’eau et d’air. Les phénomènes de mouvement de l’eau se font principalement sous l’ac-tion des forces de la gravité dans les macropores. Ce sont ces pores qui sont libérés deleur eau suite au drainage. L’espace des teneurs en eau entre la capacité au champ et lasaturation provient des macropores.

Microporosité : la partie des pores de faibles diamètres qui retiennent l’eau suite au drai-nage. Ils réagissent peu aux forces de la gravité mais sont le site des force capillaires.

Les diamètres apparents de 30--60 µm sont généralement considérés comme la limite entre lamacroporosité et la microporosité.

1.5 TENEUR EN EAU

La quantité de liquide ou d’eau contenu dans le sol est variable dans le temps et dans l’espace.Sa caractérisation est importante et elle est définie par la teneur en eau volumique et la teneuren eau pondérale. La teneur en eau volumique “θ” est définie comme le rapport du volumed’eau contenu dans le sol à son volume apparent de sol (ou volume total de sol) :

[1.10]θ =Ve

Vt

La teneur en eau pondérale “w” est quant à elle définie comme le rapport de la masse d’eaucontenu dans le sol à la masse des particules de sol :

[1.11]w =Me

Ms

En hydrologie, les teneurs en eau volumiques sont utilisées car elles facilitent les calculs alorsqu’en agronomie, il est de tradition d’utiliser les teneurs en eau pondérales. Il existe une rela-tion entre la teneur en eau volumique et la teneur en eau pondérale d’un sol :

[1.12]θ =�as

�ew

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TENEURS EN EAU CARACTÉRISTIQUES 5

1.6 TENEURS EN EAU CARACTÉRISTIQUES

Différents concepts et définitions relatifs à l’humidité des sols ont été développés dans l’opti-que d’une utilisation pratique en agronomie. Les concepts d’humidités caractéristiques sontprésenté à la figure 1.2 et ils sont aussi en relation avec l’utilisation de l’eau par la plante.

Figure 1.2 Teneurs en eau caractéristiques des sols et croissance des plantes.

Croissance

PF PC CC SAT

RU

RFU

θ

SolidesVides

GazLiquides

Les définitions des humidités caractéristiques sont :

Saturation (Sat) : teneur en eau à saturation du sol en condition de champ. En réalité, le soln’atteint jamais une saturation complète car une certaine quantité d’air y reste toujoursemprisonnée.

Capacité au champ (CC) : teneur en eau du sol après que l’excédent d’eau se soit drainé etque le régime d’écoulement vers le bas soit devenu négligeable, ce qui se produit habi-tuellement de un à trois jours après une pluie ou une irrigation.

Point de flétrissement (PF) : teneur en eau du sol où la plante ne peut y puiser l’eau néces-saire à sa survie, y subit des dégâts irréversible et elle meure.

Point critique (PC) : la teneur en eau du sol lorsque la plante commence à souffrir d’unmanque d’eau et que sa croissance en est affectée. Cette teneur en eau est utilisé en ges-tion de l’irrigation. Il est aussi appelé point de flétrissement temporaire par certains.Cette valeur se situe entre le tiers et les deux tiers de la différence entre le point de flétris-sement et la capacité au champ et varie selon le type de plante, son stade de croissance etle pouvoir évaporant de l’air.

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6 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

Deux autres concepts utilisés en gestion de l’eau en découlent et ils sont :

Réserve utile (RU) : quantité d’eau contenu dans le sol que les plantes peuvent utiliser.C’est la différence entre la capacité au champ et le point de flétrissement.

Réserve facilement utilisable (RFU) : quantité d’eau contenu dans le sol que les plantespeuvent utiliser facilement pour leur croissance et sans subir de stress dommageable.

Toutes ces définitions et les concepts qui y sont reliés sont basés unmodèle statique et simplifiédu mouvement de l’eau dans le sol. Il ne fait pas intervenir le mouvement dynamique de l’eaudans le sol, mouvement qui sera traité aux sections 1.11 et suivantes.

1.7 PROFIL D’HUMIDITÉ

Le profil d’humidité appelé aussi le profil hydrique est la représentation graphique de la teneuren eau du sol en fonction de la profondeur (figure 1.3).

Figure 1.3 Description du profil d’humidité.

Teneur en eau

Profon

deur

CC Sat

Si le profil d’humidité présente la teneur en eau volumique, la surface comprise entre deuxprofils représente la différence de volume d’eau par unité de surface contenu dans le sol. Sicette différence est due à une précipitation, ce volume correspond au volume infiltré. Si cettedifférence est due à la transpiration des plantes, ce volume correspond à l’évapotranspirationpour la période. Un exemple simple permettra d’illustrer le concept. Pour des plants de maïsayant une profondeur effective des racines de 90 cm dans un sol ayant une capacité au champde 0,40 cm3/cm3 et un point critique de 0,30 cm3/cm3, la quantité d’eau nécessaire pour rame-ner ce sol du point critique à la capacité au champ sera :

Veau = (CC − PC) Profracines = �0, 40 cm3

cm3 − 0, 30 cm3

cm3� 90 cm = 9 cm = 90 mm

Le volume d’eau exprimé en cm correspond à 9 cm3/cm2 ou 90 mm.

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NOTIONS DE PRESSION -- TENSION -- SUCCION 7

1.8 NOTIONS DE PRESSION -- TENSION -- SUCCION

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp. 56--59.

L’ensemble de la phase liquide d’un sol est soumise à la pression atmosphérique.Dans le sol, lapression de l’eau peut varier autour de cette valeur selon les forces présentes. La pression à lasurface d’un liquide exposée à l’air libre est en équilibre avec la pression atmosphérique et elleest égale à cette dernière. Dans un souci de simplification, il est plus simple de définir la pres-sion en termede pression relative qui est la différence entre la pression et la pression atmosphé-rique. Ainsi, à la surface d’un liquide exposée à l’air libre, la pression relative est nulle. Leterme pression utilisé dans les sols fait référence à cette pression relative.

Si le point considéré est sous la surface du liquide, nous sommes en présence d’une pressionhydrostatique et positive comme le montre la figure 1.4. La pression relative s’exprime alors :

[1.13]p = � g h

p = pression (N)ρ = masse spécifique du liquide (kg/m3)g = constante gravitationnelle (9,8 m/s2)h = hauteur (m)

Figure 1.4 Pression sous et au--dessus de la surface d’un liquide.

h--h

Comme la phase liquide est considérée commehomogène et incompressible, samassevolumi-que est constante, si bien que la pression peut aussi s’exprimer sous la forme d’énergie parunité de poids ou hauteur de la colonne de liquide :

[1.14]p =� g h� g = h

Dans ce cours et dans lamajorité des traités de physique des sols, l’unité de pression utilisée estla hauteur de la colonne de liquide qui est ici la hauteur de la colonne d’eau.

Pour un point au--dessus de la nappe, la pression est négative et elle dénommée tension ou suc-cion. Le concept de tension ou succion est pratique car il permet d’enlever le signe négatif de lavaleur et de lui donner une dimension positive. La tension ou la succion sont très utilisés dansle domaine des sols :

[1.15]Tension = Succion = − Pression

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8 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

1.9 TENSIOMÈTRES

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp.(p. 263--265)

La figure 1.5 présente le schéma d’un tensiomètre, appareil qui permet de mesurer des pres-sions positives ou négatives (tension ou succion) de l’eau dans les sols. Le tensiomètre estconstitué d’une capsule poreuse en porcelaine enfoncée dans le sol et reliée à un manomètre depression au moyen d’un tube généralement en nylon. Le tensiomètre de la figure 1.5 est munied’un manomètre à mercure. La pression au niveau de la capsule est déterminée par le bilan desforces :

[1.16]pA = patm = 0 = hHg �Hg g − hHg �e g − Z �e g + pB

[1.17]pB = hHg��e − �Hg

� g + Z �e g

En exprimant cette dernière équation en terme de hauteur de colonne d’eau, elle s’écrit :

Figure 1.5 Schéma d’un tensiomètre.

Z

PA

PB

hHg

[1.18]hB =pB� g =

hHg

�e g��e − �Hg

� g +Z �e g�e g

[1.19]hB = hHg �1 −�Hg

�e�+ Z = Z − hHg ��Hg

�e− 1�

Le manomètre àmercure peut être remplacé par unmanomètre à bourdon (vacuum) ou un cap-teur électronique de pression et la pression de l’eau dans le sol est estimé :

[1.20]hB = Z − PA

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TENSIONSSUPERFICIELLESETASCENSIONCAPILLAIRE 9

La succion ou la tension que peutmesurer un tensiomètre est limitée par la pression d’entrée del’air dans la capsule de porcelaine (grosseur des pores) et le désamorçage de la colonne se pro-duit aussi lorsque la pression dans la colonne devient inférieure à la pression de vapeur d’eau.

1.10 TENSIONS SUPERFICIELLES ET ASCENSION CAPILLAIRE

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp. 36--43.

Tous se souviennent de la fabrication de bulles de savon. Un petit cercle trempé dans une eausavonneuse crée une membrane tendu entre la circonférence du cercle. Si vous soufflez surcettemembrane, vous pouvez former une bulle de savon.C’est le phénomène de tension super-ficielle qui permet d’explique ce phénomène.

Lorsqu’un tube capillaire transparent est plongé dans un récipient contenant un liquide(figure 1.6), une différence peut être observée entre le niveau du liquide dans le tube et celuidans le récipient. Cette différence de niveau est accompagnée d’unménisque incurvée au som-met de la colonne de liquide contenue dans le tube. La courbure de ce ménisque est fonction del’angle de contact liquide--solide--air.

Figure 1.6 Coupe d’un tube capillaire placé dans un récipient (Musy et Soutter, 1991).

hj

z

B

C

La hauteur d’ascension du liquide dans le tube est déterminée par la loi de Jurin qui suppose laformation d’une membrane tendue à la surface du liquide dans le tube :

[1.21]hj =2 σ cosα�e g r

hj = hauteur capillaire (m)σ = tension superficielle (N/m)α = angle de contact liquide--surface--airr = rayon du tube (m)

La pression en tout point du tube capillaire (C) peut y être déterminée :

[1.22]hC = − 2 σ cosα�e g r + �hj − z�

La tension (pression négative) est maximale sous le ménisque.

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10 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

Le tableau 1.1 présente les tensions superficielles de l’eau et du mercure en fonction de la tem-pérature. Le tableau 1.2 présente les angles de contact de l’eau et du mercure avec quelquessurfaces.

Tableau 1.1 Tensions superficielles

Température[�C]

Eau[N/m]

Mercure[N/m]

--5 0,0764

0 0,0756

5 0,0749

10 0,0742

15 0,0735 0,4100

20 0,0728 0,4355

25 0,0720

30 0,0712

Tableau 1.2 Angle de contact

liquide -- solide -- gaz Angle de contact

eau -- argile -- air 0�

eau -- quartz -- air 5�

eau -- matière organique -- air 180�

mercure -- quartz -- air �

Dans les sols composés principalement de minéraux de quartz ou argileux, l’angle de contactest très faible et il est généralement assumé à 0� car des angles de contact de quelques degrésconfèrent à l’équation de Jurin [1.21] des cos proche de 1,0.

1.11 COURBES DE TENEUR EN EAU -- SUCCION

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp. 63--66.

C’est le concept des tensions superficielles qui permet d’expliquer la courbe de teneur en eau--succion dans un sol. Les pores du sol sont assimilés à une multitude de tubes capillaires dedifférentes grosseurs qui retiennent l’eau aussi longtemps que la tension exercée par le milieuenvironnant ne dépasse pas la tension capillaire exercée par les pores. Si la tension exercée parle milieu est supérieure à celle exercée par les pores, ces derniers se videront de leur eau. Lesplus gros pores libèrent leur eau à de faibles tensions alors que les plus petits pores le font à deplus grandes tensions.

La courbe de teneur en eau -- succion (figure 1.7) est la représentation de la relation entre lateneur en eau dans un sol et la succion exercée sur ce dernier en laissant suffisamment de tempsà l’équilibre de ce réaliser. Cette courbe est déterminée au moyen de la table à tension

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COURBES DE TENEUR EN EAU -- SUCCION 11

(figure 1.8) et/ou des marmites à pression. Cette courbe est aussi appelée courbe caractéristi-que d’humidité.

Figure 1.7 Relation teneur en eau -- succion d’un sol.

0,00

0,10

0,20

0,30

0,40

0 50 100 150 200 250

Succion (cm)

Tene

uren

eau

Sol du tableau 1.4

Sol de la question 1.14

Figure 1.8 Le schéma de la table à tension.

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12 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

1.12 HYSTÉRÈSE DE LA COURBE TENEUR EN EAU -- SUCCION

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp. 67--69.

La courbe de la teneur en eau -- succion (figure 1.9) ne suit pas le même chemin lorsqu’elle estréalisée en mode de drainage ou d’humidification. Le phénomène d’hystérèse est du principa-lement à l’interconnexion de pores de différentes grosseurs et les forces capillaires impliquées.

L’exercice 1.10 permet de démontrer l’effet d’hystérèse pour un cas théorique simple.

Un gros pore coincé entre deux pores plus petits ne peut libérer son eau tant que les petits poresne sont pas vidés de leur eau, donc à de plus grandes tensions. En mode humidification, un despetits pores ne pourra pas se remplir d’eau tant que le plus gros pore ne sera pas rempli, donc àune tension plus faible qu’il ne le ferait s’il était en contact direct.

Figure 1.9 Relation teneur en eau -- succion d’un sol.

1.13 POTENTIELS ET DIAGRAMME DE POTENTIEL

Référence : Musy et M. Soutter, 1991. Physique du sol. pp. 53--63.

Le premier concept en écoulement de l’eau est le potentiel. Le potentiel est le niveau d’énergieque possède l’eau en un point. Le potentiel total en un point est la somme du potentiel de gra-vité, du potentiel de pression, du potentiel de vitesse et du potentiel osmotique. Il s’exprimesimplement :

[1.23]φ = φz + φh + φv + φo

φz = potentiel d’élévation ou de gravitéφh = potentiel de pressionφv = potentiel de vitesseφo = potentiel osmotique

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POTENTIELS ET DIAGRAMME DE POTENTIEL 13

Comme les vitesses d’écoulement dans les sols sont relativement lentes, le potentiel de vitesseest considéré comme négligeable. Le potentiel osmotique est le résultat de la concentration ensels et ses variations se manifestent principalement au niveau microscopique comme dans levoisinage des racines. Dans une approche macroscopique comme celle des problèmes d’écou-lement, ces variations sont négligeables et le potentiel osmotique est considéré comme cons-tant et sans contribution. Dans l’étude des problèmes d’écoulement, l’expression simplifiéesuivante du potentiel est utilisée :

[1.24]φ = φz + φh

L’unité la plus utilisée pour exprimer le potentiel est la hauteur de la colonne d’eau. Le poten-tiel d’élévation est l’élévation du point considéré au--dessus du point de référence. Le potentielde pression est simplement la hauteur de la colonne d’eau au--dessus du point considéré. Si leconcept semble simple, il n’est pas évident à utiliser et c’est pourquoi il est nécessaire de pré-senter quelques exemples pour mieux le comprendre.

La figure 1.10 présente les potentiels dans un bocal d’eau. La première étape est d’établir unniveau de référence qui est laissé à la discrétion de l’utilisateur. Certains niveaux de référencesont plus intuitifs que d’autres comme le fond du bocal. La seconde étape est d’établir lespotentiels aux points connus. Ainsi, à la surface de l’eau, le potentiel de pression est nul(φh = 0) et le potentiel d’élévation est égal à l’élévation du niveau de l’eau au--dessus du pointde référence (φz = h). Au niveau du fond du bocal, le potentiel d’élévation correspond auniveau de référence (φz = 0) et le potentiel de pression est égal à la hauteur de la colonne d’eauau--dessus du fond (φh = h). La figure à droite représente le diagramme des potentiels. Ainsi,le potentiel total qui est la somme des potentiels de pression et d’élévation est ici égal en toutpoint du bocal à la hauteur de la colonne d’eau au--dessus du fond (φ = h). Il est laissé au lec-teur d’établir le même diagramme des potentiels en fixant le niveau de référence au niveau del’eau dans le bocal.

Figure 1.10 Potentiels dans un bocal d’eau.

h

h

φh φz

φ

Potentiel

z

Réf.

La nappe phréatique se définit comme le lieu dans le sol où la pression de l’eau est nulle(φh = 0). Elle correspond au niveau de l’eau qui se stabilise dans un trou creusé dans le sol.

La figure 1.11 présente les potentiels dans un bocal de sol où une nappe d’eau est présente. Leniveau de référence est fixé au fond du bocal. La seconde étape est d’établir les potentiels aux

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14 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

points connus. Ainsi, à la surface de la nappe, le potentiel de pression est nul (φh = 0) et lepotentiel d’élévation est égal à l’élévation du niveau d’eau au--dessus du point de référence(φz = h). Au niveau du fond du bocal, le potentiel d’élévation correspond au niveau de réfé-rence (φz = 0) et le potentiel de pression est égal à la hauteur de la colonne d’eau au--dessus dufond (φh = h). À la surface du sol, le potentiel d’élévation est φz = h+ d. La figure à droitereprésente le diagramme des potentiels. Le potentiel de pression à la surface du sol peut êtredéduit en prolongeant la ligne du potentiel de pression. La pression est négative d’une valeurégale à la distance à la nappe. Cette pression négative est appelée succion ou potentiel matri-ciel. Le potentiel total qui est la somme des potentiels de pression et d’élévation est ici égal entout point du bocal à la hauteur de la colonne d’eau au--dessus du fond (φ = h). Dans un sys-tème au repos comme celui--ci et le précédent, le potentiel total est constant sur toute la profon-deur.

Figure 1.11 Potentiels dans un bocal de sol avec une nappe.

h

h

φh φzφ

Potentiel

z

d

--d

Réf.

De l’analyse des exemples précédents, il se dégage les règles suivantes :

1. Le niveau de référence doit être établi au point de départ,

2. Le potentiel de pression est nul au niveau de la nappe ou d’une surface d’eau,

3. La pression se transmet intégralement dans un espace occupé par l’eau,

4. Dans un système au repos, il n’y a pas d’écoulement et le potentiel total estconstant.

1.14 PROFIL D’HUMIDITÉ À ÉQUILIBRE

Un profil d’humidité est à équilibre lorsqu’il ne bouge pas et que la teneur en eau est en équili-bre avec le potentiel de pression (succion). Cette situation se produit lorsque le potentiel totalest constant sur toute la profondeur du sol considéré. Le tableau xx présente le cas d’un solpossédant la courbe teneur en eau -- succion du tableau 1.4 pour une nappe à 60 cm de profon-deur. La première étape est d’établir le potentiel total (ici la référence est à la surface du sol) etle potentiel de pression (succion) à chaque profondeur. À chaque profondeur, correspond unesuccion (pression) et à cette succion correspond la teneur en eau en équilibre à cette succion. Sila pression est positive, le sol est saturé et la teneur en eau est celle de la saturation (φh = 0).

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POROSITÉ ÉQUIVALENTE DE DRAINAGE 15

Tableau 1.3 Profil d’humidité à équilibre d’un sol possédant la courbe teneur en eau -- suc-cion du tableau 1.4 pour une nappe à 60 cm de profondeur.

Profondeur(cm)

ϕz(cm)1

ϕ(cm)1

Pression(cm)

Succion(cm)

θ

0 0 --60 --60 60 0,310

20 --20 --60 --40 40 0,328

40 --40 --60 --20 20 0,350

60 --60 --60 0 0 0,365

80 --80 --60 20 --20 0,365

100 --100 --60 40 --40 0,3651 Référence à la surface du sol

1.15 POROSITÉ ÉQUIVALENTE DE DRAINAGE

1.15.1 Le rabattement de la nappe

Dans un sol homogène, le rabattement de la nappe correspond, si l’équilibre est atteint, à retirerle surplus d’eau du profil d’humidité pour le ramener à équilibre. Ceci équivaut à déplacer leprofil d’humidité vers le bas d’une distance correspondant au rabattement de la nappe(figure 1.12). Le potentiel s’écrit alors :

[1.25]�2 = �1 + ∆h

�1 = potentiel quand la nappe est au niveau ”1”�2 = potentiel quand la nappe est au niveau ”2”∆h = rabattement de la nappe

Figure 1.12 Changement du profil d’humidité lors du rabattement de la nappe.

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16 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

Le volume unitaire d’eau drainée (∆V) lors du rabattement de la nappe s’écrit :

[1.26]∆V = �h2

0

θ�z, h1� dz −�h2

0

θ�z, h2� dz

∆V = volume unitaire d’eau drainée (L3/L3 L)h1 et h2 = position de la nappe au niveau ”1” et “2”

1.15.2 Le rabattement de la nappe en condition réelle

En condition réelle, le rabattement de la nappe n’est jamais suffisamment lent pour permettrel’équilibre complet (figure 1.13). La teneur en eau (θ) et la porosité efficace sont fonction d’untroisième paramètre, le temps. Le volume unitaire d’eau drainé s’écrit alors :

[1.27]∆V = �h1

0

θ�z, h1, t1� dz −�h2

0

θ�z, h2, t2� dz

Les simplifications que permettait ∇� = 0 ne peuvent être utilisées.

Figure 1.13 L’équilibre dynamique d’un profil d’humidité en condition de drainage (Childs,1957).

1.15.3 Porosité équivalente de drainage

L’utilisation par les différents modèles de drainage de la porosité de drainage comme unvolume unitaire d’eau libérée lors du rabattement de la nappe a amené la création de la notionde porosité équivalente de drainage (µ’) (Taylor, 1960). La porosité équivalente de drainageest le volume unitaire d’eau libérée par le profil de sol lors du rabattement de la nappe d’uneposition à une autre (figure 1.14) :

[1.28]��(h) =

∆Veau drainé

∆Vsol drainé

=Quantité d�eau restituée par le sol

Volume de sol libéré de la nappe

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POROSITÉ ÉQUIVALENTE DE DRAINAGE 17

[1.29]��(h) = ∆V(h)∆h

[1.30]��(h) =

�∞

0

θ(z, h, t) dz −�∞

0

θ(z, h + ∆h, t + ∆t) dz

∆h

Cette fonction permet d’évaluer la quantité d’eau drainée lors du rabattement de la nappe entredeux points donnés. Le volume d’eau drainé provient de tout le profil de sol au--dessus de lanappe alors que le volume de sol drainé correspond au volume où la nappe s’est rabattue.Comme l’eau ne provient pas uniquement de la zone où la nappe s’est rabattue, cette porositéest appelée “porosité équivalente de drainage“, un peu comme si l’eau ne provenait que de lazone où la nappe s’est rabattue.

Figure 1.14 Schémaprésentant le volume d’eau drainé et la porosité équivalente de drainage.

CCPF SAT θθθθ

z

ς

∆V

∆h

Cette définition a l’avantage d’être pratique et de pouvoir traiter des cas où la nappe est presqueà la surface du sol (figure 1.15) et où la porosité de drainage n’est pas constante. En réalité,c’est à cette notion de porosité équivalente de drainage que réfèrent les modèles même si leterme porosité de drainage est largement utilisé. Dans la réalité tel qu’exprimé par lafigure 1.14, le terme µ’ représentent la quantité unitaire d’eau restituée par le sol suite aurabattement de la nappe.

1.15.4 Porosité équivalente de drainage constante

Si en réalité, les changements constants des conditions externes (nappes, précipitations) nepermettent pas au profil d’humidité d’atteindre l’équilibre, l’observation des courbes teneuren eau--succion (figure 1.9) et des profils d’humidité en période de drainage (figure 1.12) per-met de tirer les trois constatations suivantes pour l’établissement d’un modèle :

� Immédiatement au--dessus de la nappe où la succion est faible, un accroissement de lasuccion ne provoque qu’un léger changement de l’humidité de cette région car peu de

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18 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

pores sont suffisamment gros pour que leurs forces capillaires soient vaincues par l’ac-croissement de succion. Cette zone au--dessus de la nappe où une variation de succiona peu d’influence sur l’humidité est presque saturée et elle est appelée frange capillaire(Childs, 1957).

� Au--dessus de cette frange, un faible accroissement de la succion provoque une diminu-tion significative de la teneur en eau. Les forces capillaires d’une assez grande portiondes pores sont alors vaincues par la succion et une quantité significative d’eau est libé-rée. C’est cette zone du sol qui libère son eau lors du drainage et s’aère. I1 est intéressantde remarquer la distance qui sépare la zone d’aération de la nappe.

� Avec l’augmentation de la succion, les pores qui sont remplis d’eau sont de plus en pluspetits et difficiles à drainer et un gradient élevé de succion est nécessaire pour libérer unetrès petite quantité d’eau (− K(θ) ∆� ≈ 0) que 1e drainage ne peut évacuer efficacementque sur une longue période de temps (de l’ordre des semaines).

C’est de cette dernière constatation, que sont nées les notions de capacité au champ (C.C.) et deporosité constante d’aération ou porosité de drainage constante (figure 1.16). Viehmeyer etHendrickson (1949) définissent la capacité au champ comme étant la teneur en eau d’un solaprès que le mouvement descendant ait matériellement décru. Childs (1957) arrive à la définircomme la plus faible teneur en eau à laquelle un sol peut être amené par drainage dans un tempsraisonnable. La porosité de drainage (µ) est alors la quantité d’air contenue dans le sol aprèsdrainage ou plutôt la quantité d’eau libérée par le drainage par unité de volume de sol (Luthin,1960).

Cette notion de capacité au champ constante est une notion pratique et approximative qui estprincipalement utilisée en irrigation. Le mouvement de l’eau qui est un phénomène dynami-que et continu est en contradiction avec la notion de constance de la capacité au champ ou de la

Figure 1.15 Évolution du profil d’humidité pour des nappes à la surface du sol et à faibleprofondeur.

Nappe à la surface du sol

Nappe à faible profondeur

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POROSITÉ ÉQUIVALENTE DE DRAINAGE 19

porosité de drainage. Les valeurs de la capacité au champ et de la porosité de drainage ne serontpas lesmêmes en condition de drainage avec une nappe que sans nappe à la suite d’une précipi-tation ou d’une irrigation.

La capacité au champ comme la porosité de drainage sont en soi des valeurs dynamiques. Sileurs valeurs peuvent varier selon les conditions de drainage, les variations sont en réalité fai-bles (Childs,1957) et permettent d’accepter ce concept de porosité de drainage constante. Deplus, en condition de drainage souterrain où le rabattement de la nappe est relativement lent(10 -- 30 cm/j), le profil atteint un équilibre dynamique (figure 1.13) que l’on peut considérercomme stable (Childs,1957) :

[1.31]θ(z, h, t) = θ�(z, h)

Cette constatation permet de justifier le concept de porosité équivalente de drainage constantedans de nombreux modèles de drainage (figure 1.16) :

[1.32]� = ∆V∆h

Toutefois, ce concept est limité aux cas où la nappe est plus profonde que la hauteur de lafrange capillaire et de la zone intermédiaire. Quand la nappe est près de la surface du sol ou àfaible profondeur (figure 1.15), le volume d’eau drainée est beaucoup plus faible que celuiprévu par l’expression [1.32]. Dans le cas extrêmeoù la nappe est à la surface du sol, le rabatte-ment de la nappe s’effectue avec un très faible volume d’eau drainé.

Figure 1.16 Schéma présentant la porosité de drainage.

CCPF SAT

µ

frange capillaire

θθθθ

PF : point de flétrissement

CC : capacité au champ

SAT : saturation

µ : porosité de drainage

θ : teneur en eau

z

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20 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

1.15.5 Courbe teneur en eau--succion et volume d’eau drainée

La figure 1.17 présente le processus de drainage d’un profil de sol possédant la courbe teneuren eau--succion du tableau 1.4 en assumant que le drainage est suffisamment lent pour permet-tre que les potentiels soient en équilibre avec la nappe. Dans ces conditions, le potentiel totalest constant (ϕ = cte) et le potentiel de pression peut facilement être déterminé en tout pointet tout particulièrement au niveau de la nappe (ϕh = 0). En connaissant la succion (pressionnégative) en chaque point au--dessus de la nappe, la teneur en eau en chaque point en estdéduite et elle a comme valeur la teneur en eau correspondante à la succion de la courbeteneur--en--eau--succion. Sous la nappe, la teneur en eau est celle de la saturation. La premièreétape est de déterminer le potentiel de pression (succion) pour en déduire la teneur en eau cor-respondante.

Figure 1.17 Profils des potentiels de pression et de teneur en eau en fonction de la profon-deur de la nappe.

0

20

40

100

80

60

--40 80400--80

Potentiel de pression

Nappe

40 cm

100 cm

20 cm

0 cm

0

20

40

100

80

60

0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5Teneur en eau

Nappe

0 cm

100 cm

40 cm

20 cm

Le volume d’eau drainé d’une couche de sol, est la différence entre la teneur en eau saturéeet la teneur en eau résultant de la nappe à la profondeur de drainage considérée fois l’épaisseurde la couche de sol comme présenté dans l’équation suivante :

[1.33]Vdz1−z2 = �θsat − �θz1 + θz22�� ∆Z

La figure 1.17 et la tableau 1.5 présentent les courbes de potentiels de pression (succion) enfonction de la profondeur de la nappe et les teneurs en eau correspondantes pour le sol dutableau 1.4. Le tableau 1.5 présente aussi les volumes d’eau drainée de chaque couche de solet le volume total drainé du profil de sol.

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POROSITÉ ÉQUIVALENTE DE DRAINAGE 21

Tableau 1.4 Exemple de relation entre la teneur en eau et la succion d’un sol .

Succion (cm) 0 10 20 30 40 50 60 80 100

θ 0,365 0,360 0,350 0,340 0,328 0,319 0,310 0,297 0,288

Tableau 1.5 Potentiel de pression, teneur en eau et volume d’eau drainé (mm d’eau) en fonc-tion de la profondeur de la nappe pour le sol du tableau 1.4. Les volume d’eaudrainé sont exprimés en mm.

Profondeur(cm)

Nappe = 10 cm Nappe = 20 cm Nappe = 30 cmProfondeur(cm) ϕh θ Vd (mm) ϕh θ Vd (mm) ϕh θ Vd (mm)

0 --10 0,360 --20 0,350 --30 0,34010 0 0,365 0,25 --10 0,360 1,00 --20 0,350 2,0020 10 “ 0,00 0 0,365 0,25 --10 0,360 1,0030 20 “ “ 10 “ 0,00 0 0,365 0,2540 30 “ “ 20 “ “ 10 “ 0,0050 40 “ “ 30 “ “ 20 “ “60 50 “ “ 40 “ “ 30 “ “80 70 “ “ 60 “ “ 50 “ “100 90 “ “ 80 “ “ 70 “ “

Vdrainé (mm) 0,25 1,25 3,25µ’ 0,0025 0,010 0,020

Tableau 1.5 (suite)

Profondeur(cm)

Nappe = 40 cm Nappe = 60 cm Nappe = 100 cm(cm)

ϕh θ Vd (mm) ϕh θ Vd (mm) ϕh θ Vd (mm)

0 --40 0,328 --60 0,310 --100 0,288

10 --30 0,340 3,10 --50 0,319 5,05 --90 0,2921

7,50

20 --20 0,350 2,00 --40 0,328 4,15 --80 0,297 7,05

30 --10 0,360 1,00 --30 0,340 3,10 --70 0,3031

6,50

40 0 0,365 0,25 --20 0,350 2,00 --60 0,310 5,85

50 10 “ 0,00 --10 0,360 1,00 --50 0,319 5,05

60 20 “ “ 0 0,365 0,25 --40 0,328 4,15

70 30 “ “ 10 “ 0,00 --30 0,340 3,10

80 40 “ “ 20 “ --20 0,350 2,00

90 50 “ “ 30 “ “ --10 0,360 1,00

100 60 “ “ 40 “ “ 0 0,365 0,25

Vdrainé (mm) 6,35 15,55 42,45

µ’ 0,031 0,046 0,0671 Valeur interpolée

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22 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

BIBLIOGRAPHIE

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Musy A. et M. Soutter. 1991. Physique des sols. Presses Polytechniques et UniversitairesRomandes.

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Veihmeyer, F.J. et A.H. Hendrickson, 1949. Methods of measuring field capacity and perma-nent wilting percentage of soils. Soil Sci. 68 : 75--94.

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PROBLÈMES 23

PROBLÈMES

1.1 Pour un sol typique ayant une porosité de 50% et une masse volumique réelle (ρs) de2650 kg/m3, calculez les masses volumiques apparentes humides pour des teneurs eneau volumique de 50%, 40%, 30%, 20% et 10%.

1.2 Un sol possède un profil d’humidité avec une teneur en eau volumique constante de 30%sur les 100 premiers cm de sol.

a) tracez le profil d’humidité.

b) calculez le volume d’eau contenu dans les 50 premiers cm de sol et exprimez cettevaleur en kg/m3, g/cm3 et mm H2O.

c) calculez la pluie nécessaire pour ramener la teneur en eau à 40% sur les 50 premierscm.

1.3 Pour un tensiomètre dans le sol utilisant un manomètre au mercure, développez l’équa-tion décrivant la pression au bout de la pointe de céramique.

1.4 Si vous utilisiez un capteur de pression et un système d’acquisition de données (voltage-- pression) au lieu d’utiliser unmanomètre aumercure, présentez l’équation décrivant lapression au bout de la pointe de céramique.

1.5 Un tensiomètre muni d’un manomètre au mercure dont le récipient est installé à 30 cmau--dessus du sol est installé à 90 cm de profondeur. Quelle est la profondeur de la nappela plus élevée que ce système peut mesurer pratiquement? À quelle élévation doit--oninstaller le manomètre pour mesurer une nappe à la surface du sol.

1.6 À une température de 30°C, quelle est la plus grande tension qu’un tensiomètre peutmesurer si sa pointe de céramique est installée à 90 cm de profondeur et que le contenantde mercure est installé à 50 cm au--dessus du sol?

1.7 Quelle est la pression sous le ménisque dans un tube plongé dans un liquide (ex. l’eau)?

1.8 Quelles sont les ascensions capillaires de l’eau et du mercure dans des tubes en verrepossédant des diamètres respectifs de 0,5 mm, 1 mm, 2 mm et 5 mm?

1.9 Un sol est constitué d’unemultitude de tubes capillaires ayant un cmdehauteur et possé-dant trois différents diamètres (d1 = 0,30 mm, d2 = 0,06 mm, d3 = 0,03 mm). Les pluspetits tubes sont plus nombreux de sorte les volumes des vides occupés par chaque typede tube sont égaux et occupent 15 % du volume total. Ce sol est placé sur une table àtension et est initialement saturé (le niveau du tube de drainage correspond à la surfacedu sol). Le tube de drainage est par la suite abaissé par étape et le volume d’eau drainé yest mesuré. Si la tension superficielle du liquide de drainage est de 0,073 N/m et quel’angle de contact est de 0°,

a) déterminez la tension où chaque type de tubes capillaires va débuter son drainage,

b) tracez la courbe teneur en eau -- succion de ce sol pour lemode de drainage et d’humi-dification.

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24 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS

1.10 Un matériel poreux est constitué d’une multitude de tubes capillaires tel que présentés àla figure suivante. La porosité totale de cematériel est de 0,45 et les volumes des vides dechacun des types de tubes sont égaux. Tracez la courbe teneur en eau -- succion de ce solpour le mode de drainage et d’humidification.

R1 = 0,015 cm R3 = 0,0015 cmR2 = 0,008 cm

σ = 0,073 N/m

0,5 cmR2

R1

R1

R2

R3

0,5 cm

1.11 Un échantillon de sol (100 cm3) de la sérieWagram a été placé sur une table à tension et aété amené à la saturation. Le tube de drainage de la table à tension a été par la suiteabaissé par étape successives. À chaque étape, le drainage s’est réalisé jusqu’à ce que lateneur en eau à l’équilibre soit atteinte. Les volumes suivants de drainage ont été mesu-rés à chaque étape :

Tension Volume d’eau drainé Tension Volume d’eau drainé

(cm) (cm3) (cm) (cm3)

0 0,0 60 3,010 0,3 80 3,720 1,4 100 1,430 3,1 150 1,640 3,6 200 1,550 3,4 500 2,1

À la fin des mesures, l’échantillon a été pesé (169,1 g) et séché à l’étuve pour y mesurerun poids de sol sec de 164,0 g. Déterminez et tracez la courbe teneur en eau -- succion dece sol.

1.12 Une colonne de 100 cm du sol de la question précédente a été saturé en y amenant lanappe à la surface. Le drain placé au bas de la colonne de sol y est ouvert pour permettrele drainage jusqu’à ce que l’équilibre soit atteint.

a) Tracez la courbe du profil d’humidité lorsque l’équilibre est atteint.

b) Calculez le volume d’eau drainé.

c) Si le drain avait été placé à 10 cmde la surface, quel aurait été le volume d’eau drainé?

d) Quel aurait été le volume d’eau drainé si le drain avait été placé à des profondeursrespectives de 20 cm, 30 cm, 40 cm, 50 cm, 60 et 80 cm?

e) Tracez la courbe du volume d’eau drainé en fonction de la profondeur de la nappe.

f) Tracez la courbe de la porosité équivalente de drainage en fonction de la profondeurde la nappe.

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PROBLÈMES 25

1.13 Une colonne de sol est constitué d’une couche de 50 cmde sol de la série Wagram (ques-tion 1.11 ) déposée au dessus d’une couche de 50 cmd’un autre sol qui possède les carac-téristiques suivantes (teneur en eau volumique -- succion) :

Succion Teneur en eau Succion Teneur en eau

(cm) (cm)

0 0,482 60 0,39610 0,444 70 0,39220 0,429 80 0,38830 0,418 100 0,38140 0,410 150 0,37250 0,402 200 0,368

La colonne est initialement saturée et, par la suite, elle est drainée à l’équilibre en abais-sant la nappe à 100 cm de profondeur.

a) Tracez la courbe du profil d’humidité lorsque l’équilibre est atteint.

b) Calculez le volume d’eau drainé en fonction des profondeurs respectives de 10 cm,20 cm, 30 cm, 40 cm, 50 cm, 60 cm, 80 cm et 100 cm.

c) Tracez la courbe du volume d’eau drainé en fonction de la profondeur de la nappe.

d) Tracez la courbe de la porosité équivalente de drainage en fonction de la profondeurde la nappe.

1.14 Un échantillon de sol de la série Wagram du problème 1.11 a été saturé lentement sur latable à tension dans la laboratoire et les caractéristiques suivantes (teneur en eau volumi-que -- succion) ont été obtenues :

Succion Teneur en eau Succion Teneur en eau

(cm) (cm)

0 0,380 60 0,17010 0,356 70 0,13820 0,325 80 0,12030 0,287 100 0,10340 0,245 150 0,08750 0,205 200 0,072

a) Calculez le volume d’eau drainé en fonction des profondeurs respectives de 10 cm,20 cm, 30 cm, 40 cm, 50 cm, 60 cm, 80 cm et 100 cm.

b) La courbe teneur en eau -- succion est utilisée dans la question 1.11 avait de l’airemprisonné pour les conditions saturées alors que celle--ci n’en avait pas. En suppo-sant qu’il y aura de l’air emprisonné dans les conditions au champ, estimez l’erreursur les volumes d’eau drainé et de la porosité équivalente de drainage si la présentecourbe teneur en eau -- succion était utilisée.

Page 26: 1.1 INTRODUCTION 1.2 … · POROSITÉS 3 as = [1.4] M s V t = M s V s +V v ρas =massevolumiqueapparentesèchedu sol (g/cm3) La masse volumique apparente sèche d’un sol est toujours

26 NOTIONS DE BASE EN PHYSIQUE DES SOLS